SOMMAIRE
I - La carte
judiciaire
II – Le tribunal de
première instance (TPI)
III – Les blocs de
compétence
IV – Le guichet
universel de greffe (GUG) et le service d’accueil unique du justiciable (SAUJ)
I – LA CARTE JUDICIAIRE
Justice
de proximité. Justice et Ville. Justice redéployée. La
localisation des juridictions sur l'ensemble du territoire national est une
question qui soulève toujours des difficultés et des débats passionnels[1].
Héritée de l'histoire[2],
empreinte de considérations d'aménagement du territoire, la rationalisation de
la carte judiciaire n'est pas la règle en la matière, des juridictions étant
surchargées par l'arrivée progressive mais constante d'habitants dans leur
ressort, d'autres au contraire perdant leurs justiciables… sans trop s'en
plaindre[3].
a) De nombreux
rapports ont été produits sur la question : d'abord, celui de
M. Géronimi en 1991, puis celui de M. Carrez en 1993 ; ce
dernier révéla essentiellement les incohérences de la carte judiciaire,
provoquées au fil des années, par la concentration urbaine[4].
Deux
groupes de travail ont été constitués sur cette question en 1993 : l'un
composé de députés, sur « Justice et
Ville », dont le rapport constate, d'une part, que les juges des
enfants sont surchargés, d'autre part, que l'action des structures
administratives de protection sociale doit être renforcée ; des solutions
sont avancées : développer la coordination entre les différentes
collectivités publiques, les responsables des structures sociales et les
juridictions pour désengorger les tribunaux pour enfants ; dans le même
but, améliorer les procédures de signalement des cas de mineurs en danger par
les départements aux juridictions[5], faire
intervenir systématiquement les parquets des mineurs avant toute saisine du
juge, même en matière civile ; développer une justice et une police de
proximité innovantes (nouvelles maisons de justice à créer, réparation en
nature au profit des victimes, commissariats dans les quartiers en
difficulté) ; multiplier les mesures éducatives, en particulier
l'éloignement éducatif.
L'autre
rapport était sénatorial et fut rédigé par la commission Haenel/ Arthuis, du
nom de son président et de son rapporteur. Il eut plus de retentissement et de
succès ; il faut dire qu'il était résolument « pragmatique » et
n'avançait que des propositions « concrètes et faciles à mettre en œuvre, avec des coûts réduits », ce qui ne
pouvait manquer de séduire un gouvernement… Remis en février 1994, ses
principaux axes de réflexion étaient de recréer une justice de proximité en
développant une logique de partenariat, de recentrer les missions du juge en
transférant une partie de ses compétences vers d'autres acteurs du monde
judiciaire, de réorganiser l'institution judiciaire en consacrant
l'arrondissement comme l'échelon géographique adapté pour les contentieux de
proximité. Ses conclusions ont été en partie reprises dans la loi du
8 février 1995 qui généralise le juge unique (v. infra, l'organisation judiciaire), instaure des juges non
professionnels (v. infra, les
magistrats) et réorganise l'implantation des maisons de justice (v. infra, les auxiliaires de justice).
Par ailleurs, une loi de programmation sur la justice fut votée en
janvier 1995, qui reprend les orientations du rapport Haenel/Arthuis. Un
autre rapport avait été confié à M. Casorla en 1997, mais en raison du
changement de majorité politique en mars 1997, il ne fut pas
officiellement remis et le 28 novembre 2001, le garde des Sceaux annonçait
l'abandon de toute réforme de la carte judiciaire. La création des juridictions
de proximité par la loi du 9 septembre 2002 aurait dû permettre de revoir,
à terme, la répartition géographique des tribunaux par le biais de leur
articulation avec les tribunaux d'instance. La création des pôles de
l'instruction par la loi du 5 mars 2007 a obligé le gouvernement à revoir
la question de la répartition des moyens entre les juridictions.
b) Il faut beaucoup
de courage politique pour imposer une réforme de la carte judiciaire et vaincre
le localisme, le corporatisme et le clientélisme politique[6]. Inscrite dans le programme
sur la justice du président de la République élu en mai 2007, la question
de la carte judiciaire a agité le monde judiciaire de juillet 2007 à
février 2008, avec la contestation de la méthode suivie et des résultats
concrets auxquels elle a conduit, plus que le principe même d'une telle réforme.
Il est vrai que la concertation lancée en juillet 2007 par la création
d'un « comité consultatif de la carte judiciaire » a fait long feu,
puisque ladite commission ne fut réunie… qu'une fois ! Les manifestations
de rues l'ont alors emporté sur la raison et la concertation. Mais il faut être
honnête et reconnaître que sans un passage en force, jamais la réforme n'aurait
vu le jour, car elle heurtait de front l'addition de tous les corporatismes et
de toutes les démagogies, chacun voulant bien de la réforme, mais pour son
voisin. Combien d'avocats la contestaient par solidarité avec les confrères des
tribunaux supprimés, mais se réjouissaient secrètement de la centralisation, au
siège des tribunaux où ils étaient installés, des contentieux dont connaissaient
jusqu'alors leurs « malheureux » confrères ; combien de députés
et de sénateurs défendaient jusqu'au bout, le maintien d'une juridiction dans
leur circonscription ou leur département au nom « de la proximité et de
l'intérêt des justiciables », voire de « l'aménagement du
territoire », mais reconnaissaient officieusement qu'il fallait
« rationaliser » la gestion de nos juridictions ! Après la
contestation, y compris dans la rue par des manifestations, vînt le temps des
décrets, des recours devant le Conseil d'État[7], puis la contre-réforme, à
dose homéopathique.
1) Les décrets du 15 février (no 2008-145
et 146), du 29 mai (no 2008-514) et du 30 octobre
2008 (ce dernier pour parer à l'éventualité d'une annulation par le Conseil
d'État des décrets de février) réforment la carte, sans vrai critère de
cohérence dans l'espace (pourquoi la Bretagne a-t-elle été frappée plus que
d'autres régions, avec la suppression de 3 TGI et de 12 TI ?), mais
avec une réelle volonté d'un différé dans le temps, ne serait-ce que pour des
questions d'intendance (reloger les juridictions supprimées), selon le
calendrier échelonné de 2008 au 31 décembre 2010.
Au
1er janvier 2008, juste avant la réforme, on comptait 181 TGI,
477 TI, 185 tribunaux de commerce et 271 conseils de prud'hommes ; en
2017, on compte 164 TGI , 307 TI , 134 tribunaux de commerce (y compris,
outre-mer, les tribunaux de commerce à compétence commerciale) et 210 conseils de prud'hommes (plus 6 tribunaux
du travail), auxquels il faut ajouter, au 1er janvier 2010 (pas
de chiffres officiels après cette date), 263 tribunaux paritaires des baux
ruraux. En revanche, le nombre de tribunaux des affaires de sécurité sociale et
de tribunaux pour enfants est resté stable : respectivement 114 en 2016 et
155. Dans le même temps le nombre de tribunaux administratifs est passé de 36 à
42, avec 8 cours administratives d’appel, mais celui des chambres régionales
des comptes a été ramené de 27 à 20. Sur le nombre de juridictions par
catégories, v. ss 371.
Les
cours d'appel n'ont pas été touchées par la réforme (36 en 2017 et 1 Tribunal
supérieur d’appel à Saint-Pierre-et-Miquelon).
2) L'accompagnement de cette refonte a concerné, à titre
principal, les avocats (Décr. no 2008-741, 29 juill.
2008), qui peuvent percevoir une sorte de prime à la suppression du tribunal
près duquel ils étaient établis, sous la forme d'une « aide à l'adaptation
de son exercice professionnel aux conditions nouvelles résultant de la
suppression de ce tribunal ». Pour les greffiers des tribunaux de
commerce, les passerelles vers d'autres professions judiciaires sont assouplies
(Décr. no 2008-786, 18 août 2008).
3) Un bilan (sévère)
a été dressé par un rapport d'information sénatoriale en juillet 2012 sur la
méthode suivie pour réformer la carte judiciaire (v. ss 371 sur l'autre
question abordée par ce rapport, celle du tribunal unique de première
instance), alors que la Cour des comptes, tout au contraire, dans son rapport
annuel pour 2014, dressait un « bilan très positif » de cette
réforme ; il faut sans doute[8] y
voir la traduction de deux approches différentes, politique pour le Sénat (les
sénateurs sont les élus des départements et sont donc sensibles aux
suppressions de juridictions dans leurs territoires) et économico-budgétaire
pour la Cour. Le rapport de la mission confiée à un groupe présidé par
M. Serge Daël (conseiller d'état,
président de la CADA) sur l'éventuelle modification de la nouvelle carte
judiciaire est resté très prudent : il proposait, notamment, de créer
des chambres détachées dans certaines villes qui ont perdu leur TGI (sur le
rôle de ces chambres, v ss 371), mais aussi de rouvrir… le tribunal de Tulle[9],
lieu hautement symbolique compte tenu de l'implantation locale de celui qui fut
élu Président de la République en 2012 ; au final, deux autres TGI
(Saint-Gaudens et Saumur) ont été réimplantés avec Tulle au 1er sept.
2014 (v. ss 371, en note du tableau).
II - LE TRIBUNAL DE PREMIÈRE INSTANCE (TPI)
La question du TPI et les Commissions
Guinchard et Marshall.
Fédération de moyens. Coordination de l’activité des juridictions d’un même
ressort. La refonte de la
carte judiciaire est une question récurrente et, pour tout dire, politiquement
sensible ; derrière les grands discours et les belles déclarations sur
l'indispensable réorganisation de nos juridictions, la qualification et la
spécialisation des juges qui en sont chargés, les nécessaires échanges que le
travail en commun permet, se cachent les réalités du terrain, c'est-à-dire le
souhait de ne pas mécontenter les électeurs, aux prochaines échéances
électorales et les élections, la France n'en manque pas. C'est sans doute pour
cette raison que les propositions se sont succédé depuis des décennies, sans
véritablement aboutir, jusqu'à ce jour de juin 2007 où une nouvelle garde
des Sceaux a annoncé sa volonté de progresser rapidement, suivant en cela très
fidèlement le programme du président élu en mai 2007, tellement rapidement
que les décrets furent publiés le 15 février 2008, après une contestation
radicale des avocats et de certains magistrats.
a)
Fallait-il, dans le cadre de cette réforme instaurer ce mythe que constitue le
tribunal unique de première instance (TPI, avec un siège central et des
antennes) ?
Avant
d'en discuter, il ne faut pas perdre de vue l'intérêt du justiciable qui doit
passer avant la demande croissante et pressante de concentration des
juridictions dans une seule et exclusive logique de rationalisation des moyens ;
les travaux de la commission Guinchard
traduisent bien ce souci d'un équilibre entre d'ambitieuses réformes, souvent
irréalisables parce qu'irréalistes, et le besoin accru de mettre le justiciable
au centre des réformes, ce que porte l'intitulé du rapport « L'ambition raisonnée d'une justice apaisée »[10] et ne pas se cacher
qu'instaurer le TPI c'est rouvrir la boîte de Pandore d'une nouvelle réforme de
la carte judiciaire, avec des désirs de réouverture de tribunaux supprimés… La
demande politique sera forte en ce sens, en provenance des élus locaux.
1)
Le rapport de la commission Guinchard
(dont la mission ne visait pas expressément la question de la fusion des
juridictions de première instance, mais était centrée sur d'éventuelles
déjudiciarisations et la réorganisation des flux de contentieux entre ces
juridictions, hors tribunaux de commerce, conseils de prud'hommes, tribunaux
paritaires des baux ruraux et tribunaux des affaires de sécurité sociale) a
démontré, en juin 2008, qu'à force de préconiser le TPI dans tous les rapports
officiels depuis trente ans, sans jamais le mettre en œuvre (dès le lendemain
du dépôt du rapport, le rapport et l'idée étaient enterrés) la première
question à se poser est celle de sa faisabilité (c'est pourquoi nous le
qualifions de mythe), les rapports étant curieusement silencieux sur les
difficultés de mise en œuvre et n'apportant aucune réponse aux questions
suivantes rarement soulevées[11].
2)
La deuxième question à se poser est celle des raisons d'une traçabilité
historique de deux juridictions de première instance en France, depuis la
Révolution française, l'une de spécialisation, pour des contentieux complexes,
avec représentation obligatoire par avocat (c'est le TGI), l'autre de proximité
sans représentation obligatoire et pour des contentieux à faible enjeu
financier ou à forte implication sociale (l'ancienne justice de paix,
aujourd'hui le tribunal d'instance) ; la Justice c'est aussi une question
de culture et d'histoire ; même si les choses doivent bouger, il y a des
constantes qui s'imposent : le monde judiciaire est enraciné dans notre
histoire. Sous ce regard, le tribunal d’instance s’inscrit dans la mémoire
immatérielle de la France, de la même façon – mais cette fois de manière
matérielle - que les voies romaines se retrouvent bien souvent sous le tracé de
nos routes et voies ferrées.
3)
La troisième question est celle des conditions constitutionnelles d'un
détachement juridictionnel dans les antennes d'un éventuel TPI (car on conçoit
mal un TPI sans antennes autour du siège central), au regard de la répartition
des contentieux et de l'affectation des juges et des greffiers, question qui se
détriple :
-
quelle est l'autorité qui décidera des
lieux d'implantation de ces chambres ou annexes ? Le pouvoir
central ? Il semble plus à même de respecter l'égalité entre les citoyens
dans leur accès (de proximité) à la justice, mais sa compétence entraînera
inéluctablement d'incessantes négociations avec les potentats locaux. Le
pouvoir local ? Mais lequel ? Le président du TPI ? Mais ce
serait donner à un magistrat isolé un pouvoir considérable qui serait exercé
différemment à Bordeaux, à Lyon et à Lille, etc. Où serait l'égalité entre les
citoyens ? De plus, il faudrait lui confier ce pouvoir avant même la
création des TPI pour que tout fonctionne au jour J ! Aux pouvoirs
politiques locaux ? On imagine aisément les tiraillements, voire la
démagogie pour refaire, au final, une carte judiciaire de grande dispersion,
pour revenir sur les principaux acquis de la réforme de 2008.
- Même question pour le contenu des
contentieux confiés aux chambres détachées : d'abord qui en
décidera ? Même question et mêmes réponses que pour le cas précédent.
Ensuite selon quel critère ? On n'imagine pas revenir au critère actuel de
répartition des contentieux, dont on rappelle que le TGI a la part
« A » et le TI la part « B », sinon à quoi bon réformer.
Sachant que le détachement juridictionnel dans une antenne suppose, pour que le
TPI reste, constitutionnellement parlant, une seule et unique juridiction
(règle rappelée par le Conseil d'État lors de l'institution du TPI de Nouméa en
Nouvelle-Calédonie), que l'antenne connaisse de tout ou partie du contentieux
attribué au siège central[12] (ce
qui est un tout autre schéma que celui connu aujourd'hui où TGI et TI ont chacun
des contentieux que l'autre n'a pas[13]), quel intérêt y a-t-il à
ventiler les contentieux selon le schéma « tout ou partie » ?[14] Si
l'on applique cette règle, les futures chambres détachées risquent de
retrouver, au nom de la proximité, les contentieux confiés actuellement aux TI,
dont connaîtrait aussi le siège central. Quel bénéfice pour le justiciable par
rapport à une simple réorganisation des compétences entre TGI et TI comme l'a
fait la commission Guinchard ?
Mieux vaut partir des flux à répartir que de vouloir d'abord bouleverser les
structures. Et, bien évidemment, les pouvoirs politiques locaux auront tôt fait
de demander la transformation des chambres détachées en juridictions de plein
exercice, à l'image de la cour d'appel de la Guyane et des centres
universitaires devenus universités[15] !
-
Le statut des personnels : les
juges d'abord. Qui les affectera dans les chambres détachées et selon quelles
garanties, alors qu'aujourd'hui les juges sont affectés à l'instance à partir
d'une nomination dans un TGI, mais avec la garantie d'une affectation
statutaire dans leur décret de nomination (cf. art.
28, ord. 22 déc. 1958, non modifié sur ce point par la LO n° 2016-1090 du
8 août). Sachant que l'affectation actuelle des juges « au service de
l'instance » n'interdit pas l'exercice de fonctions juridictionnelles au
TGI auquel ils sont rattachés (cf. COJ,
art. R. 212-6, al. 4, v. ss 443, c), qu'apporte alors le
TPI en termes de plus-value de gestion par rapport à l'existant ? Les
greffiers ensuite : on irait vers la fusion des corps, ce qui est en soi
une bonne chose, mais la négociation sera rude… ; premier pas avec le
service d’accueil unique du justiciable dont la compétence s’étend au-delà du
ressort de la juridiction dans laquelle il est implanté.
b)
En revanche, ladite commission a souhaité revenir à deux juridictions de
première instance de « droit commun » (hors
juridictions spécialisées, même si l’expression peut paraître incongrue) en
supprimant la juridiction de proximité (tout en maintenant les juges du même
nom, que la loi du 18 novembre 2016 précitée fait disparaître au 1er
juillet 2017)[16]. Elle
a aussi préconisé, par diverses mesures ciblées, de renforcer les pouvoirs des
présidents de TGI, notamment au niveau de la répartition des tâches entre tous
les juges de sa juridiction et de développer une équipe autour des juges et des
procureurs, idée reprise par les commissions de 2013 et qui trouve son
prolongement dans le nouveau statut des magistrats à titre temporaire et la
création de postes de « juristes assistants » par la loi du 18
novembre 2016. Elle avait aussi préconisé la fusion des tribunaux de police et
des tribunaux correctionnels, les premiers devenant des chambres des seconds.
c)
Après la commission Guinchard, un rapport sénatorial déposé en juillet
2012 (no 662)[17]
considère, un peu rapidement, sans véritable réflexion de fond sur les
questions que nous venons de poser (il n'est même pas fait allusion aux
arguments développés par le rapport de la commission Guinchard…), que la réforme de la carte judiciaire a été l'occasion
manquée de mettre en place le TPI ; est-ce la bonne approche ? Citer
le rapport Casorla de 1997 sans se
poser la question de sa faisabilité relève plus de l'incantation en faveur du
TPI qu'une connaissance véritable des intérêts en jeu, des résistances
politiques locales et de l'intérêt des justiciables ; c'est un travail
bâclé, sur lequel il vaut mieux ne pas s'attarder. Une nouvelle mission
d'information de la commission des lois du Sénat sur l'organisation de la
justice en première instance préconisa à nouveau le TPI en octobre 2013, mais
avec tant de précautions et de différé dans le temps (« perspective séduisante »), qu'on peut se demander si
les auteurs du rapport y ont vraiment cru : les tribunaux fusionnés
devenant tous des chambres détachées ; on pense au Guépard du marquis de Lampedusa, « tout change pour que rien ne change ». Dans le cadre du
grand chantier sur la Justice du xxie siècle qui fut
lancé par la garde des Sceaux en 2012, un groupe de travail sur les
juridictions, présidé par M. Didier Marshall a déposé son rapport le
16 décembre 2013, lequel rapport reprend l'idée du TPI, mais avec des
chambres détachées partout où il y avait des TI (ce qui constitue une véritable
dénaturation du concept de TPI et pose la question : pourquoi changer ?)
et une telle complexité de poupées russes s'emboîtant les unes dans les autres,
qu'on peut se demander quel esprit lucide a pu bâtir une telle architecture qui
suppose des magistrats coordonnateurs à tous les étages de la pyramide !
Après la grande messe réunissant 4 000 personnes en janvier 2014 à
l'UNESCO, pour débattre et tirer une synthèse des propositions des trois
groupes de travail (celui de M. Marshall,
celui de M. Pierre Delmas-Goyon
sur les juges et la procédure civile déposés en décembre 2013 et celui de
M. Antoine Garapon (IHEJ) sur
l'office du juge remis en juillet 2013), après la « consultation »
des juridictions dans une fausse démocratie participative au printemps 2014,
digne des assemblées générales dans les universités en mai 1968, la garde des
Sceaux annonça en septembre 2014 que … pas grand-chose serait fait, en tout cas
pas le TPI. Beaucoup de bruit pour rien et le sentiment qu'on a amusé ceux qui
avaient accepté de participer à ces groupes, peut-être dans l'espoir d'un grand
soir de la justice, sans doute pour progresser dans son organisation et ses
compétences. Tout le contraire de la méthode de la commission Guinchard qui, dans le silence des
médias et la sérénité de ses réunions sut rendre un rapport dont, à ce jour, 80 %
des propositions ont reçu une consécration législative ou réglementaire, y
compris par la loi du 18 novembre 2016, puisque nombre des propositions des
commissions Marshall et Delmas-Guyon ont été reprises des
travaux de la commission Guinchard ;
tout était dans les deux qualificatifs : l'ambition était « raisonnée » (= raisonnable) pour une justice « apaisée » (= pour qu'elle se
retrouve dans la plupart des 65 propositions et leurs lignes de force, alors
que le corps des magistrats avait été meurtri par la violence de la réforme de
la carte judiciaire et par certains propos tenus par le gardien républicain de
l'autorité qu'il est censé protéger[18]).
d) À
l'avenir, si la réflexion devait être reprise sur ce point, il faudra
s'en souvenir et s’orienter dans trois directions, vers lesquelles le décret n°
2016-514 du 26 avril et la loi n° 2016-1547 du 18 novembre semblent aller avec
prudence :
-
Fédérer les moyens de gestion en procédant, progressivement, à des greffes
communs à plusieurs juridictions, ce qui commence à se concrétiser avec le
service d’accueil unique du justiciable créé par la loi précitée du 18 novembre
2016 et qui préfigure, dans son ambition, la création de guichets universels de
greffe préconisée par la commission Guinchard
(proposition n° 24), puisque sa compétence s’étend au-delà de celle de la
juridiction où il est implanté (art. L. 123-3, COJ). Ce sera l’occasion d’intégrer
le développement considérable des moyens modernes de transmission et de
communication numériques, que la même loi entend favoriser dans les relations
des professions juridiques et judiciaires avec leur clientèle (art. 3-I).
-
Favoriser la concertation entre magistrats du même ressort, quelle que soit
leur juridiction de rattachement. Sur ce point, le décret n° 2010-1395 du 12
novembre a ouvert la voie avec l'instauration de
magistrats coordonnateurs de l'activité en droit de la famille et des personnes
au sein des TGI et des cours d'appel (propositions no 49, 50 et
52 de la commission Guinchard) ;
le
décret précité du 26 avril 2016 a suivi en instaurant des magistrats
coordonnateurs des tribunaux d’instance d’un même ressort et des activités juridictionnelles dans le ressort d’une même cour
d’appel.
-
Procéder par étape à la réunion de certains contentieux au sein d’une même
juridiction. Il faudrait, dans un premier temps, essayer de réunir certaines
des juridictions d'exception de première instance, mais pas toutes, car il est
irréaliste, voire ubuesque de croire qu'on pourra un jour faire fonctionner
ensemble juges d'instance, juges consulaires, juges prud'homaux, juges des baux
ruraux et juges des affaires de sécurité sociale et juges du contentieux de
l'incapacité, sauf à en faire des chambres spécialisées au sein des TGI, mais
alors il faudra en évaluer, préalablement, les coûts de ces mégastructures par
rapport aux gains espérés ; c'est méconnaître la France, ses blocages et
ses corporatismes, mais aussi sa culture judiciaire et sociale, que de croire
qu'on peut aisément faire table rase d'au moins deux siècles d'histoire de la
Justice ; en dehors des grandes périodes révolutionnaires (1749, 1848) ou
des grands bouleversements et soubresauts qui agitent parfois notre pays (la
Libération en 1944-45 et l'arrivée au pouvoir du général de Gaulle en 1958), il
faut viser modeste et être pragmatique ; à l’inverse, les évènements de
mai 1968 n’ont eu aucune incidence sur l’organisation judiciaire. Le président
de la commission Guinchard l'avait
vite compris en écoutant les membres de sa commission et alors qu'il avait
suggéré d'appeler « tribunal des instances de proximité » la
juridiction née de la fusion des TI et des juridictions de proximité, dans l'idée d'en faire un réceptacle
d'accueil d'autres juridictions, au fur et à mesure de l'évolution des
esprits, même cette suggestion de simple appellation ne fut pas retenue par la
commission ; le symbole de la disparition de l'expression « tribunal
d'instance » l'emporta sur la logique du président. Cette méthode de
procéder par petites touches semble avoir inspiré le législateur qui, par la
loi n° 2016-1547 du 18 novembre, réunit les tribunaux des affaires sociales,
les tribunaux de l’incapacité et les commissions départementales d’aide sociale
dans des chambres sociales spécialisées des TGI, conservant l’échevinage et le
caractère oral de la procédure, sans toucher aux autres juridictions
d’exception et certainement pas au tribunal d’instance. Mais la voie est
ouverte au rattachement, un jour lointain, des conseils de prud’hommes qui pourraient
former un pôle social au sein des TGI ; encore faudra-t-il que deux
obstacles soient franchis : la « digestion » de la réforme de la
justice prud’homale et de sa procédure en 2015-2016 et fixer une implantation
de ces juridictions devenues chambres des TGI au-delà du siège central de ce
dernier, ce qui, en soi, constituera tout un programme de marchandages avec les
organisations syndicales et les politiques locaux. On peut aussi voir dans le
rattachement des tribunaux de police aux TGI et non plus aux TI, ce que
préconisaient les commissions Guinchard et
Marshall, un pas vers cette
fédération de moyens. On est sur la bonne voie.
III – LES BLOCS DE COMPÉTENCE
La politique des blocs de compétence de la
Commission Guinchard
et des lois ultérieures. La
commission Guinchard tout en rejetant
la solution du tribunal unique de première instance, avait souhaité concentrer
le TGI sur trois grands blocs de compétences : le bloc familial, avec la
compétence renforcée du JAF ; le bloc pénal (qui aurait réuni
correctionnel et police) ; le bloc des affaires civiles complexes ou
portant sur des enjeux importants, notamment la matière immobilière, la matière
fiscale, para-fiscale et douanière, les baux commerciaux et professionnels. En
outre, la commission avait suggéré d’étendre, pour ce bloc civil, la procédure
d’injonction de payer devant le TGI[19]. Les lois
et décrets qui se sont succédé entre 2009 et 2011 (le rapport ayant été déposé en juin 2008),
essentiellement, loi du 12 mai 2009, décret du 29 décembre 2009, loi
du 22 décembre 2010, loi du 17 mai 2011, ord. du 16 nov. 2011,
loi du 13 déc. 2011 ,ont mis progressivement en œuvre cette philosophie
générale et, fin 2011, 75% des propositions civiles avaient été traduites en
droit positif, donnant ainsi raison aux membres de la commission qui s’étaient
entendus pour « apaiser » et réformer « raisonnablement »
une justice tourmentée et souvent en colère au moment de son installation (en
décembre 2007), suite à la réforme de la carte judiciaire ; l’apaisement
souhaité est revenu[20].
Par petites touches, c’est un nouveau paysage de répartition des compétences
qui s’est dessiné entre 2008 et 2011 et, qui, pour l’instant, perdure. Bien
mieux, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre ne remet pas en cause cette
philosophie des « petits pas » et des pôles de compétence, puisqu’elle
crée un pôle social au sein des TGI, regroupant le contentieux général, le
contentieux technique de la sécurité sociale et une partie de celui de l’aide
sociale. Avec cette dernière loi et quelques autres textes entre
2012 et 2017, ce sont 80% des propositions de la commission Guinchard qui ont trouvé une
consécration législative ou règlementaire.
IV -LE GUG ET LE SAUJ
Du
guichet unique au service d’accueil unique du
justiciable. « Obtenir justice » est la
revendication spontanée de quiconque s'estime lésé dans ce qu'il considère être
ses droits. Pour réussir dans son ambition légitime, encore faut-il que, sur le
fond du droit, celui-ci lui donne
raison, et que, procéduralement, il
mette en œuvre de manière adéquate les mécanismes juridictionnels. Or,
l'enseignement – même élémentaire – des institutions de la justice est
quasiment absent de l'enseignement secondaire[21] :
pas plus que le futur citoyen n'est instruit – sauf rarissimes exceptions – des
rouages fondamentaux des institutions politiques de son pays, le futur
justiciable ne possède en général, à la sortie des lycées et collèges, la
moindre notion du système des juridictions et de la manière de s'adresser à
elles. Aussi faut-il se féliciter du développement, depuis les années 1970,
d'initiatives publiques ou privées qui se proposent d'accueillir les
justiciables – souvent les plus démunis – de les orienter, et de leur donner
parfois des conseils élémentaires, au besoin de les dissuader d'engager des
actions vouées à l'échec[22].
La diffusion de la jurisprudence pose aussi problème[23].
L'idée d'un
« guichet unique » d'accès
à la Justice a été lancée par un groupe de travail réuni à l'initiative du
Garde des Sceaux, en novembre 1996 (rapports remis en février et
mars 1997). Elle est reprise, dix ans plus tard, dans le programme annoncé,
en juin 2007, de réforme de la carte judiciaire : les lieux de
justice consacrés à l'accès au droit comprendraient un guichet unique de
greffe, de la conciliation/médiation et des consultations juridiques ;
devant le succès des expériences tentées ici ou là, en juin 2008, la
commission dite Guinchard sur la
réorganisation des contentieux, estime nécessaire de généraliser cette
institution et demande avec insistance qu'un guichet universel de greffe (le
GUG) soit rapidement mis en place pour pallier les effets négatifs de la
réforme de la carte judiciaire quant à l'accès à la justice (proposition no 24)[24].
Proposition reprise par la commission Marshall
sur les juridictions du xxie siècle
(no 2-1). En attendant, un site internet dédié à l'information
du justiciable a été créé (publication de fiches imprimables sur la
compétence des juridictions, leurs coordonnées, la nécessité ou non de recourir
à un avocat) et, au final, la loi n° 2016-1547 du 18 novembre crée (art. 2) un
« service d’accueil unique du justiciable » dont la compétence
s’étend au-delà de la juridiction où il est implanté ; son rôle est
d’informer les personnes sur les procédures les concernant et de recevoir de
leur part les actes afférents à ces procédures (COJ, art. L. 123-3)[25] ;
cela imposera de nouvelles contraintes pour les agents des greffes qui seront
amenés à connaître de procédures se déroulant devant d'autres
juridictions ; ils devront accéder aux applications informatiques
utilisées par les juridictions pénales et civiles, à savoir Cassiopée, en usage
en matière pénale (visé à l'art. 48-1, CPP) et
Portalis en voie de déploiement pour le contentieux civil, sous réserve d'avoir
été habilités à cette fin dans des conditions fixées par décret en Conseil
d'État. L'accès, qui est subordonné à une habilitation spéciale, est donc
limité aux seuls besoins de fonctionnement du service, soit l'information du
justiciable et la transmission d'un acte reçu par le SAUJ vers la juridiction
compétente. Le SAUJ pourra aussi recevoir les demandes d'aide juridictionnelle
qui devaient, jusqu'à présent, être adressées aux bureaux d'aide
juridictionnelle installés aux sièges des TGI. Le justiciable pourra déposer ou
adresser sa demande auprès d'un agent du greffe dans des conditions fixées par
décret en Conseil d'État (L. n° 2016-1547, art. 2, III, in L. n° 91-647 du 10 juillet, art. 13, al. 7).
On peut
ajouter que la loi no 2014-896 du 15 août 2014 a créé dans
chaque tribunal de grande instance un bureau d'aide aux victimes pour mieux
informer ces justiciables particuliers (C. pr. pén., art. 706-15-4).
Le décret no 2014-1582 du 23 décembre 2014, dans ses
articles 15 et 16, fixe la composition de ces bureaux (fonctionnaires et
représentants d'associations d'aide aux victimes avec lesquelles les chefs de
la cour d'appel ont passé une convention (C. pr. pén., art. D
47-6-15).
[1] J. Commailles, Territoires de justice. Une sociologie
politique de la carte judiciaire, PUF, coll. « Droit et
Justice », 2000. V. aussi, D. Peyrat, « La politique
judiciaire de la ville », Gaz. Pal.
28 mars 2000.
[2] J. Pommarède, Territoires et lieux de justice, Doc. Fr., 2011, collec. Histoire
de la Justice. A. Cabanis, « Histoire de la carte judiciaire », cycle Justice et territoires, JCP 2016,
447.
[3] Sur la justice de proximité en
matière administrative et civile et la carte judiciaire, v. les art. de
B. Pacteau, J. Beauchard et J. Comaille, Justices 1995. 2.
[4] Par ex. entre les 10 TGI les plus
accablés de travail (hors Paris, Bobigny, Créteil, Versailles et Nanterre) et
les 10 moins chargés, l’écart est de 1 à 3. Pour les TI l’écart est
pire : 37 ont moins de 250 affaires par an sans aucune adéquation en
nombre de magistrats et de greffiers avec ceux qui en traitent
1 000 !
[5] V. sur cette question, la loi
du 5 mars 2007 réformant la protection de l’enfance, qui instaure un
principe de subsidiarité de l’intervention judiciaire au profit de l’action
sociale des conseils généraux (commentaire : A. Gouttenoire, D. 2007. 1090).
[6] V. sur cette proposition,
S. Guinchard, in Le temps en
procédure, les solutions d’organisation procédurale, colloque TGI Nanterre
et Ass. fr. philo. dr., 5 déc. 1995, Dalloz, coll. « Thèmes et
commentaires », 1996.
[7] A. Coignac, « La nouvelle
carte judiciaire se dessine, les difficultés surgissent », JCP 2010. Doctr. 344.
M. Touzeil-Divina, « La redistribution des cartes...
judiciaires », AJDA 2010. 398.
[9] Aperçu : L. Raschel, JCP
2013, 256
[10] Tout était dans les deux
qualificatifs de l’intitulé : apaiser une justice troublée par une
réforme « à la hache » de la carte judiciaire et des propos souvent
déplacés tenus sur les juges par le gardien républicain de l’autorité
judiciaire ; ne proposer que les réformes dont il était raisonnable
de penser que le législateur les reprendrait rapidement à son compte. La
méthode fut efficace puisqu’au 1er janvier 2015, 80% des 65
propositons de la commission sont devenus le droit positif, y compris avec
celles reprises par la loi n° 2016-1547 du 18 novembre. À comparer avec celles
qui ont rendu leur rapport en décembre 2013 : pour la plupart de leurs
propositions concrétisées dans la loi, ce sont celles issues de la commission
.. Guinchard : juristes
assistants (= équipe autour du juge, service d’accueil unique du justiciable (=
guichet universel de greffe), fusion des TASS et autres juridictions « sociales »
au sein des TGI (= pôle social des TGI), diverses mesures de renforcement des
MARD, médiation familiale.
[11] On le trouve en objectif de
l’Annexe à la loi du 9 sept. 2002.
[12] CE avis non rendu public. Tout
autre critère de répartition reviendrait à créer un ordre de juridiction à
chaque fois qu’une « chambre détachée » se verrait attribuer un
contentieux propre ; la juridiction n’est unique que si l’antenne a tout
ou partie du contentieux du siège.
[13] V. l’argumentaire complet in L’ambition raisonnée d’une justice apaisée,
Doc. fr., 2008.
[14] Sur tous ces aspects, N. Fricero,
« La fusion des juridictions civiles du premier degré en question »,
colloque Toulouse, 22-23 nov. 2010, La
spécialisation des juges, PU Toulouse 1/LGDJ éd., 2012, collec. IFR.
[15] Particulièrement probant est
l’exemple de l’université de Nîmes : son antenne fut transformée en
université de plein exercie par un ministre délégué à l’enseignement supérieur
(qui se disait libéral..) alors que, dans le même temps, partout ailleurs en
France, il portait la « bonne » parole pour inciter les universités
existantes, même les plus importantes en nombre d’étudiants et de personnels
enseignants, à se regrouper. On imagine sans peine ce qu’il en serait des
« antennes » judiciaires si le TPI devait être mis sur pied :
qui l’emporterait ? la démagogie ou l’autorité régalienne ?
[16] L’ambition raisonnée d’une justice apaisée, Doc. fr. 2008,
proposition no 1.
[17] Rapport N. Borvo Cohen-Seat et Y.
Détraigne.
[18] La fameuse comparaison avec des
« petits pois » se ressemblant tous a, pour le moins été … mal
digérée.
[19] L’ambition raisonnée d’une justice apaisée, Doc.
fr., 2008, proposition no 2.
[20] L’esprit des
travaux de la commission est entièrement contenu dans les deux qualificatifs du
titre de son rapport : une ambition « raisonnée » et une justice
« apaisée ».
[21] Il existe un protocole
Éducation-justice pour informer les élèves du fonctionnement de la Justice et
l’éducation à la citoyenneté dans le cadre du collège qui peut intégrer cette
dimension.
[22] Mise en place dans les
juridictions de bureaux d’accueil ; organisation par les barreaux
d’avocats de permanences d’orientation, création de « boutiques de
droit » par diverses associations. Le ministère de la Justice co-publie,
avec les éditions Gallimard, des « Guides pratiques » : Guide des droits des victimes ; Guide pratique de la justice ; Petit dictionnaire de la justice ;
en outre, le service de la communication du ministère (13 place Vendôme,
75042 Paris Cedex 01), diffuse toute une série de fiches pratiques et de
brochures consacrées à des questions juridiques courantes.
[23] E. Lesueur de Givry, « La
diffusion de la jurisprudence, mission de service public », in
Rapport de la Cour de cassation pour 2003, Doc. fr., 2004, p. 269.
[24] L’ambition raisonnée d’une justice apaisée, Doc. fr. 2008, p. 249
s. Proposition 24 : création d’un
guichet universel de greffe, pour permettre aux justiciables et aux
auxiliaires de justice d’introduire une instance judiciaire ou d’obtenir des
informations concernant une procédure depuis n’importe quel site judiciaire du
ressort de la cour d’appel. Cela suppose une certaine mutualisation des greffes
d’un ressort, tout en préservant l’autonomie de chacun et sans créer un service
de centralisation et de répartition des compétences. Chaque guichet assurerait
les missions déjà assurées aux guichets uniques de greffe :
– information
de qualité : renseignements pratiques et information de la personne qui
vient au guichet, sur ses droits ;
– orientation
du justiciable, en liaison avec les juridictions et aussi avec les
conciliateurs de justice et les services de médiation ; des permanences
seraient assurées dans ces guichets par ces conciliateurs et médiateurs ;
– orientation
vers d’autres lieux si nécessaire (consultations juridiques données par les
avocats, points d’accès au droit, associations tournées vers les personnes en
grandes difficultés, etc.).
Chaque guichet
universel pourrait également :
– recevoir les
demandes faites aux juridictions : les guichets universels constituent,
pour les justiciables, un point d’entrée de proximité dans le système
judiciaire : saisine de l’une quelconque des juridictions du ressort (cour
d’appel au moins dans un premier temps) lorsque la procédure est sans
représentation obligatoire ; enregistrement de cette demande, directement
dans la « chaîne métier » de la juridiction compétente (cela suppose
une harmonie avec les autres dispositifs de saisine des juridictions par voie électronique) ;
– délivrer une
information précise sur le déroulement d’une procédure concernant le
justiciable ;
– recevoir et
enregistrer un appel, même lorsque le guichet n’est pas situé dans les mêmes
locaux que la cour d’appel.
[25] Une expérience
avait été tentée en 2015, pour les tribunaux d’instance et les conseils de
prud’hommes dans le ressort des TGI
de Bobigny, Brest, Dunkerque, Privas, Saint-Denis-de-La-Réunion.
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