mardi 30 mai 2017

BELLES PAGES 31: LES GARANTIES D'UN PROCÈS ÉQUITABLE

SOMMAIRE
I – LE MODÈLE UNIVERSEL DE PROCÈS ÉQUITABLE 2001-2017
II – LE PROCÈS ÉQUITABLE, DROIT FONDAMENTAL ? 1998
III – LE PROCÈS ÉQUITABLE, GARANTIE FORMELLE OU ENJEU SUBSTANTIEL ? 1997-1999
I – LE MODÈLE UNIVERSEL DE PROCÈS ÉQUITABLE
2001-2017
          Au-delà des projets à vocation mondiale ou régionale, mais encore à l’état d’ébauche (le projet européen des règles de procédure civile) ou sans juridiction unificatrice (le code-modèle latino-américain), ce qui retient finalement l’attention, c’est ce que nous appelons le modèle universel de procès équitable tel qu’il résulte du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 (avec la jurisprudence du Comité des droits de l’homme de l’ONU), de la Convention EDH de 1950 (avec la jurisprudence de la Cour EDH) et du droit de l’UE (avec la jurisprudence de la CJCE devenue CJUE et la Charte des droits fondamentaux de l’UE). C’est en effet, le modèle le plus élaboré (grâce aux juridictions internationales unificatrices), celui qui couvre le plus d’espace géographique et qui façonne un type de procès aisément applicable dans tous les pays, car il correspond aux valeurs universelles qui garantissent une bonne justice. C’est sans doute la raison pour laquelle ce modèle s’exporte (ou à vocation à s’exporter) à la fois vers des juridictions mondiales (par exemple, vers les tribunaux pénaux internationaux pour l’ex-Yougoslavie ou pour le Rwanda ou la Cour pénale internationale ; ou encore l’organe de règlement des différends de l’Organisation mondiale du commerce), régionales ou nationales et vers d’autres horizons, ceux des procès dans les modes alternatifs de règlement des différends et l’arbitrage. Il conviendra d’ailleurs de confronter la réalité du modèle avec sa réception par ces juridictions internationales, régionales et nationales[1]
Justification de l’universalité du modèle
Le droit à un procès équitable, le « due process of law » ou encore le « right to a fair trial », constituent le critère principal d’un État de droit. Contenu essentiellement dans l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques, l’article 6 de la Convention EDH et l’article 47 de la Charte des droits fondamentaux de l’UE, construit et même façonné par la jurisprudence des trois organes de contrôle de ces instruments internationaux, le procès équitable est, à ce titre, un vrai modèle universel (art. 14 du Pacte) ou à vocation universelle (art. 6 de la Convention EDH et droit des droits de l’homme de l’UE), même lorsqu’il est élaboré par la Cour EDH ou la Cour de justice de l’UE, juridictions internationales à vocation régionale.
a) D’une part, il ne faut pas oublier, en effet :
– l’origine commune de tous ces textes, à savoir la Déclaration universelle des droits de l’homme de 1948 (art. 10 et 11), sans même parler de la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen de 1789, dont les articles 7, 8 et 9 contiennent des éléments du droit à un procès équitable en matière pénale et des textes anglais (la Grande Charte de 1215) et américain (le Bills of rights de 1791) ;
– leur inspiration universaliste que l’on retrouve dans d’autres textes : la Déclaration américaine des droits de l’homme (art. XXVI), la Convention américaine des droits de l’homme (art. 8 et 10), la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples (art. 7 et 26) ;
– et l’impact considérable que la construction de la notion de procès équitable peut avoir dans les États soumis à l’emprise du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ou de la Convention EDH.

b) D’autre part, le Pacte international relatif aux droits civils et politiques (art. 14) et, surtout, la Convention EDH, avec son article 6, § 1 sur le procès équitable, ont beaucoup contribué, sinon au rapprochement des procédures, tout au moins, au-delà de leur diversité maintenue, à la construction d’un fonds commun procédural qui s’impose à tous les États soumis à l’emprise de ces instruments internationaux. Véritable socle de standards d’une bonne justice ces droits fondamentaux du procès contribuent déjà à la modélisation des procès, quel que soit d’ailleurs le type de contentieux, quel que soit le pays. En effet, la notion de matière civile, pas plus que celle de matière pénale ne recoupe le procès civil ou le procès pénal ; une matière civile peut faire l’objet d’un procès devant une juridiction civile, mais aussi devant une juridiction administrative ou disciplinaire ; même remarque pour la matière pénale, qui n’appartient pas qu’aux juridictions répressives stricto sensu, qui déborde sur le contentieux répressif administratif, économique par exemple. Le modèle européen issu de la jurisprudence de la Cour de Strasbourg en est d’autant plus transversal, par rapport à nos schémas traditionnels. Il est d’autant plus utile que certains contentieux nouveaux, ceux nés de la régulation économique par des autorités de marché, n’ont pas toujours disposé, tout au moins à l’origine, de règles de procédure suffisamment précises pour que soient respectés les principes fondateurs d’une procédure démocratique et respectueuse des droits de la défense.

Défense de l’universalité et de l’utilité du modèle

Il a été affirmé, au cours d’un colloque au Sénat, le 3 mai 1999, sur le XXVe anniversaire de la ratification par la France, de la Convention européenne des droits de l’homme, qu’il était « faux, inutile et dangereux » de parler de « modèle universel » à propos du procès équitable [2] ; l’affirmation nous paraît un peu trop rapidement et péremptoirement avancée, car elle est inexacte aux trois points de vue évoqués :
– le modèle existe, il suffit de consulter les arrêts de la Cour et les applications nationales (il n’est donc pas faux) ;
– la France étant régulièrement condamnée (et d’autres pays), le modèle n’est donc pas inutile, au moins pour les justiciables ;
– enfin, il permet d’assurer le respect de garanties d’une bonne justice et d’accroître, à ce titre, la protection des droits fondamentaux : comment pourrait-il, dès lors, être dangereux ? Comme l’a écrit Bruno Oppetit, « le droit à un procès équitable apparaît comme la pièce maîtresse de l’instrument constitutionnel d’un ordre public européen » [3] qu’est devenue la Convention EDH ; il traduit « l’ascension d’un pouvoir judiciaire qui entend s’affirmer face aux pouvoirs législatif et exécutif des États nationaux » [4].
Cette critique a heureusement été démentie, à quelques années de distance par le nouveau président du Conseil d’État qui a eu l’occasion de dire combien le droit du procès est une composante essentielle des droits fondamentaux, « qu’il n’est pas seulement utile », que la jurisprudence de la Cour EDH « a enclenché un cycle vertueux de réformes législatives et réglementaires dans la plupart des pays membres du Conseil de l’Europe » [5].
Une autre critique se fait jour contre « les thuriféraires du concept » de procès équitable [6], contre les représentations proposées du juge et du procès, à partir de ce concept et de lui seul :
« tout un courant théorique, aujourd’hui, probablement ébloui par les bienfaits tels ou supposés du recours au concept de procès équitable est prêt à se rallier, s’il ne l’a pas déjà fait, à ce qu’il appelle une éthique procédurale, qui me paraît confondre dangereusement justice et procédure judiciaire ».
Ce courant, qui trouverait sa source dans la Théorie de la Justice de John Rawls [7], voudrait substituer une solution procédurale à une solution fondationnelle de la question du juste ; le juste serait à construire à partir des moyens purement procéduraux au lieu d’être découvert parce qu’il a été donné. C’est de la procédure équitable que la Justice dériverait son contenu ; la rationalité procédurale serait alors la légitimité propre du droit [8]. C’est ce courant et cette conception du juste et de la justice que Gérard Timsit critique :
« s’il est admis – et, évidemment, je l’admets aussi – que le concept de procès équitable est l’un des concepts les plus importants et les plus protecteurs que le droit ait inventés pour la sauvegarde des droits, on peut pourtant se demander si l’utilisation du concept ne donne pas lieu… à un certain activisme judiciaire qui conférerait aux juges plus que la place qui doit être la leur dans une démocratie ».
Et l’auteur de conclure que parler, comme nous l’avons fait, de « démocratie procédurale » [9] est une illusion, une inversion de l’ordre des facteurs, car « les procédures ne valent que ce que valent les démocraties qui en font usage ». Certes, mais qui défend la démocratie contre l’emprise des pouvoirs exécutif et législatif, si ce n’est ce tiers indépendant et impartial qu’est le juge ? Où est l’effectivité des droits de chacun s’il n’est pas assuré de la possibilité, toujours offerte à lui, de recourir à ce tiers ? Au nom de quoi et de quel principe supérieur, peut-on affirmer que les juges ne doivent pas se voir conférer plus que la place qui doit être la leur ? Peur ancestrale du juge dans cette dénonciation de « l’activisme judiciaire » ou mise en garde contre les excès de certains juges ? C’est effectivement toute une conception de la vie en société qui est ici en cause et du rôle que l’on veut bien reconnaître au juge, sans peur et sans excès.
La notion de procès équitable
          L’attraction de la procédure par les droits fondamentaux a été grandement facilitée par l’existence, dans l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques et dans l’article 6 de la Convention EDH, d’une garantie que l’on résume par l’expression de procès équitable, mais qui rassemble toutes les composantes d’une bonne justice[10]. Une jurisprudence audacieuse de la Cour EDH a complètement transformé le sens de certains mots qui pouvaient paraître bien anodins ou ne traduire qu’un vœu pieu (par exemple, la notion de délai raisonnable) et a extrait de ce texte, de ce concept, des exigences non formellement exprimées (par ex. l’égalité des armes). La Cour de justice des communautés européennes et aujourd’hui la Cour de justice de l’UE, en s’appropriant le procès équitable au titre des principes généraux du droit de l’UE, dispose du même outil, dans son champ de compétence. Aucune étude sérieuse de procédure ne peut négliger aujourd’hui cette dimension des droits fondamentaux dans les procédures suivies en France (en fait, essentiellement, une dimension européenne et constitutionnelle), aucun manuel de procédure, qu’elle soit civile ou administrative, mais encore plus pénale, ne devrait l’ignorer, au-delà du coup de chapeau qui lui est parfois donné dans l’exposé des sources de la matière pour ne plus, ensuite, y revenir ; la garantie d’un procès équitable, non seulement est indispensable dans le contexte français du procès, mais elle envahit tous les contentieux grâce à une politique audacieuse et originale de la Cour européenne des droits de l’homme.
a) Dans l’expression « procès équitable », avant équitable il y a procès ; pourtant on chercherait vainement l’expression dans les anciens codes de procédure, qu’ils soient de procédure civile ou d’instruction criminelle, sans parler des textes qui régissaient le contentieux administratif. Le mot qui était davantage utilisé sous l’empire des grandes ordonnances royales, civile et criminelle, de 1667 et 1670, était celui d’équité, celle de nos Parlements bien sûr, dont Dieu devait nous garder, (…) à côté de leur arbitraire. Le concept n’était pas formalisé et avait mauvaise réputation, ce qui explique sans doute que nous l’ayons enfoui au plus profond de nos institutions judiciaires ; on parlait plutôt d’une « équité arbitraire » [11], que d’un procès équitable ! Curieux glissement du vocabulaire juridique qui doit nous inciter à la prudence dans l’utilisation de cette expression et à rechercher le sens exact de l’équité pour mieux approcher l’équitable.

b) Les dictionnaires généraux, qu’ils soient anglais ou français, nous livrent deux sens de l’équité et conduisent progressivement au procès équitable :

1) Dans le dictionnaire historique de la langue française [12], l’équité est d’abord définie comme un emprunt savant (1262) au latin aequitas : égalité, équilibre moral, esprit de justice, dérivé de aequus, égal, d’où impartial. On retrouve cette notion d’égalité dans le dictionnaire anglais Collins (English language dictionnary) : la qualité d’être loyal et raisonnable d’une manière qui donne à chacun un traitement égal.

2) Ces deux mêmes dictionnaires voient aussi dans l’équité, pour l’un « la juste appréciation de ce qui est dû à chacun, selon un principe de justice naturelle, parfois divine », pour l’autre, le principe qui fera d’un jugement un jugement loyal dans un cas où les lois existantes n’apportent pas de réponse satisfaisante à un problème (« the principe used in law which allows a fair judgement to be made in a case where the existing laws do not provide areasonnable answer to the problem »). C’est ici l’équité dont Philippe Jestaz nous dit [13], qu’elle serait tantôt désobéissance à la loi lorsque le juge écarte la règle de droit pour rendre un jugement « en équité », c’est-à-dire supposé plus juste que ne l’aurait permis l’application du droit strict, tantôt adaptation de la règle de droit à un cas particulier, tantôt expression d’une idée de justice comme fondement du droit[14].

3) Le Vocabulaire Henri Capitant [15], ne parle pas de l’équilibre, mais dégage cinq sens dont les quatre derniers peuvent être regroupés sous l’idée commune d’atténuation de la règle de droit par des considérations particulières, de dépassement du droit pour tendre à la justice, justice supérieure au droit positif ; l’autre sens serait l’égalité.

c) Dès lors, si l’on revient au procès équitable pour en faire une exigence, à quoi reconnaît-on qu’un procès donné l’a été ? Quel sens faut-il retenir de l’équité ?

1) S’il s’agit d’être juste dans le jugement rendu, chacun sait bien que l’application de la règle de droit s’accommode mal avec une équité qui serait conçue comme la recherche systématique de l’humain dans les conséquences que provoque toute décision de justice ; c’est cette recherche qui conduisit le Président Magnaud à n’être le « bon juge » de Château-Thierry que pour les justiciables, pas pour les juristes [16]. L’équité, au sens de la « sensibilité généreuse et hardie », que dénonçait Gény chez ce juge n’a pas sa place dans la notion de procès équitable, car les bons sentiments en matière de justice, la sensiblerie, mènent au déséquilibre et à l’inégalité entre les justiciables. C’est le sens d’une jurisprudence constante : le juge ne peut se contenter de se référer à son « arbitraire », même en invoquant son souci d’apaisement et son impuissance à démêler l’affaire, pour condamner le débiteur à ne régler que la moitié de la somme déclarée [17].

2) C’est donc davantage la racine æquus, l’idée d’équilibre qu’il faut retenir pour comprendre ce que peut représenter aujourd’hui un procès équitable ; l’idée d’assurer à tout justiciable un tel procès, se rattache à la notion très générale et générique de garanties fondamentales d’une bonne justice, dont on trouve des illustrations dans le caractère public des audiences, dans l’exigence d’un tribunal indépendant et impartial, ou d’un délai raisonnable, etc. Ce sont ces garanties qui assurent à chacun, dans un État de droit, le droit à un procès équilibré, loyal, tant il est vrai que l’on oublie trop facilement que, dans la version anglaise de l’article 6 de la Convention EDH, l’équivalent du mot français « équitablement », ce n’est pas « equity », mais « fair », ce qui, au moins pour un esprit continental, fait penser au légendaire fair play britannique ; en outre dans le 14e amendement à la Constitution américaine figure l’exigence d’un procès loyal. Et l’equity, dans la langue anglaise, c’est d’abord la qualité d’être loyal (fair) et raisonnable dans une voie qui donne un traitement égal à chacun [18]. C’est sans doute pour cette raison que l’article 14, § 1 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques met en exergue, dans sa première phrase, la notion d’égalité de tous devant les tribunaux et les cours de justice.
Il faut donc ici dissiper toute ambiguïté, l’équité dont il est question n’est pas celle qui s’oppose au droit ; ce n’est pas le dépassement du droit au nom de principes supérieurs. Le mot « équité » vient du latin « æquus », qui signifie équilibre ; les deux termes sont équipollents [19].

d) On en a une confirmation dans les décisions du Conseil constitutionnel qui ont progressivement fait émerger la notion de droit à un procès équitable[20]. Ainsi, dans sa décision du 28 juillet 1989, il consacre implicitement cette notion en affirmant que le principe du respect des droits de la défense « implique, notamment en matière pénale, l’existence d’une procédure juste et équitable garantissant l’équilibre des droits des parties » (consid. 44) [21]. Même formule dans la décision sur l’injonction pénale du 2 février 1995 (consid. 5) [22], ou formule équivalente (« garanties égales ») en septembre 1986 [23]. Puis l’expression « principe du procès équitable » apparaît dans la décision no 2004-510 DC, 20 janvier 2005. Le 9 août 2007 (déc. no 2007-554 DC) apparaît l’expression d’une « exigence constitutionnelle relative à l’existence d’un procès équitable ». Enfin, c’est l’affirmation claire que « le droit à un procès équitable découle de l’article 16 DDHC » (déc. no 2007-561, 17 janv. 2008 [24]).

Pour conclure,
on dira que le procès équitable, c’est le procès équilibré entre toutes les parties. Cela ne signifie pas pour autant que l’idéal de justice soit absent, bien au contraire, car l’équité au sens d’un équilibre à réaliser, c’est aussi un idéal de justice ; c’est, selon l’heureuse expression d’Henri Capitant, en 1928, « l’une des plus radieuses formules de justice dont on ait depuis la Grèce et Rome, illuminé l’espoir des sociétés modernes » [25]. Le procès équitable repose sur des garanties qui tendent à faire régner cet idéal de justice[26]. Comme le notait Bruno Oppetit « la vérification de cette équité, qui fait peser des contraintes grandissantes sur les États nationaux, procède donc d’un concept général et prédéterminé qui illustre lui aussi parfaitement le phénomène de juridicisation de l’équité, notion morale érigée en notion juridique » [27]. Si l’équité dans le procès c’est l’équilibre, tendre à assurer le respect de celui-ci, c’est aussi veiller à promouvoir l’idéal de justice : « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent » [28]. L’équilibre, qui apparaît en filigrane dans certaines décisions du Comité des droits de l’homme de l’ONU [29] et dans presque toutes les décisions de la Cour EDH sur le fondement de l’article 6, rejoint l’image traditionnelle de la justice, image symbolique d’une balance aux deux plateaux équilibrés.

Le respect de l’équité même en matière de terrorisme

Une tentative d’attentat dans le métro de Londres a donné l’occasion à la Cour EDH de proclamer solennellement « qu’il est hors de question que les droits à l’équité du procès soient atténués pour la seule raison que les personnes concernées sont soupçonnées d’être mêlées à des actes de terrorisme » (§ 252). Mais après cette proclamation, la Cour rappelle qu’il « ne faut pas appliquer l’article 6 d’une manière qui causerait aux autorités de police des difficultés excessives pour combattre par des mesures effectives le terrorisme et d’autres crimes graves » (§ 252) et que le respect de l’exigence d’équité est global, sur l’ensemble du procès. En l’espèce, la Cour considère que si les auteurs de cet attentat avaient été entendus sans la présence d’un avocat dès l’enquête de police, des raisons impérieuses avaient motivé le différé de cette assistance et que l’ensemble de la procédure avait été équitable à leur égard. En revanche, un témoin avait été entendu sans cette assistance, si bien qu’il fit des déclarations auto-incriminatoires et que son interrogatoire se poursuivit sans avocat ; la Cour commence par relativiser le droit de ne pas témoigner contre soi-même : celui-ci constituant une protection non pas contre la tenue de propos incriminants en tant que telle, mais contre l’obtention de preuves par la coercition ou l’oppression (§ 267) ; mais elle acte une violation du droit à procès équitable dans le fait que ce témoin n’avait pas été informé de ses droits en matière de défense (§ 272)[30].
Le triptyque
   Le droit à un procès équitable s’exprime aujourd’hui à travers des garanties qui forment un triptyque. La garantie d’un procès équitable ne concerne pas seulement tous les contentieux, dès lors que le litige entre dans le champ d’application de l’article 14 du pacte international ou de l’article 6, § 1 de la Convention EDH, au regard soit de la matière civile, soit de la matière pénale. Elle concerne aussi toutes les phases d’une procédure, de l’introduction de l’instance à l’exécution du jugement. L’équilibre du procès équitable on va le retrouver dans tous les apports du Pacte international et de la Convention européenne au droit du procès. Ces apports arrivent à former un triptyque dont les trois volets constituent la garantie des droits, que nous avons conceptualisée ainsi en partant de la jurisprudence de la Cour EDH[31] : garantie qui part du droit d’accès à un tribunal (en abrégé, le droit à un juge), pour conduire à l’exécution effective de la décision du juge, en passant par des garanties institutionnelles et procédurales (en abrégé, le droit à une bonne justice, à un bon juge). C’est le fameux triptyque que la Cour européenne a progressivement dégagé de l’article 6, § 1 et dont les deux arrêts phares à chaque bout du triptyque sont l’arrêt Golder c/ Royaume Uni et Hornsby c/ Grèce.

II – LE DROIT À UN PROCÈS ÉQUITABLE, DROIT FONDAMENTAL ?
juillet-août 1998
                La garantie d’un procès équitable est considérée comme un droit fondamental en raison de la protection dont elle bénéficie en droit international et européen, du triple point de vue de sa source normative, de l’organe juridictionnel qui la met en œuvre et de la nature du pouvoir contre lequel elle est amenée à jouer. Largement assurée par la Cour européenne des droits de l’homme, cette protection tend à englober tout le procès et un peu plus avec, en amont, le droit d’accès à un tribunal et, en aval, le droit à l’exécution effective des décisions de justice. Néanmoins, l’étude de la jurisprudence française atténue cette vision et tempère cet optimisme ; de fortes résistances se manifestent à reconnaître au droit à un procès équitable le caractère d’un droit fondamental sur tous les éléments retenus par les organes européens de contrôle, malgré, à l’inverse, quelques rares décisions en ce sens sur certains des aspects de cette garantie. C’est donc un bilan nuancé et contrasté que le processualiste qui chemine dans les droits fondamentaux du procès est conduit à établir pour juger du degré de reconnaissance du caractère fondamental ou non du droit à un procès équitable en droit français. D’où le point d’interrogation qui figure en tête de cette contribution.
            Le point d’interrogation qui clôt le titre de cette contribution ne doit pas induire en erreur le lecteur, ni sur l’état du droit positif, au moins européen, ni sur l’opinion du signataire de ces lignes : nous voulons affirmer d’emblée que nous souscrivons sans réserve à l’opinion doctrinale et à l’expression jurisprudentielle du droit positif processuel international et européen, que la garantie d’un procès équitable est un droit fondamental ; la question est simplement de savoir comment cette qualification est reçue en France par les tribunaux, comment ils ont pu en faire progresser l’idée, voire la créer d’une manière autonome ou, au contraire, la freiner, en n’en épousant pas toutes les applications voulues notamment par la Commission et la Cour européennes des droits de l’homme[32]. Y a-t-il une autonomie de ce droit fondamental en Droit français ? Mais reprenons d’abord, rapidement, pour bien fixer les termes et les limites du débat, ces deux expressions.
            Droit fondamental ? Quelle définition donner ? Quel concept retenir ? Pour s’en tenir à l’essentiel et pour ne pas entrer dans une controverse qui dépasserait le cadre de cette étude[33], nous ferons nôtre la conception organique donnée par l’un des plus éminents spécialistes de cette question[34], conception qui retient trois critères, tous tirés de la protection des droits fondamentaux :
- protection non seulement contre le pouvoir exécutif, mais aussi contre le pouvoir législatif, alors que les libertés publiques en droit français traditionnel ne sont protégées que contre le pouvoir exécutif ;
- protection non seulement en vertu de la loi, mais aussi et surtout en vertu de la Constitution et des textes internationaux ou supra-nationaux. On verra qu’à cet égard le rôle de la Convention européenne des droits de l’homme et de la jurisprudence de ses organes de contrôle est prépondérant. Le caractère fondamental du droit à un procès équitable est d’autant plus fort en droit processuel européen que, souvent, la Cour européenne ne se contente pas de censurer la non-conformité d’une procédure à la loi nationale ; elle juge le texte appliqué par les instances juridictionnelles nationales par rapport aux normes de la Convention ou issues de sa propre jurisprudence. Par exemple, dans l’affaire John Murray c/ Royaume Uni c’est le texte qui est en cause, puisque ce n’est pas la juridiction nationale qui a fixé le délai de quarante huit heures pendant lesquelles une personne suspectée de terrorisme n’a pas droit à un contact avec un avocat[35] ;
- protection non seulement par l’intervention des juges ordinaires, mais aussi par celle d’un juge constitutionnel et de juges internationaux.
            Procès équitable ? Sans reprendre ici toutes les interrogations que l’on peut se poser sur le sens à donner au mot équité[36], on remarquera que cette expression se retrouve dans plusieurs textes internationaux qui en assurent la garantie. C’est de ce concept que nous partirons tel qu’il a pu être interprété par la jurisprudence internationale. Ces instruments internationaux[37] contribuent à conférer à la garantie d’un procès équitable la qualité d’un droit fondamental ; sans viser l’exhaustivité, on peut citer :
- l’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, mais qui n’a que la valeur d’un idéal à défendre ;
- l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 et, surtout, son protocole facultatif puisqu’il a permis les requêtes individuelles ; mais la jurisprudence de son organe de contrôle, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies est peu étudiée par les juristes français, pour ne pas dire complètement ignorée d’eux, sans doute parce qu’environ les trois quarts des communications individuelles rendues jusqu’en juillet 1993 (sur 331) sur le fondement de l’article 14, concernaient la Jamaïque et l’Uruguay ; pourtant, une chronique est tenue à l’Annuaire français de droit international par l’un de nos collègues[38], et une décision récente concerne la France à propos de l’affaire Faurisson[39] ; en outre, le visa de cet instrument en matière de procès équitable, par les juridictions françaises est rare, pour ne pas dire inexistant[40] ;
- et, surtout, la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des droits fondamentaux, avec son fameux article 6 §1et la jurisprudence qu’il a suscitée de la part des organes de la Convention, elle-même confrontée aux jurisprudences nationales.
Avec l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, il faudra vraisemblablement tenir compte de la future jurisprudence de la Cour de Luxembourg en matière de droits fondamentaux et s’attendre à un contrôle, par cette Cour, de ce que Frédéric Sudre vient de qualifier de « Charte communautaire des droits fondamentaux »[41].
C’est donc l’article 6 §1 de la Convention européenne que nous retiendrons comme critère d’appréciation de l’effectivité du droit à un procès équitable en droit positif français, pour partir à la recherche d’une reconnaissance de cette garantie comme un droit fondamental par la jurisprudence française, à la fois en application de la norme européenne et, peut-être, en création autonome. Le fil conducteur sera celui que constituent aujourd’hui les trois volets du triptyque du droit à un procès équitable au sens large, tel qu’ils viennent d’apparaître clairement après vingt-deux ans de jurisprudence européenne, de l’arrêt Golder c/ Royaume-Uni du 21 février 1975 à l’arrêt Hornsby c/ Grèce du 19 mars 1997 : droit d’accès à un tribunal (en parallèle ici avec le droit à un recours effectif de l’article 13), droit à une bonne justice (dans la double application des exigences institutionnelles relatives au droit à un tribunal indépendant et impartial et des exigences procédurales d’un procès équitable, cette fois au sens strict, public et dans un délai raisonnable), droit à l’exécution effective du jugement.
Protégée par la Cour européenne, cette garantie d’un procès équitable est incontestablement, au regard des critères que nous avons donnés, un droit fondamental. Est-elle pour autant assurée en France par les juridictions nationales ? à lire certains arrêts on peut douter de la conformité de leurs solutions avec la jurisprudence européenne. De cette confrontation il ressort que l’audit du droit positif français, quant à la réalité pour les justiciables d’un droit fondamental à un procès équitable, conduit à un bilan pour le moins contrasté. Si l’on situe la jurisprudence française par rapport à ces exigences, on peut affirmer, sans exagération :
- que le domaine d’application de la garantie retenu par les juridictions nationales n’est pas encore complètement conforme à l’applicabilité de l’article 6 §1 telle qu’elle est déterminée par la Cour européenne (I) ;
- qu’en revanche, le droit fondamental à un tribunal est un droit pleinement consacré (II) ;
- mais que le droit fondamental à une bonne justice dans le déroulement de l’instance est encore largement malmené (III) ;
            - et que des discussions sont à prévoir quant aux suites à donner en droit français à l’arrêt Hornsby c/ Grèce, relatif à l’exécution effective des décisions de justice (IV).

i - le droit fondamental à un procès équitable :une applicabilité nationale plus restreinte qu’en droit processuel européen
            Peu à peu, le domaine d’application du droit à un procès équitable en droit interne français, tel que la jurisprudence nationale le détermine, se rapproche de celui retenu par les organes de la Convention. Mais la coïncidence n’est pas encore parfaite, même si des progrès importants ont été accomplis ces dernières années et notamment en 1996. Les domaines restant encore en creux par rapport à la jurisprudence européenne concernent aussi bien le contentieux administratif (A), que le contentieux judiciaire (B), les deux se rejoignant sur le problème du permis de conduire à points (C).
            Ces divergences, qui tendent à s’amenuiser, tiennent, bien évidemment, à la méthode utilisée par la Cour européenne pour fixer le domaine d’application de l’article 6 §1 et sur lesquelles il n’y a pas lieu ici de s’attarder, sauf à souligner les conséquences inéluctables, quasiment automatiques, de cette méthode dite de l’autonomie des notions. Ce que deux éminents spécialistes de ces questions ont appelé, en termes diplomatiques, « la tendance extensive de la jurisprudence européenne[42] », et qui a conduit l’un d’entre eux à affirmer, en une formule plus directe, que « le contrôle de la Cour s’étend jusqu’aux bornes fixées par elles[43] ».Ainsi, la méthode de la Cour européenne pour déterminer le caractère civil des droits et obligations sur lesquels portent les contestations, n’implique pas que les parties au litige soient des personnes privées, l’approche patrimoniale étant décisive et l’intervention de la puissance publique n’est plus exclusive du caractère civil de l’obligation. De même, en matière pénale, l’arrêt Engel c/ Pays-Bas[44] a été le premier à affirmer en 1976 d’une part, que les états ne devaient pas pouvoir disposer à leur guise des qualifications, par exemple disciplinaire ou lieu de pénale, et, d’autre part, que la matière pénale dépassait le code pénal par ses trois réactifs que sont : les indications du droit national, la nature du fait ou du comportement transgresseur et le but et la sévérité de la sanction. Jurisprudence confirmée par la suite à propos de sanctions dans le domaine de l’économie[45], de la circulation routière[46] et dans les domaines pénitentiaire[47], procédural[48], parlementaire[49] et fiscal[50]. Il n’est donc pas étonnant que, les mots écrits dans l’article 6 §1 de la Convention étant lus comme désignant des concepts autres que ceux traditionnellement admis dans les droits nationaux, cette lecture extensive puisse ne pas être la même selon la juridiction nationale amenée à en connaître pour fixer l’applicabilité de l’article 6 à tel ou tel type de contentieux. D’où des divergences quant au champ d’application de l’article 6 §1. Ce sont ces divergences que nous voudrions mettre en exergue ici, en ne distinguant pas selon la matière civile et la matière pénale, mais selon les ordres de juridictions car tous les deux ont à en connaître, précisément en raison de l’autonomie des notions. Il nous a donc semblé plus pertinent de montrer en parallèle (A et B) ou conjointement (C), les réticences françaises à soumettre certains contentieux aux exigences de l’article 6 §1. La marge nationale d’interprétation s’amenuise, à tel point que certains commencent à s’interroger ouvertement sur la cohérence de l’interprétation de la Convention, au-delà de sa spécificité et de son autorité[51].

            a) zones de résistance dans le contentieux administratif
            Elles se réduisent au fur et à mesure que des contestations sur ces zones de résistance sont portées devant les organes de contrôle de la Convention pour les raisons qui viennent d’être indiquées et qui se ramènent à l’idée qu’en matière civile seul l’imperium étatique échappe encore à l’article 6 §1 alors que par ailleurs la matière pénale, en raison des réactifs retenus s’étend de plus en plus.
a) Ainsi, le Conseil d’état a cédé en 1996 à la jurisprudence européenne[52], en admettant, après vingt ans de résistance, que le contentieux disciplinaire relevait du champ d’application de l’article 6 §1, au titre d’un litige « de caractère civil », notamment lorsque ces litiges sont portés devant les juridictions ordinales, telles que les conseils des ordres d’avocats ; l’arrêt Maubleu, du 14 février 1996[53], rendu au visa de l’article 6 §1, revient sur l’arrêt Debout du 27 octobre 1978, arrêt de principe en la matière[54]. Il est donc prévisible que des solutions acquises antérieurement à l’arrêt Maubleu, dans des contentieux du même type, seront remises en cause si le Conseil d’état était amené à connaître de ces litiges ; par exemple pour les poursuites disciplinaires exercées devant le Conseil supérieur de la magistrature[55] ou pour le contentieux porté devant la commission bancaire[56].
            b) Restent encore en-dehors du champ d’application de l’article 6, les litiges relatifs à l’acquisition de la nationalité française[57], ceux ayant trait à la reconduite à la frontière d’un étranger en situation irrégulière[58], les contestations soumises à la Commission des recours des réfugiés[59] ou aux commissions départementales des handicapés[60], de même qu’autrefois, les demandes adressées à l’ex-commission juridictionnelle des objecteurs de conscience[61].
            c) En revanche, et malgré une jurisprudence défavorable du Conseil d’état et de la Cour des comptes[62], les procédures mises en œuvre devant la Cour des comptes et les Chambres régionales des comptes entrent désormais dans le champ d’application de l’article 6, mais de par la volonté du pouvoir exécutif, les garanties du droit à un procès équitable ayant été étendues à ces contentieux par la voie réglementaire (décrets des 23 août 1995 et 18 avril 1996).
            d) Enfin, par suite de la condamnation de la France par la Cour européenne, le 18 mars 1997, le droit à un procès équitable a été étendu à la phase de l’expertise technique dans le contentieux administratif[63]. La jurisprudence administrative devra donc s’incliner.
            Le même phénomène d’amenuisement des résistances à l’application des garanties de l’article 6 §1 à certains contentieux se manifeste dans la jurisprudence judiciaire.
b) zone de résistance dans le contentieux judiciaire
            Cette résistance quant au principe même de l’applicabilité de l’article 6 à un type de contentieux a pratiquement disparu de la jurisprudence judiciaire. On trouve en revanche de nombreux cas dans lesquels les tribunaux considèrent que telle ou telle garantie n’est pas violée au regard de ce texte, mais cette jurisprudence ne traduit pas un refus de principe de soumettre tout un contentieux à l’application des exigences de l’article 6 ; elles seront étudiées avec l’examen de la jurisprudence nationale relative à chacune d’elles (infra, III). Une divergence subsiste encore en matière pénale, à propos de la phase de l’instruction.
            a) Curieusement en effet, la Chambre criminelle semble considérer, dans un arrêt récent[64], que la garantie d’un procès équitable et l’article 6 ne s’appliquent pas à la phase de l’instruction (bien que les droits de la défense y soient très présents et reconnus par la Chambre elle-même, en tout cas pour l’essentiel, v. infra III, A, sur ce point). La Cour européenne a jugé, tout au contraire, que les exigences de ce droit à un procès équitable pouvaient être invoquées par « tout accusé », avant la saisine du juge au fond « si et dans la mesure où leur inobservation initiale risque de compromettre  gravement la caractère équitable du procès » ; en conséquence, la Suisse fut sanctionnée pour absence de l’avocat lors de l’instruction préparatoire[65]. D’une manière plus générale, l’accusation commence en matière pénale, selon la Cour[66], avec la notification officielle du reproche d’avoir accompli une infraction pénale ou, selon la Commission[67], au moment « de répercussions importantes sur la situation du suspect ». Et pour la Cour, « il existe un lien trop étroit entre l’appréciation de la nécessité de la détention et celle - ultérieure - de la culpabilité pour que l’on puisse refuser la communication de pièces dans le premier cas, tandis que la loi l’exige dans le second... Faute d’avoir garanti l’égalité des armes, la procédure n’a pas été contradictoire »[68].
            La Cour européenne est même allée plus loin très récemment en considérant qu’une assignation à comparaître peut s’analyser en une accusation au sens de l’article 6 §1, l’accusation se définissant comme « la notification officielle émanant de l’autorité compétente, du reproche d’avoir accompli une infraction pénale ». Il est donc fort probable que la Chambre criminelle sera amenée à revoir sa position et à ne pas se contenter de reconnaître simplement que les droits de la défense (et encore, pas toujours dans de bonnes conditions..) doivent être respectés dès la phase de l’instruction préparatoire.
            b) On peut trouver un prolongement de cette résistance de la Chambre criminelle à l’application des garanties du procès équitable très en amont de la phase du jugement sur le fond dans l’arrêt qu’elle a rendu le 6 février 1997[69] : l’attendu qui nous intéresse ici concernait la distraction d’un document dont un membre du Parquet était soupçonné d’en être l’auteur ; ce document, s’il n’avait pas été dissimulé, aurait permis à une personne de bénéficier d’un privilège de juridiction (privilège d’ordre public à l’époque des faits, article 679, CPP), dès lors qu’elle était susceptible d’être inculpée. Or le bordereau d’enregistrement de ce document portait la mention « mis en cause », suivie de l’énumération des noms de deux personnes physiques. La Chambre criminelle considère que dès lors que ce document, qui mettait en cause cette personne, n’avait pas été versé à l’information déjà ouverte, il ne pouvait y avoir motif d’annulation de la procédure, le juge d’instruction n’en n’ayant pas eu connaissance. La décision est pour le moins surprenante, puisque par hypothèse la dissimulation de ce document avait pour objectif d’interdire au juge d’instruction d’en connaître et donc d’être obligé de se dessaisir. A bien comprendre la Chambre criminelle la situation aurait pu déboucher sur une annulation si le juge d’instruction avait été complice de l’agissement en cause, ce qui est tout de même beaucoup pour un seul tribunal ! De plus, la jurisprudence européenne est très claire à cet égard : l’accusation pénale, permettant de bénéficier du droit à un procès équitable, commence en amont du procès, dès qu’une autorité publique dénonce un suspect comme coupable, avant toute inculpation officielle et la Commission retient l’idée de « répercussions importantes sur la situation du suspect »[70]. On ne peut s’en tenir, au regard de la jurisprudence européenne, à la notion stricte d’inculpation pour considérer qu’une personne est l’objet d’une accusation ; l’article 679, dans sa rédaction alors applicable, visait d’ailleurs, une notion plus large et plus floue que celle d’inculpation, bien dans l’esprit européen, à savoir « susceptible d’être inculpée », ce qui, en bon français, n’a jamais voulu dire « être inculpé ». Dès lors qu’une personne est mise en cause dans un bordereau informatique du Parquet et que quelques jours plus tard elle sera mise en examen, n’était-elle pas dès ce jour là « susceptible d’être inculpée », surtout si la pièce qui aurait permis son inculpation immédiate si elle avait été transmise immédiatement au juge d’instruction, ne l’a pas été, non pas pour quelques hésitations du Parquet, mais parce qu’un membre de celui-ci aurait soustrait la pièce ! Y a-t-il eu procès équitable ? Certainement pas au niveau de la délocalisation de la procédure qui était inhérente à ce genre de situation et au regard des critères de la Cour européenne.
            C’est la matière pénale qui est encore l’occasion de résistances à l’applicabilité de l’article 6 §1, mais cette fois dans des contentieux communs aux juridictions administratives et judiciaires.
            c) zones de résistance communes aux juridictions administratives et judiciaires
            Elles concernent la règle non bis in idem (a) et le permis de conduire à points (b).
            a) Contradictions quant au champ d’application de la règle non bis in idem
1) La Commission et la Cour ont consacré, au nom du droit à un procès équitable un droit qui n’est garanti qu’à titre optionnel dans la Convention, au Protocole n° 7, article 4 §1, à savoir le principe non bis in idem[71]. Le rapport de la Commission et l’arrêt sont riches d’enseignements pour la France, car bien que l’affaire concerne l’Autriche, la solution est transposable, les réserves émises par la France et par l’Autriche l’étant en termes identiques. Il s’agissait de savoir si une personne ayant été poursuivie et condamnée par un tribunal pénal autrichien, pouvait ensuite être condamnée par une autorité administrative, mais dans des conditions telles que les sanctions administratives relevaient de la matière pénale au sens de la Convention. Or, l’Autriche, comme d’ailleurs la France, ont ratifié le Protocole avec des réserves d’interprétation et notamment que le principe non bis in idem ne serait applicable que pour des poursuites engagées à propos d’infractions relevant « dans le sens du Code pénal autrichien » ou « en droit français » de la matière pénale. A suivre ces réserves et le sens que leur donnait l’état autrichien, les poursuites devant l’autorité administrative ne relevant pas de la matière pénale au sens national autrichien elles pouvaient être engagées pour les mêmes infractions. Ce n’est pas l’avis de la Commission, ni la décision de la Cour qui considère « qu’en excluant toutes les procédures qui ne seraient pas pénales au sens du code pénal autrichien, la déclaration [autrichienne] n’offre pas à un degré suffisant la garantie ; qu’elle ne va pas au-delà des dispositions explicitement écartées par l’Autriche ». En invalidant les réserves autrichiennes la Cour fait entrer le principe non bis in idem dans la matière pénale au sens de la Convention, dans les procédures pénalisées de l’article 6, celles pour lesquelles le droit à un procès équitable est applicable. Ce dernier consacre ainsi un droit optionnel, en faisant tomber des réserves d’interprétation. En outre, la Commission avait considéré que le principe non bis in idem jouait pour les mêmes faits à la base des deux poursuites autrichiennes, quand bien même elles ne concernaient pas « formellement » la même infraction ; la Commission insiste sur le fait que le Protocole n° 7, article 4 §1, ne fait pas référence à une « même infraction », mais à des poursuites et à une condamnation portant « à nouveau » sur une même infraction, c’est à dire sur les mêmes faits.
2) Or, la Chambre criminelle de la Cour de cassation considère, en méconnaissance totale de la jurisprudence de la Cour européenne pourtant antérieure de huit mois à son arrêt, que « la règle non bis in idem, consacrée par l’article 4 du protocole n° 7, additionnel à la CEDH, ne trouve à s’appliquer, selon les réserves faites par la France en marge de ce protocole, que, pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n’interdit pas la prononcé de sanctions fiscales parallèlement aux sanctions infligées par le juge répressif »[72].
3) Le Conseil d’état retient la même solution au regard de l’article 14-7 du pacte international relatif aux droits civils et politiques : « cet article, pour lequel la France n’a formulé aucune réserve d’interprétation, ne fait pas obstacle à ce qu’un contribuable condamné ou relaxé des poursuites du chef de fraude fiscale se voie appliquer, s’il y a lieu, par l’administration fiscale, les pénalités pour mauvaise foi ou pour manoeuvres frauduleuses ou les pénalités prévues en cas d’absence de déclaration ou de déclaration tardive »[73].
4) Même solution pour le Conseil de la concurrence à propos des articles 7 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 et 85 du Traité CEE : pas d’applicabilité de ce principe en cas d’application conjointe de ces deux articles (infractions distinctes selon le Conseil, car l’article 85 suppose que le commerce entre les états membres soit concerné)[74]. Ou encore, pour des poursuites pénales pour publicité mensongère (articles L. 121-1, L. 121-5 et 6, code de la consommation), leur existence ne saurant faire échec ni à la compétence du Conseil, ni à son pouvoir de sanction, le principe non bis in idem n’ayant pas lieu de jouer[75].
5) Pour être complet, signalons que la Cour de justice des Communautés européennes retient la même solution que le Conseil de la concurrence[76], mais ajoute dans son arrêt qu’une « exigence générale d’équité...implique qu’il soit tenu compte de toute décision antérieure pour la détermination d’une éventuelle sanction ». N’est-ce pas le cas lorsqu’il y a application simultanée des deux règles par la même autorité ?
            b) Les mesures de retrait de points du permis de conduire
            Le problème de l’applicabilité de l’article 6 §1 au contentieux des sanctions administratives (et sur lequel v. supra, A) trouve un prolongement dans les mesures de retrait de points du permis de conduire[77]. L’harmonisation entre la position des juridictions nationales et celle de la Cour européenne n’est pas encore réalisée en ce domaine, mais la question n’est pas tranchée définitivement. En réalité le problème se dédouble :
- Il y a d’abord celui du retrait de points, prononcé par le juge pénal, suite à une condamnation principale. Le Conseil d’état[78] et la Cour de cassation[79] convergent pour considérer, d’une manière constante, que ce retrait ne présente pas le caractère d’une sanction pénale accessoire à une condamnation, bref qu’il n’y a pas « matière pénale » au sens de l’article 6 §1. La mesure serait donc purement administrative et la garantie d’un procès équitable n’aurait pas lieu de s’appliquer ici. Mais dans cette hypothèse, la Commission a donné son avis le 29 mai 1997 et a reconnu l’applicabilité de l’article 6 §1 aux mesures de retrait de points du permis de conduire, compte tenu de la nature et du degré de gravité de cette sanction[80]. Il s’agit bien d’une accusation en matière pénale. Pour autant - et malgré l’opinion dissidente de neuf commissaires dont le commissaire français M. J.- Cl. Soyer - la Commission considère que dans une telle hypothèse, le retrait des points étant la conséquence de la décision pénale de condamnation prononcée à l’encontre de l’automobiliste (et non pas du paiement spontané de l’amende, sans passer par un tribunal), « un contrôle suffisant au regard de l’article 6 §1 se trouve incorporé dans [cette] décision, sans qu’il soit besoin de disposer d’un contrôle séparé supplémentaire de pleine juridiction portant sur le retrait de points ; par ailleurs le requérant pourra introduire un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative afin de faire contrôler que l’autorité administrative a agi à l’issue d’une procédure régulière et notamment que le titulaire du permis de conduire a été mis à même de saisir le juge pénal. Dans ces conditions, la Commission est d’avis que le requérant a, dès à présent, bénéficié dans l’ordre interne d’un contrôle juridictionnel suffisant concernant la mesure litigieuse au regard de l’article 6 §1 ».
- En outre, second aspect du problème, la Chambre criminelle est même allée jusqu’à affirmer, dans les trois arrêts précités du 26 juin 1996, que lorsque la personne concernée par le retrait des points préfère ne pas demander que son dossier soit examiné par le tribunal de police, elle « renonce à la garantie d’un procès équitable en s’acquittant d’une amende forfaitaire », parce qu’elle se reconnaît une part de responsabilité. La formule est pour le moins contestable, car elle est trop générale, englobant tout le procès, alors que la Cour européenne n’accepte la renonciation du justiciable dans une matière d’ordre public - et c’est le cas de la garantie d’un procès équitable[81] - qu’à certaines conditions tenant à ses caractères et à son objet, conditions qui ne semblent pas réunies ici :
- la renonciation doit être libre, sans contrainte ; l’automobiliste n’est-il pas contraint de choisir la solution du paiement, alors que tout l’incite dans la rédaction du procès-verbal qu’il reçoit à choisir cette solution ? Son attention est attirée sur les peines plus fortes qui sont encourues devant le tribunal s’il a l’audace de s’y présenter ; il devra se déplacer jusqu’au tribunal compétent, qui peut être très éloigné de son domicile habituel, choix d’un avocat pour mieux se défendre, etc..
- Surtout, on ne peut renoncer à n’importe quelle garantie ; l’objet de la renonciation est variable et si, pour tel ou tel aspect de la garantie d’un procès équitable, on peut admettre la renonciation, par exemple pour la publicité de l’audience[82], la Cour européenne a en revanche déjà jugé que le droit à un tribunal impartial, le droit à un tribunal établi par la loi ne peut faire l’objet d’une renonciation car « un tel droit offre une importance capitale et son exercice ne peut dépendre des seuls intéressés[83] ». En admettant la renonciation « à la garantie d’un procès équitable » sans aucune restriction, la Chambre criminelle semble bien admettre la renonciation à un tribunal établi par la loi, puisqu’après le paiement de l’amende valant reconnaissance de responsabilité, aucun recours ne sera plus possible.
L’affaire est donc à suivre sur ces deux aspects et notamment celui de la validité de la renonciation à la garantie d’un procès équitable. On aborde ainsi le droit à un recours juridictionnel devant un tribunal.
ii - le droit fondamental à un tribunal, droit pleinement consacré
            Le caractère fondamental de ce droit est établi, au niveau du critère des sources supranationales, par plusieurs dispositions : l’article 8 de la Déclaration universelle des droits de l’homme (« toute personne a droit à un recours effectif devant les juridictions nationales compétentes contre les actes violant les droits fondamentaux qui lui sont reconnus par la Constitution ou par la loi ») ; les articles 2 §3 (droit à un recours utile) et 14 §1 (droit à ce que sa cause soit entendue par un tribunal...) du Pacte international relatif aux droits civils et politiques ; les articles 6 §1 (droit à un tribunal etc..) et 13 (droit à un recours effectif devant une instance nationale) de la Convention européenne des droits de l’homme. C’est l’article 6 §1 qui a servi de fondement à la reconnaissance, par la Cour de Strasbourg, d’un droit d’accès à la justice, du droit à un recours de nature juridictionnelle ; le droit d’agir en justice ne constitue, selon les termes mêmes de l’arrêt Golder « qu’un aspect » du droit à un procès équitable[84].
            Ce caractère fondamental est conforté, en droit interne, par le Conseil d’état qui a reconnu que le droit d’agir en justice entrait dans la catégorie des garanties fondamentales accordées aux citoyens pour l’exercice des libertés publiques[85]. Quant au Conseil constitutionnel, après avoir admis, en 1993, la valeur constitutionnelle du droit à un recours juridictionnel[86], il l’a ensuite rattaché, en 1994, à l’article 16 de la Déclaration des droits de l’homme de 1789 qui assure « la garantie des droits »[87] et l’a définitivement consacré en 1996[88].
            Ces soubassements internationaux et constitutionnels expliquent sans doute que le droit d’accès à un tribunal soit assez largement reconnu par les juridictions françaises, administratives et judiciaires, encore que quelques réticences se soient manifestées chez les premières (A), alors que les secondes ont su, au contraire, développer une jurisprudence audacieuse, n’hésitant pas à créer des recours prétoriens (tels que le recours-nullité) lorsque la loi avait supprimé toute possibilité de recours ou ne les avait pas expressément prévus (B).
            a) la consécration du droit à un recours dans la jurisprudence administrative
            La proposition se dédouble, en fonction des deux articles contenus dans la Convention européenne, l’article 13 et l’article 6, dont les deux ont donné lieu à des applications en matière administrative.
            a) La disposition de l’article 13 de la Convention européenne, (droit à un recours effectif devant une instance nationale), n’est pas totalement absorbée par celle de l’article 6 qui consacre le droit fondamental à un recours juridictionnel. Deux décisions au moins ont visé ce texte pour estimer d’ailleurs qu’il n’avait pas été violé :
- dans le contentieux de la reconduite à la frontière des étrangers en situation irrégulière, le rejet du moyen étant fondé sur les garanties offertes par la loi et, notamment l’effet suspensif du recours ouvert aux intéressés[89] ;
- en matière de permis de conduire à points, le retrait des points étant jugé conforme aux droits et libertés reconnus par la Convention[90] (supra, I, C, b).
            Peut poser problème en revanche, la théorie dite des actes de gouvernement, le droit à un recours effectif n’étant pas assurée dans cette hypothèse, même s’il est vrai que la Cour européenne n’exige pas une voie de recours « pour toute doléance, si justifiée soit-elle »[91] et si, sur le terrain cette fois de l’article 6 §1, elle considère que le droit à un tribunal n’est pas un droit absolu, les états pouvant le réglementer[92]. Sous cette réserve, le droit à un recours effectif paraît assuré par la jurisprudence administrative. Mais avec l’article 6 §1 on est passé au droit à un recours de nature juridictionnelle.
            b) Au regard de l’article 6 §1 et du droit à un recours de nature juridictionnelle lorsqu’il y a contestation sur des droits et obligations de nature civile ou accusation en matière pénale, la jurisprudence administrative a d’abord contesté l’applicabilité de l’article 6 §1 à certains types de contentieux, notamment le contentieux disciplinaire, la question pouvant lui être posée à propos de l’une ou l’autre des garanties prévues à ce texte (publicité des audiences, impartialité du tribunal etc.., v. supra I). Sous le seul angle du droit à un recours de nature juridictionnelle qui nous intéresse ici, le Conseil d’état a dû céder aux exigences européennes et reconnaître finalement, en 1995[93], après des années de fortes résistances[94], que les sanctions disciplinaires prononcées à l’encontre des détenus et des militaires ne constituent pas des mesures d’ordre intérieur et que par conséquent, faisant grief, elles sont susceptibles d’un recours pour excès de pouvoir.
            b) la création de recours de nature juridictionnelle, par les juridictions judiciaires
            Le droit fondamental à un recours de nature juridictionnelle est largement consacré par la jurisprudence judiciaire, à travers d’une part, le rétablissement d’un recours, dit recours-nullité, lorsque la loi l’a expressément supprimé en matière civile (a) et, d’autre part, l’ouverture d’un pourvoi en cassation en matière pénale même lorsque la loi ne l’a pas spécialement envisagé (b).
            a) Le droit fondamental à un recours-nullité en matière civile
            Le droit à un recours de nature juridictionnelle devient, pour l’appel, la tierce-opposition et même le pourvoi en cassation, un véritable droit fondamental dans la mesure où la jurisprudence judiciaire ouvre de tels recours alors que la loi les avait expressément supprimés (1). Apparaît ainsi un droit fondamental d’origine jurisprudentielle interne (2).
1) Domaine. - C’est d’abord pour l’appel que la jurisprudence a créé, ce qu’il est convenu d’appeler un appel-nullité, lorsque toutes les voies de recours sont fermées[95]. Cet appel-nullité n’est admis par la Cour de cassation que lorsqu’un excès de pouvoir a été commis (par exemple un défaut de pouvoir juridictionnel) ou, évolution récente, lorsqu’un principe fondamental de procédure a été violé. L’hypothèse a été étendue aux jugements avant-dire droit, c’est à dire aux cas où l’appel n’est pas totalement interdit mais simplement différé au jour où un jugement sur le fond sera rendu ; la jurisprudence rend alors l’appel possible immédiatement car, admettre un différé lorsqu’un excès de pouvoir a été commis ou un principe juridique fondamental violé, revient à accepter les graves conséquences, souvent irréversibles, de ce jugement, donc à supprimer, en fait, le droit d’appel[96]. Les applications les plus fréquentes se rencontrent dans le droit des procédures collectives car si le législateur a eu le souci d’accélérer ces procédures en limitant le plus possible les voies de recours ou en les différant, les juridictions d’appel ne pouvaient admettre que de graves irrégularités puissent perdurer sans sanction immédiate.
La même jurisprudence a été élaborée pour la tierce-opposition[97] et pour le pourvoi en cassation[98].
2) Portée. - Ces créations prétoriennes, lorsqu’elles concernent l’appel-nullité et la tierce opposition-nullité, constituent un véritable « substitut au pourvoi en cassation[99], » substitut qui pallie les inconvénients d’une fermeture de toutes les voies de recours par le législateur. Ces recours ont « pour raison d’être de corriger ou d’atténuer une anomalie légale, non de perturber ou bouleverser l’organisation des voies de recours et leur hiérarchie de droit commun. C’est pourquoi sans doute, toute voie de recours, quand elle a été supprimée par dérogation au droit commun des voies de recours, peut accueillir un recours-nullité ou revivre en recours-nullité[100] ».
            Les recours-nullité sont ainsi le moyen d’assurer à ceux qui ont été parties ou représentés à une instance, mais pour lesquels le recours est, a priori, fermé par le législateur, le bénéfice du droit fondamental à un procès équitable, celui-là même qui est visé à l’article 6 §1 de la Convention européenne et pris dans son sens large de droit d’accès à un tribunal. Parce qu’il est ouvert contre la volonté législative, ce recours suppose que le premier juge a violé un principe juridique fondamental ou excédé ses pouvoirs. C’est cette violation ou cet excès qui légitiment le recours et font de lui un droit fondamental qu’un législateur national ne peut supprimer totalement. émerge ainsi « un droit fondamental du justiciable de critiquer le jugement irrégulier[101] », notamment pour excès de pouvoir.
            b) Le droit fondamental à un pourvoi en cassation en matière pénale
            C’est une affaire un peu particulière et très médiatisée qui a donné l’occasion à la Chambre criminelle de la Cour de cassation de préciser pour la première fois que « les décisions juridictionnelles des Chambres d’accusation, statuant sur le fondement des articles 224 à 230, C. pr. pén., [c’est à dire sur les erreurs ou manquements pouvant être reprochés à un officier de police judiciaire] sont susceptibles d’un pourvoi en cassation[102] ». La décision nous semble très importante au regard du droit (fondamental) à un recours et la solution n’allait pas de soi[103]. En effet, si l’arrêt d’une Chambre d’accusation sanctionnant un officier de police judiciaire présente tous les caractères de l’acte juridictionnel et si l’article 567 du code de procédure pénale précise que sont susceptibles de pourvoi en cassation « les arrêts de la chambre d’accusation et les arrêts et jugements rendus en dernier ressort en matière criminelle, correctionnelle et de police », la Cour de cassation considère, dans le même arrêt, que lorsque la chambre d’accusation statue dans les conditions prévues aux articles 224 à 230 précités, elle « ne se prononce ni sur des contestations relatives à des droits ou des obligations de caractère civil, ni sur le bien-fondé d’une accusation en matière pénale » et, par conséquent, le requérant n’a pas droit au bénéfice de la garantie d’un procès équitable ; le requérant invoquait, non sans pertinence, le fait que le président de la chambre d’accusation avait participé à une enquête sur les faits reprochés et saisi lui-même la juridiction ; il y avait en somme confusion des fonctions - et des pouvoirs - de poursuite, d’instruction et de jugement. D’une manière péremptoire et sans donner de justifications la Cour de cassation affirme simplement que de telles décisions n’entrent pas dans le champ d’application de l’article 6 §1. Mais comment peut-il y avoir en même temps proclamation solennelle d’un droit d’accès à un tribunal de cassation et refus, en première instance, des garanties inhérentes à ce procès, alors que le pourvoi tend précisément à faire contrôler par la juridiction supérieure les conditions dans lesquelles a été prononcée l’interdiction d’exercer les fonctions d’officier de police judiciaire ? En outre et surtout, cette interdiction est bien fondée sur une accusation et constitue, au regard des critères de la matière pénale posés par la Cour européenne, une sanction grave pour celui qui était le chef national de tous les OPJ, puisqu’en perdant cette qualité il perd le fondement même de sa fonction, sa raison d’être. La distinction qu’esquisse la Cour de cassation entre le retrait de cette qualité qui entraînerait l’applicabilité de l’article 6 §1 et l’interdiction d’en exercer les fonctions qui ne soumettrait pas la procédure à l’article 6 §1, paraît artificielle, car il est des interdictions qui s’apparentent bien à un retrait pour un temps déterminé. Le droit à un recours juridictionnel est donc ici, non sans contradiction, déconnecté du droit à un procès équitable au sens de l’article 6 §1 de la Convention européenne.
            Le caractère fondamental du droit à un recours est ici d’autant plus symbolique que la Chambre criminelle ne nous avait pas habitués à de telles audaces en faveur des requérants et autres justiciables[104]. Cette chambre rejoint ainsi la position de principe de la Cour de cassation qui a jugé il y a bien longtemps, au début du XIXème siècle, que l’exercice du pourvoi ne peut cesser qu’en cas d’exception expresse et formelle de la loi[105].
            à l’inverse, les résistances à la reconnaissance d’un droit fondamental à un procès équitable se manifestent dès que l’on quitte le terrain du droit d’accès à un tribunal pour celui des autres composantes de ce droit, telles les exigences institutionnelles d’un tribunal indépendant et impartial ou l’égalité des armes et bien d’autres éléments dont l’ensemble constitue les garanties d’une bonne justice.
iii - le droit fondamental à une bonne justice, droit encore largement méconnu
            Par garanties d’une bonne justice, composantes du procès équitable, nous entendons d’une part, les exigences institutionnelles relatives aux tribunal (indépendance et impartialité), et, d’autre part, les exigences procédurales (droits de la défense et égalité des armes ; caractère public des audiences, délai raisonnable ; motivation). Le bilan est ici très contrasté : en dégradé, on passe de la consécration récente, par les juridictions du fond, du droit fondamental à obtenir une décision dans un délai raisonnable (A), à des résistances de la Cour de cassation elle-même, quant aux droits fondamentaux de la défense (B) et à des réticences, de la part du Conseil d’état et de la Cour de cassation, sur certaines des autres garanties d’une bonne justice (C).
            a) la consécration d’un droit fondamental à un délai raisonnable
            C’est bien sûr la jurisprudence du tribunal de grande instance de Paris qui retient l’attention, avec notamment un jugement du 5 novembre 1997[106]. Il faut dire que la France, à l’instar de l’Italie, est fréquemment condamnée, de ce chef, par la Cour européenne, y compris en matière administrative[107]. à vrai dire, aucune juridiction n’a vraiment contesté le caractère fondamental du droit d’obtenir une décision de justice dans un délai raisonnable, mais jusqu’ici les tribunaux ont toujours subi, sinon avec passivité, en tout cas avec fatalisme, le poids de l’encombrement des rôles et les conséquences en résultant pour les justiciables quant à l’allongement de la durée des procès. La réaction du tribunal de grande instance de Paris vaut surtout par sa motivation (l’appel à la notion de déni de justice) et par les conséquences plus lointaines qu’il laisse entrevoir :
a) La motivation, déjà rencontrée dans un jugement du 6 juillet 1994[108], vaut surtout par l’emprunt de la notion de déni de justice à notre collègue Louis Favoreu, emprunt que nous avions tenu à souligner dans l’annotation de cette décision[109] : « le déni de justice s’entend non seulement du refus de répondre aux requêtes ou du fait de négliger de juger les affaires en l’état de l’être, mais aussi plus largement, de tout manquement de l’état à son devoir de protection juridictionnelle de l’individu[110] ».
b) La portée de ces deux jugements est considérable puisqu’ils tendent à contraindre l’état à donner à la Justice les moyens de son fonctionnement en le condamnant à indemniser les justiciables victimes de retard dépassant le raisonnable. Ne nous y trompons pas en effet, derrière la satisfaction immédiate donnée à un justiciable, c’est toute la communauté judiciaire qui est concernée car, en condamnant l’état pour faute lourde, le tribunal de Paris sait bien qu’il peut provoquer un appel d’air pour d’autres procès de ce type, appel d’air qui pourrait très vite, à son tour, contribuer à l’engorgement des tribunaux ! Comme les magistrats qui ont rendu ces décisions le savent, il faut voir dans ces jugements le souci de signifier aux responsables politiques une sorte de « stop, on ne joue plus », on ne continuera plus à évacuer tant bien que mal les litiges dans les conditions actuelles.
L’autre apport de ces décisions c’est la référence à la notion de devoir de protection juridictionnelle de l’état, expression forte, d’inspiration doctrinale, nous l’avons dit, mais à connotation européenne, avec l’idée de l’efficacité des droits fondamentaux du procès. Ce devoir de protection couvre un champ plus large que celui du délai raisonnable. On peut envisager des extensions à d’autres aspects de la garantie d’un procès équitable, par exemple à la protection des citoyens contre les procès médiatiques, contre les procès hors les murs[111]. N’y a-t-il pas dans cette expression, quelque chose qui rappelle la protection des personnes affaiblies dans les conditions permettant de leur accorder une mesure de sauvegarde de justice ? Les citoyens pourraient ainsi venir à la Justice, non seulement en cas d’affaiblissement de leur capacités physiques et mentales, mais aussi et surtout, en cas de difficultés de toute sorte qui nécessiteraient l’intervention de l’état.
            b) lumière et ombres sur les droits fondamentaux de la défense
            Les droits de la défense font l’objet d’une reconnaissance forte en jurisprudence européenne souvent au titre du principe de la contradiction qui en constitue l’une des principales applications. C’est dans l’arrêt Borgers c/Belgique[112], que la Cour européenne a considéré, dans le domaine de la procédure pénale, que « les droits de la défense sont des éléments de la notion, plus large, de procès équitable », donc entrent dans le champ d’application de la garantie de l’article 6. Quand on connaît la force de cette garantie en droit positif, on peut considérer que le principe de la contradiction acquiert une valeur supranationale qui devrait le mettre à l’abri de toute tentative législative pour en restreindre la portée. Quant au principe de la contradiction, sa valeur européenne a été affirmée dans l’arrêt Engel c/ Pays-Bas, du 8 juin 1976, (déjà cité) à propos de sanctions disciplinaires contre des soldats. Jurisprudence confirmée par la Cour, notamment dans son arrêt Östurk c/ RFA, du 21 février 1984 (déjà cité).
            Le droit interne n’est pas toujours aussi net : on trouve une zone de lumière (1°) que viennent contrecarrer quelques zones d’ombres traduisant des résistances à tirer toutes les conséquences de la garantie des droits de la défense (2°).
            1°) lumière
a) En droit interne, le principe des droits de la défense est passé de la valeur d’un principe général du droit au stade de principe à valeur constitutionnelle.
1) Principe général :
- En tant que partie intégrante des droits de la défense, le principe de la contradiction a très tôt fait l’objet d’une reconnaissance par le Conseil d’état, en matière de contrôle des actes administratifs de sanction : il y a vu d’abord, en 1964[113] et en 1968[114], « une règle générale de procédure », c’est à dire une règle qui s’impose en l’absence de texte, mais que le pouvoir réglementaire peut écarter. Il faudra attendre 1980[115] pour que le Conseil d’état y voit « un principe général du droit », dont ce pouvoir ne peut s’émanciper.
- La chambre criminelle de la Cour de cassation a aussi reconnu le caractère de principe général du droit au principe de la contradiction, en jugeant que le droit de faire appel d’une ordonnance de mise en détention ne pouvait être réservé à une seule partie, en l’occurrence le mis en examen, mais que toute autre partie pouvait l’exercer[116]. Pour reconnaître cette extension du droit d’appel, au-delà du Code, l’arrêt se fonde sur l’article 185, du code de procédure pénale, mais aussi sur les principes généraux du droit.
2) Principe à valeur constitutionnelle :
- Toute une série de décisions du Conseil constitutionnel ont affirmé solennellement que les droits de la défense découlent directement « des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République »,[117] y compris dans la matière pénale, en l’occurrence le droit administratif répressif de la concurrence[118]. C’est parfois au principe d’égalité que se réfère le Conseil constitutionnel pour assurer le respect des droits de la défense : ainsi, lorsqu’il censura les dispositions de la loi du 24 août 1993 sur la présence de l’avocat pendant la garde à vue, en estimant que s’il était possible de différer le moment de l’intervention de l’avocat pour des infractions très graves, telles que le trafic de stupéfiants, on ne pouvait « dénier à toute personne tout droit à s’entretenir avec un avocat pendant une garde à vue à raison de certaines infractions, alors que ce droit est reconnu à d’autres personnes dans le cadre d’enquêtes sur des infractions différentes punies de peines aussi graves et dont les éléments de fait peuvent se révéler aussi complexes ». C’était appliquer l’idée que « soient assurées aux justiciables des garanties égales, notamment quant au respect des droits de la défense »[119]. Désormais « les droits de la défense constituent pour toutes les personnes.......un droit fondamental à caractère constitutionnel ».
- C’est cette expression que la Cour de cassation elle-même a repris dans un arrêt de son assemblée plénière à propos du droit à l’assistance d’un avocat : « la défense constitue pour toute personne un droit fondamental à caractère constitutionnel[120] ». Dès lors le Conseil de l’Ordre des avocats aux Conseils n’était pas fondé à refuser de désigner d’office un avocat pour la présentation d’une requête en rabat d’arrêt, même si la requête lui paraissait manifestement infondée. Il faut dire que la France avait déjà été condamnée dans une telle hypothèse parce que l’auteur d’un pourvoi devant la Chambre criminelle n’avait pas pu obtenir l’assistance d’un avocat devant la Chambre criminelle[121]. Cela n’a pas empêché la Cour de cassation de ne pas viser le droit européen dans l’arrêt de son assemblée plénière ! Ce silence est d’autant plus curieux que, dès le 5 décembre 1978[122], la Chambre criminelle avait consacré l’application directe de l’article 6 §3, a), sans passer par un texte interne, pour annuler, au seul visa du texte européen, un arrêt de Cour d’assises dont il résultait que le jury avait modifié les peines encourues par l’accusé en répondant à des questions complémentaires qui lui avaient été posées sans que l’accusé en ait été préalablement informé ; la violation de l’article 6 §3, a) était patente, puisque selon ce texte « tout prévenu a droit à être informé d’une manière détaillée de la nature et de la cause de la prévention dont il est l’objet ».
- La cour d’appel de Pau a elle aussi invoqué la valeur constitutionnelle de ce principe qui « s’impose à toutes les juridictions, judiciaires ou administratives et à toute autorité administrative appelée à prendre une décision ayant le caractère d’une sanction », pour sanctionner l’obligation faite à cette autorité d’indiquer à un étranger, en situation irrégulière et en état de rétention administrative qu’il a droit à un avocat[123].

            b) Les applications tirées des droits fondamentaux de la défense
- C’est au nom du droit à un procès équitable et dans le domaine des droits de la défense, que la Cour de cassation a estimé, en matière de diffamation par voie de presse et d’utilisation de la voie du référé, que le juge des référés devait s’assurer, bien que saisi sur le fondement de l’article 809 du nouveau code de procédure civile, que le journaliste avait été en mesure de rapporter la preuve de la vérité des faits allégués et qu’il avait bénéficié du délai de dix jours que lui accorde à cette fin, la loi du 29 juillet 1881[124].
- En dehors du procès, la Chambre commerciale a considéré que la révocation d’un directeur général de société est abusive si le principe de la contradiction n’a pas été respecté[125]. On voit ainsi apparaître une extension des droits de la défense hors du champ du procès.
            2°) les ombres
Quant au respect des droits de la défense, notre vieille tradition inquisitoriale et un ordre public omniprésent font parfois douter de la conformité de notre procédure pénale aux exigences de la Convention européenne des droits de l’homme, alors que certains en sont encore à regretter que l’efficacité de la répression puisse pâtir du respect des droits de la défense, du fait que l’on met une personne en mesure de se défendre[126].Or, tout au contraire, n’est-ce pas lorsque l’accusation est la plus lourde, la culpabilité la plus certaine aux yeux des enquêteurs, que le principe de la contradiction doit être le mieux respecté ? Le respect de ce principe est un hommage au doute. Les difficultés d’application en droit français ne manquent pas : de l’accès au dossier (a), au respect de l’égalité des armes par le contradictoire imposé à toutes les parties (c) et à l’exécution d’un jugement étranger (d) en passant par le droit à l’assistance d’un avocat (b).
            a) La première difficulté concerne l’accès direct au dossier :
 
1) Reconnu en matière civile à propos de l’assistance éducative par la Cour européenne[127] il ne l’est pas par la Cour de cassation française[128]. Celle-ci juge en effet, que sont compatibles avec le droit à un procès équitable, les dispositions des articles 1186 et 1187, alinéa 2, du nouveau code de procédure civile, dans la mesure où le père des enfants n’allègue pas avoir été mis dans l’impossibilité d’être assisté d’un avocat[129] ; or, ces articles n’organisent la consultation du dossier d’assistance éducative qu’au profit du conseil des personnes concernées (ou de la personne ou service à qui l’enfant a été confié). En l’occurrence, le père qui n’alléguait pas avoir été mis dans l’impossibilité d’être assisté d’un avocat, n’avait pas eu accès au dossier. Est-ce équitable ? Certainement pas au regard de la jurisprudence de la Cour européenne qui a jugé, sept mois auparavant, qu’en matière d’assistance éducative, les pièces du dossier devaient être communiquées aux parents, au titre de l’article 6[130] !
2) En matière pénale, il a fallu attendre l’année 1996 pour voir progresser, d’une manière sensible, le droit d’accès direct du mis en examen ou de l’accusé au dossier de la procédure :
                        . d’abord, par une décision de la Chambre criminelle du 12 juin 1996[131], confirmée le 2 octobre 1996[132], au visa cette fois de l’article 6 §3 de la Convention, décisions reconnaissant ce droit à l’accusé dans la phase du jugement ;
                        . ensuite, par une loi du 30 décembre 1996, modifiant l’article 114, CPP, pour autoriser le mis en examen à consulter directement son dossier, sous certaines conditions encore bien restrictives. Dix-huit mois auparavant la Cour de cassation, en Assemblée plénière, le 30 juin 1995, avait refusé au mis en examen le droit de se faire délivrer des copies du dossier pour son usage direct, celles-ci étant réservées à son avocat.
            Pour autant, la France a encore été condamnée par la Cour européenne dans un arrêt du 18 mars 1997 : une personne avait été invitée à comparaître par voie de citation directe devant le tribunal de police, sans avoir pu prendre connaissance du dossier ; en effet, le Procureur avait refusé de lui donner accès au dossier, au motif que seul un avocat peut avoir accès direct à un dossier pénal, alors que l’intéressé avait décidé de se défendre seul. La Chambre criminelle française rejeta le pourvoi et la France est condamnée par la Cour européenne : « il est important pour le requérant d’avoir accès à son dossier et d’obtenir la communication des pièces le composant, éléments d’une bonne défense, afin d’être en mesure de contester la procès-verbal dressé à son encontre et sur lequel repose exclusivement sa condamnation »[133].
            b) La deuxième difficulté concerne la mise en œuvre du droit à l’assistance d’un avocat. Bien que la Cour de cassation, en Assemblée plénière, entende lui reconnaître la qualité d’un droit fondamental à caractère constitutionnel (v. supra, 1°), de nombreuses décisions de sa Chambre criminelle vont à l’encontre de cette affirmation.
1) Ainsi, la Chambre criminelle refuse de se soumettre à la décision de condamnation de la France par la Cour européenne le 23 novembre 1993. Il s’agit de la jurisprudence Poitrimol, lorsque le prévenu est jugé par défaut et qu’il lui est refusé le droit de se faire représenter par un avocat ; condamné, au motif que la représentation ne saurait s’appliquer aux prévenus en fuite, son pourvoi est déclaré irrecevable, parce qu’un condamné n’ayant pas obéi à un mandat d’arrêt n’est pas en droit de se faire représenter. Telle est du moins l’opinion de la Cour de cassation, condamnée par la Cour européenne qui y voit une atteinte au procès équitable, la sanction étant disproportionnée. Il est vrai que c’est une opinion de vieille jurisprudence française que le prévenu qui se dérobe à l’exécution d’un mandat de justice n’est pas en droit de se faire représenter, que ce soit pour le pourvoi en cassation[134], l’appel[135], l’opposition[136] ou une requête en difficulté d’exécution.[137] La Chambre criminelle a maintenu sa position par d’autres arrêts des 15 février 1994, 8 mars et 21 juin 1995. De son côté la Cour européenne a aussi maintenu sa position en condamnant la Hollande[138]. Il est vrai que, pour la Chambre criminelle, la situation de la victime doit aussi être envisagée (en l’occurrence la mère privée de son enfant, le père de celui-ci, prévenu de non-représentation d’enfant, étant en fuite). La jurisprudence de la Cour européenne n’est pas acquise à l’unanimité de ses membres, des opinions dissidentes ont été émises. Un mouvement de certaines juridictions du fond semble se dessiner en faveur de l’application de la jurisprudence européenne ; ainsi, la Cour de Versailles vient-elle de juger « que le principe du double degré de juridiction, application particulière des droits de la défense, conduit à déclarer recevable l’appel, voie de recours ordinaire, formé par un avocat représentant un prévenu à l’égard duquel un mandat de justice délivré par la juridiction de jugement de première instance n’a pas pu être exécuté, lorsque, comme en l’espèce, ne sont pas établies les circonstances propres à l’intéressé, qui ont fait échec aux diligences effectives accomplies en vue de cette exécution[139] ».
2) Ou encore, l’arrêt du 13 février 1996, par lequel la Chambre criminelle[140] affirme que « l’article 63-4, CPP, qui impose à l’officier de police judiciaire d’informer, par tous moyens, le bâtonnier, que la personne gardée à vue demande à s’entretenir avec un avocat désigné d’office, lorsque vingt heures se sont écoulées depuis le début de celle-ci, ne lui fait pas obligation de rendre effectif l’entretien avec cet avocat ». La formule est audacieuse, surtout avec l’allusion au caractère effectif du droit, quand on sait que la Cour européenne s’attache essentiellement au caractère effectif des droits, même s’il est vrai que certains barreaux sont bien négligents sur la présence de quelqu’un derrière le poste téléphonique dont ils donnent le numéro ! Faut-il rappeler ici la célèbre formule de l’arrêt Airey du 7 octobre 1979 : « la Convention protège des droits, non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs » ? Le contrôle d’effectivité constitue « l’inspiration maîtresse de la jurisprudence européenne ». Si l’on compare l’attendu de l’arrêt du 13 février 1996 avec une autre situation, déjà soumise à la CEDH, on peut penser que la Chambre criminelle a été bien imprudente à utiliser cette formule ; voici ce que décidait la Cour européenne dans l’affaire Artico c/ Italie, le 13 mai 1980, à propos de l’impéritie d’un avocat désigné d’office : « deux solutions s’offrent aux autorités compétentes : remplacer (l’avocat d’office) ou l’amener à s’acquitter de sa tâche... Elles en ont choisi une troisième, la passivité, alors que le respect de la Convention appelait de leur part des mesures positives »[141]. La comparaison par citation se passe de commentaires.
            c) La troisième difficulté est relative au droit de réponse de l’accusé au Ministère public : la Cour européenne a eu l’occasion d’affiner le champ d’application du principe de la contradiction, en l’étendant aux relations des parties avec le Ministère public, tant en matière civile qu’en matière pénale, alors que la Cour de cassation française s’y refuse.
            1) En matière civile et au nom de l’égalité des armes, expression du droit à un procès équitable, la Cour européenne a décidé, dans deux arrêts du 20 février 1996, que « l’impossibilité pour une partie de prendre connaissance de l’avis du Ministère public et de répondre à ses conclusions avant le prononcé de l’arrêt, a méconnu son droit à une procédure contradictoire »[142]. Il s’agissait de la Cour suprême du Portugal et de la Cour de cassation belge. Par ces mêmes arrêts, la Cour abandonne l’exigence de la double condition pour sanctionner la violation du droit à un procès équitable ; il n’est plus besoin qu’à la fois le Ministère public n’ait pas transmis ses conclusions et ait participé au délibéré, même à titre consultatif ; il suffit qu’il n’ait pas transmis ses observations à la partie pour qu’il y ait violation du principe de l’égalité des armes. En l’occurrence, la Cour ne doute pas que le Ministère public belge près la Cour de cassation soit un magistrat indépendant, impartial et objectif mais, dans la mesure où il émet un avis qui est destiné à influencer la Cour, les parties doivent en avoir connaissance. Ce n’est pas son objectivité qui est en cause mais le contradictoire qui doit être respecté entre toutes les parties. La Cour européenne va donc au-delà de la jurisprudence Borgers c/ Belgique en matière pénale, puisqu’il n’est plus nécessaire que le Parquet soit considéré comme l’allié ou l’adversaire de la partie (selon qu’il demande sa relaxe ou sa condamnation) ; jurisprudence confirmée le 25 juin 1997[143]. Mais la réserve introduite par la Cour européenne contient en elle-même la possibilité d’échapper à la critique de ne pas respecter le contradictoire ; il suffira que la partie ait été en mesure de déposer des notes en délibéré pour répondre au Parquet, pour que la France échappe à une éventuelle condamnation de ce chef[144].
            2) En matière pénale, c’est l’arrêt Borgers c/ Belgique du 30 octobre 1991 qui avait jugé que la garantie du procès équitable n’était pas assurée lorsque la partie privée ne pouvait pas répondre au Parquet ; mais il s’y ajoutait cette considération que le Ministère public participait au délibéré, ce qui constituait une circonstance aggravante à cette violation. Jurisprudence confirmée le 22 février 1996, arrêt qui reprend la solution des arrêts rendus en matière civile deux jours plus tôt[145], c’est à dire sans qu’il soit question de la présence du Parquet au délibéré.
Or, la Chambre criminelle maintient sa jurisprudence de refus de communiquer aux parties privées les réquisitions écrites du Parquet, au motif que :
- d’une part, le Parquet émet un avis objectif et que son rôle n’est pas, au niveau de la Cour de cassation, de soutenir l’accusation mais de veiller, en toute indépendance, à l’application de la loi pénale
- et, d’autre part, ce qui semble plus sérieux comme argument, que les avocats aux conseils présents à l’audience, sont invités par le président, à reprendre la parole après l’intervention de l’avocat général[146].
Il reste que, contrairement à la jurisprudence européenne, qui fait de la communication de toute pièce et observation aux parties un droit fondamental (arrêt Nideröst-Huber c/Suisse du 18 fév. 1997[147] et arrêt Werner c/Autriche, 24 nov. 1997[148]), la Cour de cassation française se contente d’une réponse verbale à des observations qui, pour être présentées oralement peuvent être écrites et transmises à la Chambre criminelle.
On peut s’interroger sur ce que serait la position de la Cour européenne si la question lui était soumise du respect de la contradiction dans le procès en correctionnel, l’accusé n’ayant pas connaissance, à l’avance, des arguments développés à l’audience par le représentant du Parquet et ne pouvant y répondre, sur le champ, que par l’éloquence de son avocat. En effet, les mêmes principes européens s’appliquent, devant les juridictions inférieures : ainsi la Cour européenne a-t-elle jugée que la communication aux parties des observations remises à une cour d’appel par le Parquet général, dans le cadre d’une procédure d’indemnisation pour détention provisoire injustifiée s’impose car « le droit à une procédure contradictoire implique, pour une partie, de prendre connaissance des observations ou pièces produites par l’autre, ainsi que de les discuter. Peu importe, à cet égard, que l’affaire relève du contentieux civil, car il ressort de la jurisprudence en la matière que les exigences découlant du droit à une procédure contradictoire sont en principe les mêmes au civil comme au pénal »[149].
d) Une dernière difficulté concerne l’exécution d’un jugement étranger
            La Cour de cassation a, en effet, une conception très particulière des droits de la défense lorsqu’il s’agit de l’exécution d’un jugement dans le cadre de la Convention de Bruxelles. Elle admet dans ce cas, sur le fondement de l’article 27-2°) de la Convention, que l’irrégularité dont serait affectée la signification du jugement émanant d’un état membre quant au respect des droits de la défense, ne prive pas ce jugement de sa libre circulation dans l’espace judiciaire[150]. C’est admettre « une géométrie variable des droits fondamentaux de la procédure[151] », ce qui est tout à fait critiquable.
            c) les réticences des juridictions quant à certaines garanties du droit fondamental à un procès équitable
            a) Le droit à un tribunal impartial n’est pas toujours respecté
1) En procédure civile, c’est la jurisprudence contestée et contestable des première et deuxième chambres civiles[152] qui admettent que le conseiller de la mise en état puisse participer à la formation collégiale de la chambre saisie du déféré de l’une de ses ordonnances. On soulignera l’absence totale de motivation sérieuse pour justifier cette solution (et pour cause !) avec une rédaction qui laisse perplexe : après avoir rappelé la règle selon laquelle « le déféré d’une des ordonnances du conseiller de la mise en état mentionnées à l’article 914, al.2, NCPC, saisit de l’incident la formation collégiale de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée », la Cour ajoute un « il s’ensuit... », dont on ne voit pas très bien le lien de causalité qu’il semble vouloir introduire entre cette distribution à une chambre et la possibilité pour le conseiller de la mise en état d’y siéger, alors qu’il a rendu l’ordonnance. C’est par une pure pétition de principe que la Cour de cassation conclut que ce conseiller « peut valablement faire partie de cette formation collégiale », en violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.
            Au regard de la jurisprudence européenne la position de la Cour de cassation en matière de jugement sur opposition peut poser problème. La deuxième chambre civile considère en effet, conformément aux dispositions du nouveau code de procédure civile, que ce procès peut valablement revenir devant les mêmes juges, sans atteinte à l’impartialité du tribunal, puisqu’il s’agit de faire respecter le contradictoire a posteriori[153]. Or, la Cour européenne est plus nuancée : il y a atteinte à l’exigence d’impartialité du tribunal si celui-ci est présidé par le magistrat qui a rendu la décision et n’est pas soumis au contrôle d’un organe judiciaire apte à décider lui-même de l’issue du litige[154]. En revanche, le recours en révision n’est pas contraire à l’exigence d’un tribunal impartial car c’est une voie de rétractation qui, par essence, doit revenir devant les mêmes juges[155], mais le juge qui a participé au jugement de première instance ne peut ensuite siéger en révision de l’arrêt d’appel[156].
2) En procédure pénale - et les conséquences sont bien plus graves pour les libertés des justiciables - c’est un arrêt rendu le 29 avril 1996 par la chambre criminelle qui prête le flanc à la critique[157]. Voilà un président de chambre d’accusation qui tout à la fois instruit et - sans se poser de questions, puisqu’il ne se déporte pas (ce qui laisse songeur sur sa conception de l’impartialité au regard de sa déontologie..) - préside la formation qui statue sur la régularité des actes d’instruction qu’il a accomplis ; pourvoi ; rejet, avec une motivation qui laisse pantois : « aucune règle légale ne fait obstacle à ce que la Chambre d’accusation apprécie la régularité d’actes d’instruction effectués par un de ses membres... » : certes, et personne ne conteste cette affirmation, mais ce n’est pas la question qui était posée ! La vraie question, celle de la présence du magistrat dont les actes sont contrôlés dans la formation chargée du contrôle, n’est pas posée ; la Cour de cassation « botte en touche », ajoutant que la décision de la Chambre d’accusation « qui ne préjuge pas de la culpabilité des personnes poursuivies, relève du contrôle de la Cour de cassation » ; certes, mais où est-il écrit que le droit à un tribunal impartial ne s’appliquerait que lorsque la culpabilité d’une personne est en cause ? Et en quoi le fait qu’un contrôle de la Cour de cassation est possible, soustrait-il la juridiction qui rend la décision objet du contrôle, à l’obligation de respecter le principe d’impartialité, surtout si celle-ci ne sanctionne pas cette violation ? Faut-il y voir le seul souci de sauver l’arrêt de condamnation au fond, l’annulation risquant de tout remettre en cause, au détriment de la répression ? Cela n’aurait rien d’étonnant quand on connaît les réticences de la Chambre criminelle à admettre des causes de nullité de procédure et si l’on rapproche l’arrêt du 29 avril 1996 d’un autre rendu deux mois auparavant qui casse un arrêt de chambre d’accusation confirmant une ordonnance de non-lieu, au motif que l’un des conseillers de la chambre ayant rendu l’arrêt était le conjoint du substitut qui, au degré inférieur, avait requis en vue de l’ordonnance du juge d’instruction[158] ; laxisme et violation manifeste de l’article 6 §1 dans le premier cas, sévérité excessive dans le second puisqu’il ne s’agissait pas du même magistrat, ni des mêmes fonctions ; la cohérence de cette double jurisprudence ne doit-elle pas être recherchée ailleurs que dans l’appréciation de l’impartialité au regard de l’article 6 §1 (auquel cas il n’y a pas de cohérence), mais dans la constatation que la Chambre criminelle n’a qu’une politique pénale, à savoir la répression ? On remarquera que dans le premier cas la condamnation au fond est sauvée du risque d’annulation de la procédure et que, dans le second, le non-lieu est remis en cause...
            C’est encore l’appel contre une ordonnance de non-lieu qui a donné l’occasion à la Chambre criminelle de juger que des magistrats s’étant prononcés sur la recevabilité d’une plainte avec constitution de partie civile pouvaient ensuite faire partie de la composition de la même chambre lorsqu’elle est amenée à connaître de l’appel contre une ordonnance de non-lieu[159]. Décision critiquable car, en statuant sur cette recevabilité, les juges ont dû se demander quelles étaient la réalité du préjudice allégué et sa relation directe avec une infraction pénale, c’est à dire émettre une appréciation sur les faits[160].
3) En matière disciplinaire, les articles 181 et 189 du décret du 27 novembre 1991 relatif à la profession d’avocat, autorisent le Bâtonnier à saisir la juridiction disciplinaire, après avoir procédé à une enquête sur le comportement de l’avocat mis en cause et, ensuite, à présider cette juridiction. Le Conseil d’état n’y a vu aucune atteinte à l’équité du procès, ni aux principes d’indépendance et d’impartialité des juridictions, au motif que ces dispositions ne conduisaient pas le bâtonnier à exercer les fonctions du ministère public, ni à agir comme partie à l’instance[161]. Il n’est pas certain que la Cour européenne serait du même avis, compte tenu de ses propres critères quant à l’impartialité des juges et que l’on résume parfois par l’expression anglaise « justice must not only be done, it must also be seen to be done », apparue pour la première fois dans l’arrêt Delcourt c/ Belgique du 17 janvier 1970[162], à propos de la présence d’un avocat général au délibéré de la Cour de cassation. N’aurait-on pas pu concevoir que lorsque le Bâtonnier est à l’origine de la saisine de la juridiction disciplinaire, il désigne un membre du Conseil de l’ordre pour procéder à l’enquête sur le comportement et s’abstienne de présider, quitte à exercer devant celui-ci le rôle de poursuivant ?
4) En contentieux administratif, dans le prolongement de l’arrêt Procola c/ Luxembourg de la Cour européenne[163], le Conseil d’état a implicitement abandonné sa jurisprudence Gadiaga du 25 janvier 1980[164], dans un arrêt Syndicat des avocats de France du 5 avril 1996[165], à propos de la compatibilité entre un avis et un jugement émanant du même tribunal ; il ne reprend plus l’affirmation de 1980 selon laquelle le juge administratif peut statuer sur un recours pour excès de pouvoir formé contre une décision administrative, alors qu’il a préalablement donné un avis sur la légalité de cette décision ; il se contente, suivant en cela les conclusions de son commissaire du gouvernement, d’affirmer que les dispositions attaquées du code des tribunaux administratifs et des cours administratives d’appel « ne portent, par elles-mêmes, aucune atteinte aux principes généraux relatifs à la composition des juridictions », puisqu’il est vrai que ces dispositions laissent aux juridictions la possibilité de statuer dans une formation différente de celle qui a rendu l’avis. Dès lors que cette modalité est suivie, la condition d’impartialité est respectée.
b) La publicité des audiences
            C’est un principe fondamental que celui de la publicité des audiences, encore rappelé par la Cour européenne dans un arrêt du 24 nov. 1997, au motif qu’il convient de protéger « les justiciables contre une justice secrète échappant au contrôle du public[166] ». Mais cette garantie s’apprécie au regard de l’ensemble du procès mené dans l’ordre juridique interne et dépend des particularités de l’instance. Ainsi, un défaut de publicité en première instance peut être corrigé par « un organe judiciaire de pleine juridiction[167] ». Ces nuances laissent une marge d’appréciation non négligeable aux juridictions nationales.
1) Il est vrai que le Conseil d’état n’a pas, jusqu’à présent, souhaité consacrer la publicité des audiences en matière administrative comme une règle générale de procédure, mais des textes sont intervenus pour les médecins (décret n° 93-181 du 5 février 1993) et pour les chambres régionales des comptes et la Cour des comptes lorsqu’elles prononcent une amende à titre définitif (décrets des 23 août 1995 et 18 avril 1996). En outre, pour les juridictions administratives de droit commun, des textes imposaient le respect de cette publicité depuis fort longtemps (ordonnance du 2 février 1831 pour le Conseil d’état, décret du 31 décembre 1862 pour les Conseils de préfecture). La matière disciplinaire avait donné lieu à des difficultés devant le Conseil d’état, du fait du refus de celui-ci de reconnaître en cette matière le jeu de l’article 6 §1. Cette controverse est maintenant dépassée, le Conseil d’état s’étant finalement aligné, dans son arrêt Maubleu du 14 février 1996, sur la jurisprudence européenne reconnaissant ainsi l’applicabilité de l’article 6 §1 à ces procédures (v. supra, I, A, a).
            2) Quant à la Cour de cassation elle reconnaît, bien sûr, ce principe en matière civile et en matière pénale, d’autant plus que des textes internes le consacrent (article 22 du nouveau code de procédure civile, article 400 du code de procédure pénale pour les audiences du tribunal correctionnel, article 306 pour la Cour d’assises, article 535 pour le tribunal de police). Mais, en matière disciplinaire, la position de la Cour de cassation, reste moins catégorique que celle de la Cour européenne, même si la question a perdu de son intérêt en raison de textes qui ont réglé la question pour la discipline des avocats (décret du 27 novembre 1991) et celle des médecins (décret précité du 5 février 1993) :
- d’une part, elle a solennellement réaffirmé, en Assemblée plénière, que la publicité des débats ne constituait pas un principe général du droit, à propos de la discipline de magistrats consulaires[168] ;
- d’autre part, pour les avocats, antérieurement aux textes introduisant formellement cette publicité, elle avait considéré que les intéressés devaient la demander mais que le refus de la Cour de la leur accorder ne pouvait être motivé par des considérations générales sur la dignité de la profession d’avocat, ce qui était une manière de se plier à la jurisprudence européenne[169] ; le décret du 27 novembre 1991 reprend le principe d’une audience non-publique devant la Cour d’appel, sauf demande de l’intéressé (article 16) ;
- enfin, les différentes chambres de la Cour de cassation n’ont pas toujours la même position sur le sujet ; en matière de récusation de juges, la première chambre civile se prononce contre cette publicité[170], alors que la deuxième l’admet[171].
            c) La motivation des décisions
            Garantie d’un procès équitable, la Cour européenne admet cependant que le tribunal ne réponde pas d’une manière détaillée à chaque argument[172] et que l’étendue de cette obligation puisse varier selon la nature de la décision et doit s’analyser à la lumière des circonstances[173]. Garantie contre l’arbitraire, elle implique que les juges aient lu les pièces essentielles du dossier, condition qui a valu à la France une condamnation pour violation de cette exigence par la Cour de cassation elle-même, l’arrêt de rejet d’un pourvoi affirmant le contraire de ce que le requérant avait écrit dans ses écritures d’appel[174].
            Pour autant la Cour de cassation adopte quelques positions qui prêtent le flanc à la critique au regard de l’exigence de motivation :
- en matière civile, la deuxième chambre civile juge sans discontinuité que « l’utilisation, dans la rédaction d’une décision judiciaire, de motifs établis d’avance sur un formulaire n’est prohibée par aucun texte et ne saurait être considérée comme incompatible avec l’article 6 de la CEDH[175] ». Le recours à cette solution de facilité n’est sans doute pas la garantie que les juges auront étudié attentivement le dossier et elle devrait être condamnée par la Cour européenne si celle-ci était saisie de la question ;
- en matière disciplinaire, l’assemblée plénière elle-même n’échappe pas à la critique. Dans un arrêt du 1er juillet 1994[176], elle juge que « les décisions de la Commission compétente en matière de retrait ou de suspension de l’habilitation des OPJ n’ayant pas, en vertu de la loi, à être motivées sur le fond, n’enfreignent pas les principes généraux du droit, en ce qu’ils touchent notamment aux droits de la défense ». En quelque sorte, c’est parce que la loi ne dit rien que les principes généraux du droit ne sont pas violés ! Curieuse conception de la notion de principes généraux qui sont faits, au contraire, pour s’appliquer en l’absence de dispositions légales. Et c’est faire fi de l’arrêt précité de la Cour européenne rendu quelques semaines plus tôt, le 19 avril 1994, qui posait très clairement l’exigence d’une motivation, même si le tribunal n’a pas l’obligation de répondre à tous les arguments d’une manière détaillée ;
- en matière pénale, outre la pratique déplorable de ne pas motiver les jugements correctionnels tant qu’il n’a pas été fait appel de la décision, de telle sorte que l’intéressé ne connaît pas exactement ce qui est retenu contre lui[177], il faut citer un arrêt de la Chambre criminelle du 13 novembre 1996 qu’il faut rapprocher d’un arrêt d’Assemblée plénière rendu en matière de référé pour en apprécier la singularité. La Chambre criminelle juge que « les décisions des juridictions d’instruction, portant sur une demande de confrontation, ne relèvent que d’une appréciation des faits qui échappe au contrôle de la Cour de cassation »[178]. Oui... mais, le 28 juin 1996, l’Assemblée plénière juge qu’en matière de référé la Cour de cassation peut apprécier le caractère manifestement illicite ou non du trouble invoqué[179]. On est en droit de se demander si, de contentieux à contentieux, en comparant les deux décisions qui concernent toutes les deux l’appréciation de faits, la décision de la Chambre criminelle conduit à un procès équitable, globalement, au niveau de l’ensemble de la procédure, puisque la décision de la juridiction d’instruction sera souveraine et ne permettra pas à un accusé d’obtenir une confrontation.
Autre exemple de décision qui nous semble peu compatible avec l’exigence d’une motivation : un arrêt de la Chambre criminelle du 19 juin 1996, selon lequel l’article 206, du code de procédure pénale, n’impose pas à la Chambre d’accusation saisie de l’entier dossier, d’indiquer expressément, dans sa décision, qu’elle a examiné la régularité de la procédure qui lui est soumise[180]. Mais alors comment savoir, autrement que par une analyse minutieuse de l’arrêt, point par point, qu’elle l’a fait ?
iv - le droit fondamental à l’exécution d’une décision de justice et ses incidences en droit français
            En vingt-deux ans, entre l’arrêt Golder du 21 février 1975 et l’arrêt Hornsby du 19 mars 1997, la Cour européenne a finalement construit un droit au procès équitable extrêmement large, droit qui comprend désormais trois volets : celui de l’accès au tribunal (supra, II), celui d’une bonne justice (supra, III) et celui de l’exécution effective des décisions de justice. Ce droit à l’exécution n’a d’abord été envisagé que comme un aspect du délai raisonnable, ce dernier devant inclure la phase d’exécution du jugement[181]. Puis, la Cour a considéré que l’absence prolongée d’exécution de jugements d’expulsion de locataires engageait la responsabilité de l’Etat, pour violation du droit à un procès équitable[182]. La Commission a ensuite estimé que l’effectivité du droit à un recours juridictionnel supposait un droit à l’exécution des décisions de justice[183] ; son avis a été confirmé par arrêt de la Cour européenne le 19 mars 1997[184]. Dans cet arrêt  Hornsby c/Grèce qui fera date, la Cour consacre un véritable droit substantiel à l’exécution effective des jugements. La Cour européenne juge en effet que l’exécution d’un jugement ou d’un arrêt, de quelque juridiction que ce soit doit être considérée comme faisant partie intégrante du procès équitable au sens de l’article 6 §1 ; Le droit d’accès à un tribunal « serait illusoire si l’ordre juridique interne d’un état contractant permettait qu’une décision judiciaire définitive et obligatoire reste inopérante au détriment d’une partie. En effet, on ne comprendrait pas que l’article 6 §1 décrive en détail les garanties de procédure (équité, publicité et célérité) accordées aux parties et qu’il ne protège pas la mise en œuvre des décisions judiciaires ; si cet article devait passer pour concerner exclusivement l’accès au juge et le déroulement de l’instance, cela risquerait de créer des situations incompatibles avec le principe de la prééminence du droit que les états contractants se sont engagés à respecter en ratifiant la Convention....L’exécution d’un jugement ou arrêt, de quelque juridiction que ce soit, doit donc être considérée comme faisant partie intégrante du procès au sens de l’article 6 » (§ 40).
            Pour autant doit-on considérer avec nos collègues Olivier Dugrip et Frédéric Sudre que cet arrêt introduit « le doute sur la conformité des refus légaux de concours de la force publique[185] » et qu’il « paraît condamner les jurisprudences Couiteas et Cartonnerie Saint-Charles[186] », c’est à dire l’indemnisation pour faute lourde si le refus n’est justifié par aucun motif d’ordre public et l’indemnisation pour rupture de l’égalité des citoyens devant les charges publiques dans le cas contraire et si le préjudice né de l’inexécution présente les caractères de spécialité et d’anormalité exigés pour ce type de responsabilité ? Nous ne le pensons pas car, lorsque le refus de l’autorité administrative de donner suite à des demandes d’expulsion a été sanctionné par la Cour européenne, en raison de l’inertie de l’Administration compétente[187], c’est bien, au final, d’une responsabilité de l’état dont il s’est agi, c’est à dire d’une indemnisation par équivalent. Le fondement pourra en être l’article 6 §1 au lieu de la loi du 9 juillet 1991 (dont l’article 16 consacre les jurisprudence précitées) si la partie condamnée est une partie privée, ou des lois du 16 juillet 1980 et 8 février 1995 si cette partie est l’Administration, mais rien ne laisse penser qu’en cas de risque de troubles à l’ordre public et passé un délai raisonnable pour que l’Administration ait le temps d’envisager la situation et les mesures à prendre, celle-ci ait néanmoins l’obligation impérieuse de procéder à une exécution en nature. Dans l’arrêt Hornsby en effet, on conçoit que l’état grec n’ait bénéficié d’aucune cause d’exonération de son obligation d’exécution puisqu’il s’agissait de délivrer une autorisation d’ouverture d’une école à des ressortissants britanniques ; les troubles à la sécurité et à l’ordre public n’étaient pas en jeu et on comprend alors mieux la sévérité du considérant 41 de la décision : « en introduisant un recours en annulation devant la haute juridiction administrative de l’état, celui-ci vise à obtenir non seulement la disparition de l’acte litigieux, mais aussi et surtout la levée de ses effets. Or, la protection effective du justiciable et le rétablissement de la légalité impliquent l’obligation pour l’Administration de se plier à un jugement ou arrêt prononcé par une telle juridiction ». Considérer que l’arrêt « ne fait bénéficier l’état d’aucune cause d’exonération de son obligation d’exécution[188] », ne permet pas pour autant de remettre en cause les jurisprudences internes précitées car, en matière d’obligation de faire, nul ne peut être contraint d’exécuter, surtout pas lorsque l’ordre public et la sécurité sont en cause ; à l’impossible nul n’étant tenu, c’est bien en termes d’indemnisation, donc de jurisprudence Couiteas et Cartonnerie Saint-Charles qu’il faudra raisonner, même si l’arrêt Hornsby « élève l’exigence d’exécution en principe de l’état de droit ». Tout au plus pourra-t-on être plus sévère dans l’appréciation des causes d’exonération invoquées par l’état et accorder une indemnisation plus forte, ce que permet déjà l’article 16 de la loi du 9 juillet 1991, puisqu’il est rédigé en termes très généraux et parfaitement en harmonie avec l’arrêt Hornsby : « l’état est tenu de prêter son concours à l’exécution des jugements et des autres titres exécutoires. Le refus de l’état de prêter son concours ouvre droit à réparation ». En d’autres termes, le droit fondamental à l’exécution d’une décision de justice existe déjà en droit français, en conformité avec la jurisprudence européenne.
            S’il fallait conclure sur ce voyage d’un processualiste au pays du droit à un procès équitable, on pourrait dire que la jurisprudence française, souvent réticente à l’applicabilité de l’article 6 §1 de la Convention européenne, a finalement cédé sur l’essentiel, ses combats d’arrière-garde ne concernant plus que quelques aspects particuliers de cette garantie dans le déroulement de l’instance. Et, dans des domaines aussi essentiels à un état de droit que le droit d’accès à un tribunal, les droits de la défense et le droit à l’exécution d’une décision de justice, il n’est pas inexact d’affirmer que la garantie d’un procès équitable a bien la valeur d’un droit fondamental

III – LE PROCÈS ÉQUITABLE : GARANTIE FORMELLE OU DROIT SUBSTANTIEL ?
Conférence prononcée à la Cour de cassation le 8 mars 1997,
publiée aux mélanges Gérard Farjat, 1999 
Procès équitable : avant équitable il y a procès ; pourtant on chercherait vainement l’expression dans les anciens codes de procédure, qu’ils soient de procédure civile ou d’instruction criminelle, sans parler des textes qui régissaient le contentieux administratif. Le mot qui était davantage utilisé sous l’empire des grandes ordonnances royales, civile et criminelle, de 1667 et 1670, était celui d’équité, celle de nos Parlements bien sûr, dont Dieu devait nous garder, ... à côté de leur arbitraire. Le concept n’était pas formalisé et avait mauvaise réputation, ce qui explique sans doute que nous l’ayons enfoui au plus profond de nos institutions judiciaires ; on parlait plutôt d’une « équité arbitraire »[189] que d’un procès équitable ! Curieux glissement du vocabulaire juridique qui doit nous inciter à la prudence dans l’utilisation de cette expression et à rechercher le sens exact de l’équité pour mieux approcher l’équitable.
Les dictionnaires généraux, qu’ils soient anglais ou français, nous livrent deux sens de l’équité et conduisent progressivement au procès équitable :
- Dans le dictionnaire historique de la langue française,[190] l’équité est d’abord définie comme un emprunt savant (1262) au latin aequitas : égalité, équilibre moral, esprit de justice, dérivé de aequus, égal, d’où impartial. On retrouve cette notion d’égalité dans le dictionnaire anglais Collins[191] : la qualité d’être loyal et raisonnable d’une manière qui donne à chacun un traitement égal.
- Ces deux mêmes dictionnaires voient aussi dans l’équité, pour l’un « la juste appréciation de ce qui est dû à chacun, selon un principe de justice naturelle, parfois divine », pour l’autre, le principe qui fera d’un jugement un jugement loyal dans un cas où les lois existantes n’apportent pas de réponse satisfaisante à un problème[192]. C’est ici l’équité dont Philippe Jestaz nous dit[193] qu’elle serait tantôt désobéissance à la loi lorsque le juge écarte la règle de droit pour rendre un jugement « en équité », c’est à dire supposé plus juste que ne l’aurait permis l’application du droit strict, tantôt adaptation de la règle de droit à un cas particulier, tantôt expression d’une idée de justice comme fondement du droit.
Le Vocabulaire Henri CAPITANT[194], ne parle pas de l’équilibre, mais dégage cinq sens dont les quatre derniers peuvent être regroupés sous l’idée commune d’atténuation de la règle de droit par des considérations particulières, de dépassement du droit pour tendre à la justice, justice supérieure au droit positif ; l’autre sens serait l’égalité.
Dès lors, si l’on revient au procès équitable pour en faire une exigence, à quoi reconnaît-on qu’un procès donné l’a été ? Quel sens faut-il retenir de l’équité ?
            - S’il s’agit d’être juste dans le jugement rendu, chacun sait bien que l’application de la règle de droit s’accommode mal avec une équité qui serait conçue comme la recherche systématique de l’humain dans les conséquences que provoque toute décision de justice ; c’est cette recherche qui conduisit le Président MAGNAUD à n’être le « bon juge » de Château-Thierry que pour les justiciables, pas pour les juristes. L’équité, au sens de la « sensibilité généreuse et hardie », que dénonçait GENY chez ce juge n’a pas sa place dans la notion de procès équitable, car les bons sentiments en matière de justice, la sensiblerie, mènent au déséquilibre et à l’inégalité entre les justiciables. C’est le sens d’une jurisprudence constante : le juge ne peut se contenter de se référer à son « arbitraire », même en invoquant son souci d’apaisement et son impuissance à démêler l’affaire, pour condamner le débiteur à ne régler que la moitié de la somme déclarée[195] ; il ne peut pas non plus se fonder sur l’équité[196].
            - C’est donc davantage la racine equus, l’idée d’équilibre qu’il faut retenir pour comprendre ce que peut représenter aujourd’hui un procès équitable ; l’idée d’assurer à tout justiciable un tel procès, se rattache à la notion très générale et générique de garanties fondamentales d’une bonne justice, dont on trouve des illustrations dans le caractère public des audiences, dans l’exigence d’un tribunal indépendant et impartial, ou d’un délai raisonnable, etc.. Ce sont ces garanties qui assurent à chacun, dans un État de droit, le droit à un procès équilibré, je dirais loyal, tant il est vrai que l’on oublie trop facilement que, dans la version anglaise de l’article 6 de la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des libertés fondamentales, l’équivalent du mot français « équitablement », ce n’est pas « equity », mais « fair », ce qui, au moins pour un esprit continental, fait penser au légendaire fair play britannique ; en outre dans le 14ème amendement à la Constitution américaine figure l’exigence d’un procès loyal.
Cela ne signifie pas pour autant que l’idéal de justice soit absent car l’équité au sens d’un équilibre à réaliser, c’est aussi un idéal de justice ; c’est, selon l’heureuse expression d’Henri CAPITANT il y a maintenant 70 ans, « l’une des plus radieuses formules de justice dont on ait depuis la Grèce et Rome, illuminé l’espoir des sociétés modernes »[197]. Le procès équitable repose sur des garanties qui tendent à faire régner cet idéal de justice. Si l’équité dans le procès c’est l’équilibre, tendre à assurer le respect de celui-ci, c’est aussi veiller à promouvoir l’idéal de justice : « Amour et vérité se rencontrent, justice et paix s’embrassent »[198].
Les instruments d’approche du procès équitable sont internationaux[199] et, sans viser l’exhaustivité, on peut citer :
- d’abord l’article 10 de la Déclaration universelle des droits de l’homme du 10 décembre 1948, mais qui n’a que la valeur d’un idéal à défendre ;
- ensuite l’article 14 du Pacte international relatif aux droits civils et politiques du 19 décembre 1966 et, surtout, son protocole facultatif puisqu’il a permis les requêtes individuelles ; mais la jurisprudence de son organe de contrôle, le Comité des droits de l’homme des Nations Unies est peu étudiée par les juristes français, pour ne pas dire complètement ignorée d’eux, sans doute parce qu’environ les trois quarts des communications individuelles rendues jusqu’en juillet 1993 (sur 331) sur le fondement de l’article 14, concernaient la Jamaïque et l’Uruguay ; pourtant, une chronique est tenue à l’Annuaire français de droit international par l’un de nos collègues[200], et une décision récente concerne la France à propos de l’affaire Faurisson[201] ;
- surtout il faut retenir la Convention européenne de sauvegarde des droits de l’homme et des droits fondamentaux, avec son fameux article 6 §1et la jurisprudence qu’il a suscitée de la part des organes de la Convention, elle-même confrontée aux jurisprudences nationales.
- Avec l’entrée en vigueur du traité d’Amsterdam, il faudra vraisemblablement tenir compte de la future jurisprudence de la Cour de Luxembourg en matière de droits fondamentaux et s’attendre à un contrôle, par cette Cour, de ce que Frédéric Sudre vient de qualifier de « Charte communautaire des droits fondamentaux »[202].
Mais la nature internationale et conventionnelle de cet instrument, son origine culturelle davantage anglo-saxonne que continentale, la flexibilité du concept, son caractère flou issu d’une logique de gradation[203] qui n’est pas la logique juridique française, sans parler de l’impossibilité de recourir directement aux organes de la Convention jusqu’en 1981, éclairent tant l’explosion de cette garantie comme norme de référence d’une justice démocratique, sous les coups de butoir de la Cour européenne des droits de l’homme, qu’à l’inverse, les difficultés de son adoption en droit national, par les juridictions françaises.
- Hier, et jusqu’à ces dernières années, c’est en envisageant le droit à un procès équitable comme l’exigence d’une garantie formelle, celle de la simple régularité de la procédure, que les organes de la Convention ont pu, par une volonté créatrice peu commune et irrésistible, imposer aux autorités juridictionnelles nationales le respect des dispositions de la Convention et, surtout, leur propre jurisprudence. En quelques décennies, le procès équitable, véritable Univers en expansion (au sens de la théorie d’Einstein), est devenu une norme processuelle de référence qui envahit tous les contentieux, la garantie formelle de la régularité d’une procédure, la garantie que le procès sera joué loyalement, comme sur un terrain de jeu.
            - Mais aujourd’hui, le procès équitable c’est plus qu’une garantie formelle, c’est aussi, par une jurisprudence de plus en plus audacieuse de la Cour européenne des droits de l’homme, un enjeu substantiel et, à ce titre aussi, un droit fondamental qui tend à l’emporter sur toute autre considération. Cette évolution est encore peu perçue par les juristes, à l’exception de ceux qui suivent de très près la jurisprudence de la Cour[204], évolution dont les autorités françaises, tant législatives que juridictionnelles, n’ont pas du tout pris conscience ou n’ont pas encore mesuré l’importance de son impact sur notre système juridique. Nous sommes, sur ce terrain de l’enjeu substantiel, à la veille d’une révolution juridique considérable, d’une explosion comparable, pour reprendre la comparaison avec l’Univers, au big bang qui serait, selon les scientifiques, à l’origine du monde.
            - Demain en effet, le procès équitable, par le passage d’une fonction de garantie formelle à une fonction d’enjeu substantiel, deviendra l’instrument d’une prise de pouvoir politique par les organes de la Convention et, en raison du traité d’Amsterdam, par la Cour de justice de Luxembourg, le moyen pour eux, au-delà du combat pour la prééminence du Droit dans les États adhérents à la Convention et à l’Union européenne, d’assurer leur prééminence sur les autorités nationales et, au-delà, sur les organes exécutifs et législatifs du Conseil de l’Europe et de l’Union européenne. Le procès équitable va devenir un instrument de pouvoir.
C’est donc une approche en trois temps du procès équitable, de son rôle, que je me propose de dresser devant vous :
De garantie formelle (I), le droit à un procès équitable est devenu un enjeu substantiel (II), avant d’apparaître comme un instrument de pouvoir (III).


I - hier, GARANTIE FORMELLE
Le procès équitable, garantie formelle de la régularité d’une procédure, participe de l’effectivité des droits. « Pour réaliser la protection efficace des droits de l’homme, il ne suffit pas de consacrer des droits matériels. Encore faut-il des garanties fondamentales de procédure de nature à renforcer les mécanismes de sauvegarde de ces droits »[205]. Selon la formule célèbre de l’arrêt Airey, il s’agit « de protéger des droits non pas théoriques ou illusoires mais concrets et effectifs »[206].
            - Cette effectivité, les organes de la Convention l’ont considérablement accrue, tout au long des décennies qui viennent de s’écouler et, singulièrement, au cours des dernières années. Il est donc nécessaire de porter un premier regard, descriptif, sur leur jurisprudence pour connaître l’état du droit quant au domaine et au contenu de la garantie (A).
            - Il nous faudra ensuite comprendre, par un regard critique cette fois, pourquoi les juridictions nationales françaises hésitent, pour ne pas dire résistent, à reconnaître la garantie d’un procès équitable dans certaines hypothèses qui entrent pourtant dans le champ d’application de la Convention (B).
            - Enfin, soumettant certaines de nos règles procédurales à un regard prospectif, nous nous demanderons si elles n’exposent pas la France à des condamnations pour non respect du droit à un procès équitable, pour peu qu’un justiciable porte un jour ces questions devant les organes de la Convention ( C ).
A - REGARD DESCRIPTIF (sur la jurisprudence européenne)
            L’objet de ce regard n’est pas de reprendre en détail, point par point, toute la jurisprudence européenne qui s’est construite au fil des ans pour rendre effectifs les droits procéduraux des justiciables. Il s’agit plutôt d’en dégager les grandes tendances, qui peuvent se ramener à deux idées simples, comme d’autres l’ont déjà souligné[207] : l’extension considérable du domaine (1°) et la fortification de la garantie (2°).
            C’est au nom de l’autonomie des notions conventionnelles mais aussi en tenant compte de la globalité d’appréciation du caractère équitable du procès, que la Commission et la Cour ont construit le domaine positif et négatif de la garantie et fixé son contenu.
1°) L’extension du domaine de la garantie du procès équitable
Il convient d’en souligner à la fois les lumières, c’est à dire le domaine positif de la garantie (a) et les zones d’ombre, c’est à dire le domaine négatif, celui qui reste encore en dehors du champ d’application de l’article 6 (b).
a) Le domaine positif de la garantie
L’autonomie des notions conventionnelles par rapport aux qualifications retenues dans les États membres, a permis d’élargir considérablement le domaine de la garantie d’un procès équitable.
            Si le domaine de la garantie en effet, est limité par les termes de la Convention d’une part, « aux contestations sur les droits et obligations de caractère civil » et, d’autre part, « au bien-fondé de toute accusation en matière pénale », la Cour de Strasbourg a su habilement tirer parti du principe qu’elle a elle-même posé, de l’existence de notions autonomes, c’est à dire de notions qui sont définies par les organes de la Convention indépendamment des qualifications retenues en droit interne. Nous l’illustrerons par quelques exemples récents et démonstratifs, tirés de la jurisprudence européenne dans ces deux domaines.
            1) pour la première catégorie visée par la Convention dans l’article 6 (contestation portant sur un droit civil), la CEDH a précisé successivement la notion de « droit défendable » et celle de « décision déterminante pour l’issue portant sur un droit civil ».
            - la notion de droit défendable retenue par la CEDH soulève quelques difficultés : selon la cour en effet, « pour que l’article 6-1 sous sa rubrique civile trouve à s’appliquer, il faut qu’il y ait « contestation » [dispute dans le texte anglais] sur un droit que l’on peut prétendre, au moins de manière défendable, reconnu en droit interne. Il doit s’agir d’une contestation réelle et sérieuse : elle peut concerner aussi bien l’existence même d’un droit que son étendue ou ses modalités d’exercice.
            Il eût sans doute mieux valu que la CEDH utilisât le terme de droit « revendiqué » plutôt que reconnu ; cela lui aurait évité de se livrer à des analyses hasardeuses et peu opportunes parfois, des droits nationaux pour y trouver confirmation qu’un droit y est effectivement reconnu et non pas seulement revendiqué par le requérant.
            - la notion de décision déterminante pour l’issue du litige est aussi un moyen pour la CEDH de fixer arbitrairement son domaine d’intervention. Selon cette exigence en effet, il faut qu’un lien existe entre la décision attaquée au titre de la garantie du procès équitable et le droit substantiel revendiqué par les requérants ; cela laisse une marge de manoeuvre à la Cour et il semble se dessiner une distinction inquiétante entre les petits et les grands contentieux avec l’arrêt Bahmer-Schafroth c/ Suisse, du 26 août 1997 [208]: lorsque le contentieux est modeste la Cour est plus encline à y voir une décision déterminante pour la victime (permis de construire) ; lorsque le contentieux est très important, met en cause la souveraineté d’un état, l’interprétation est plutôt contra victima, ainsi du contentieux nucléaire dans l’affaire précitée. Selon que vous serez grand et puissant... !
            - Toutes les procédures dont l’issue est déterminante pour un droit civil sont donc soumises à l’exigence d’un procès équitable, quelle que soit la nature de la loi selon laquelle la contestation doit être tranchée (civile, commerciale, sociale, administrative) et quelle que soit la nature de l’autorité compétente en la matière, de droit privé ou de droit public :
·      l’application la plus célèbre concerne la procédure disciplinaire, la jurisprudence de la Cour européenne inaugurée le 23 juin 1983[209] ayant finalement fait céder la Cour de cassation le 10 janvier 1984[210] et le Conseil d’Etat le 14 février 1996[211].
·      le contentieux constitutionnel lui-même n’échappe pas à l‘exigence d’un procès équitable, la Cour de Strasbourg ayant jugé qu’une procédure de ce type relève de la garantie de l’article 6, lorsque, portée par voie d’exception préjudicielle (en Espagne), elle est déterminante pour les droits et obligations de caractère civil[212]. En outre, une divergence est apparue entre la Commission et la Cour quant à l’applicabilité de l’article 6 au contentieux français des élections parlementaires : pour la Commission la garantie d’un procès équitable est applicable lorsque l’inéligibilité est prononcée pour dépassement du plafond des dépenses électorales autorisées [mais pas lorsque cette inéligibilité est prononcée pour non-respect des règles substantielles relatives à l’établissement des comptes de campagne[213]] ; pour la Cour, dans l’affaire Jean-Pierre PIERRE BLOCH[214], jugée le 21 octobre dernier, l’article 6 est inapplicable à la procédure suivie devant le Conseil constitutionnel pour contester l’élection d’un député au motif qu’il s’agit d’un mandat « de caractère politique et non civil » et qu’il n’y a pas « d’accusation en matière pénale » :
       - la démonstration pour exclure le caractère civil n’est pas très convaincante, la Cour se livrant à de véritables contorsions sur l’enjeu patrimonial de la procédure litigieuse, la notion de patrimonialité comme critère d’identification de la matière civile. Elle commence par reconnaître que cette procédure avait un enjeu patrimonial puisque, d’une part, le candidat doit verser au Trésor une somme égale au montant du dépassement des dépenses autorisées si son élection est invalidée et que, d’autre part, le remboursement (total ou partiel) des dépenses retracées dans le compte de campagne n’est possible qu’après l’approbation de ce compte par la commission nationale. Mais la Cour ajoute aussitôt que cet « cet aspect patrimonial de la procédure litigieuse ne confère pas pour autant à celle-ci une nature civile au sens de l’article 6 §1 » ; en quelque sorte, la seconde n’est pas le corollaire inéluctable du premier pour la raison que « l’impossibilité d’obtenir le remboursement des dépense de campagne lorsqu’un dépassement du plafond est constaté et l’obligation de verser au Trésor public une somme équivalente à celui-ci sont les corrolaires de l’obligation de limiter les dépenses électorales ; comme celle-ci, elles relèvent de l’organisation de l’exercice du droit litigieux ». La Cour revient ainsi à son affirmation préliminaire de principe, sans rien ajouter d’autre qu’un argument de corrélation : le droit de se porter candidat à une élection à l’Assemblée nationale et de conserver son mandat est un droit de caractère politique, de sorte que ce qui relève de l’organisation de l’exercice de ce droit sort du champ d’application civil au sens de l’article 6 §1 ; les deux conséquences indiquées entrant dans cette organisation, elles sortent de l’applicabilité de l’article 6 car, bien que patrimoniales, elles ne sont pas civiles ; le politique exclut le civil et attrait à lui une patrimonialité pour la sortir du champ civil. L’affirmation relève plus de la pétition de principe que de la démonstration.
            - pour le volet pénal, la Cour européenne exclut de sa sphère l’inéligibilité et l’obligation de verser au Trésor une somme égale au montant du dépassement, par le moyen d’une analyse classique des trois critères de la matière pénale : la qualification juridique de l’infraction litigieuse en droit national ; la nature même de cette qualification ; la nature et le degré de sévérité de la sanction[215].
Toujours en matière constitutionnelle, la Cour vient de nuancer sa jurisprudence, en précisant que les exigences de l’article 6 ne peuvent s’apprécier de la même façon que devant une juridiction ordinaire, compte tenu du rôle et du statut d’une Cour constitutionnelle[216], notamment quant au respect du délai raisonnable.
·      Le contentieux de la fonction publique, subit les mêmes fluctuations que le contentieux électoral entre la Commission et la Cour. Celle-ci avait, initialement, fixé sa jurisprudence quant à l’applicabilité ou non de l’article 6 au contentieux de la fonction publique par la formule suivante : « les contestations concernant le recrutement, la carrière et la cessation d’activité du champ d’application de l’article6 » ; cela lui permettait de tenir compte de l’imperium de l’état, des prérogatives discrétionnaires de celui-ci pour rejeter l’application des garanties d’un procès équitable, dès lors que ces prérogatives étaient en cause. Cette même formule lui avait, à l’inverse, permis d’attraire à l’article 6, les contestations de pensions au motif qu’elles ne mettaient pas en cause les prérogatives de l’état, puisqu’elles visaient seulement à la revendication d’un droit strictement patrimonial, l’état étant ici comparé « à l’employeur partie à un contrat de travail régi par le droit privé »[217].
La Commission était allée au-delà en mettant l’accent sur le caractère patrimonial du litige et en retenant l’applicabilité de l’article 6 au contentieux du refus de réintégration d’un agent contractuel de droit public, maintenu en position de détachement sans traitement[218]. La Cour est d’un avis contraire et soustrait ce litige au jeu de l’article 6, au motif qu’il s’agissait avant tout d’un refus de réintégration entrant dans le champ d’application de la formule précitée sur le « le recrutement, la carrière.. » ; la demande indemnitaire du requérant n’est que la conséquence du refus de réintégrer et n’entraîne pas que le litige porte sur un droit civil[219]. La Commission s’est alignée sur cette jurisprudence tout au long de l’année 1997[220].
·      Le contentieux de droit public, hors champ de la fonction publique, n’échappe pas à cette extension de la garantie d’un procès équitable ; ce sont les jurisprudences Périscope et Procola :
- la première, qui concernait la France, attrait dans le champ des obligations à caractère civil, du fait de leur caractère patrimonial, les recours en indemnité contre l’administration pour faute de celle-ci, dans le refus, discriminatoire, d’avantages fiscaux et postaux (à une entreprise de presse)[221] ;
- la seconde, qui concernait le Luxembourg, attrait dans le domaine de la garantie le contentieux de l’excès de pouvoir, tout au moins si le litige concerne l’activité économique du demandeur, dès lors que ce litige avait des « répercussions » sur le droit de caractère patrimonial, sans exiger qu’il ait des « conséquences déterminantes » sur ce droit[222].
·      Le contentieux social, qu’il s’agisse des aides ou des cotisations entre aussi dans le champ d’application de l’article 6, tout au moins si les aspects de droit privé l’emportent sur ceux de droit public[223]. Ce contentieux subit l’emprise croissante de l’article 6, mais si la Cour entend bien l’assujettir à ce texte elle va mesurer, peser, la part respective des éléments relevant du droit public et ceux relevant du droit privé, dans la nature juridique de l’obligation, pour se déterminer. En procédant ainsi elle donne tout son sens à l’étymologie d’équitable, puisque la racine equus évoque l’égal, l’équilibre.
·      Le contentieux fiscal échappe en principe au domaine de la garantie en matière civile (v. infra, b, 2), mais la restitution de sommes versées au trésor public au titre de l’impôt sur le revenu entre dans le champ d’application de l’article 6, la nature patrimoniale de l’action en restitution étant certaine[224].
·      La constitution de partie civile, bien que portée devant une juridiction répressive et comportant un aspect de vindicte, relève de la matière civile conventionnelle, car elle correspond à un « droit à l’indemnité » qui dépend de l’issue de la plainte[225] ; pour la même raison mais appliquée à l’envers, si cette constitution de partie civile n’a pas en vue une réparation pécuniaire, elle échappe à la garantie (v. infra, 2°).
·      Enfin, la garantie a été étendue à la phase de l’expertise technique dans le contentieux administratif[226].

             Au final, la matière civile au sens de l’article 6 s’est considérablement développée ces dernières années, en raison :
- d’une part, de la prise en considération de plus en plus forte du caractère personnel et patrimonial de la réclamation dans la détermination du caractère civil de la contestation,
- et, d’autre part, de l’idée que l’intervention de la puissance publique n’est pas exclusive de ce caractère civil, qu’il y a place pour une contestation de caractère civil en concours avec cette intervention, dès lors que l’on n’est pas au cœur du pouvoir discrétionnaire de l’administration. On retrouve, au niveau européen, la notion bien française d’actes d’autorité, de prérogatives de la puissance publique.
            2) la matière pénale a subi le même type de démarche. Appartiennent désormais à cette matière, par la méthode de l’autonomie des concepts, toutes les sanctions qui, sans se fondre dans le moule strict d’un droit pénal national, présentent les caractéristiques de sanctions pénales ; une matière peut ne pas être pénale au sens d’un droit national, mais le devenir au sens de l’exigence d’un procès équitable formulée à l’article 6 de la Convention, dès lors que certaines caractéristiques, certains réactifs, prédominent. Afin d’éviter une « babélisation » de la notion de matière pénale, variable selon les États membres, la Cour de Strasbourg a autonomisé cette notion en droit européen.
·      C’est la fameuse méthode du faisceau d’indices qui a attrait successivement à la matière pénale, à la notion d’accusation au sens de l’article 6, pour ne retenir que les exemples les plus récents :
- les pénalités fiscales qui ont un caractère « essentiellement punitif et dissuasif[227] » comme celles de l’article 1729 du CGI[228] ou celles de l’article 1840 N quater du CGI[229], mais pas celles qui tendent à la réparation pécuniaire d’un préjudice ; à ces occasions la Cour a précisé que le critère de la nature de l’infraction et celui du degré de gravité de la sanction étaient des critères « alternatifs et non cumulatifs », mais l’approche cumulative est possible si l’analyse de chaque critère ne permet pas d’aboutir à un conclusion claire[230].
- les sanctions douanières[231] ;
- les sanctions disciplinaires[232],
- la contrainte par corps[233]
- et, selon la Commission et elle seule, « eu égard à leur nature et à leur degré de sévérité », les sanctions pécuniaires prononcées à l’occasion de délits d’audience[234]. Mais la Cour européenne des droits de l’homme est revenue sur cette solution de la Commission dans son arrêt du 22 février 1996, en relevant toutefois que « le genre de comportements prohibés pour lesquels le requérant s’est vu infliger les amendes sont en principe du domaine de l’article 6 » ; c’est en raison du troisième critère, celui de la gravité de la sanction que la Cour européenne ne retient pas l’applicabilité de l’article 6[235].
·      Parmi les indices de la matière pénale c’est incontestablement celui de la gravité de la sanction encourue qui joue un rôle déterminant, ainsi en matière de sanctions des délits d’audience. Ainsi, dans l’arrêt Putz précité du 22 février 1996, la Cour européenne relève que les peines d’amende n’étaient convertibles en peine de prison qu’en cas de non-paiement, avec appel possible et que la durée maximale de la détention était de 10 jours.
·      La jurisprudence française et celle de la Cour européenne divergent quant à l’application de l’article 6 et de la garantie d’un procès équitable à la phase de l’instruction. Alors que la Cour de cassation semble considérer, dans un arrêt de 1993[236], que cette garantie et ce texte ne s’appliquent pas à cette phase, bien que les droits de la défense y soient très présents, la Cour européenne a jugé que les exigences de ce droit à un procès équitable pouvaient être invoquées par « tout accusé », avant la saisine du juge au fond « si et dans la mesure où leur inobservation initiale risque de compromettre  gravement la caractère équitable du procès » ; en conséquence, la Suisse fut sanctionnée pour absence de l’avocat lors de l’instruction préparatoire[237]. D’une manière plus générale, l’accusation commence en matière pénale, selon la Cour[238], avec la notification officielle du reproche d’avoir accompli une infraction pénale ou, selon la Commission[239], au moment « de répercussions importantes sur la situation du suspect ». Et pour la Cour, « il existe un lien trop étroit entre l’appréciation de la nécessité de la détention et celle - ultérieure - de la culpabilité pour que l’on puisse refuser la communication de pièces dans le premier cas, tandis que la loi l’exige dans le second... Faute d’avoir garanti l’égalité des armes, la procédure n’a pas été contradictoire »[240].
·      L’extension la plus considérable du droit à un procès équitable en matière pénale est sans doute celle qui a concerné, au nom du respect de la présomption d’innocence visée à l’article 6 §3, les accusations portées par toute autorité publique contre quelqu’un. C’est l’arrêt Allenet de Ribemont du 10 février 1995 qui condamne la France pour les propos tenus par son ministre de l’intérieur de l’époque, au cours d’une conférence de presse, à l’encontre d’une personne présentée comme l’instigateur d’un meurtre, alors qu’elle n’avait pas encore été inculpée, mais simplement gardée à vue[241]. On sort du Palais pour atteindre les procès hors les murs[242].
·      Dans le même ordre d’idée, une assignation à comparaître comme témoin peut s’analyser en une « accusation » au sens de l’article 6 §1[243], l’accusation se définissant comme « la notification officielle émanant de l’autorité compétente, du reproche d’avoir accompli une infraction pénale[244] ».

b) Le domaine négatif, en creux, de la garantie d’un procès équitable, tient lui aussi aux critères d’application de l’article 6 que nous venons d’indiquer, quant aux obligations de caractère civil ou quant à la notion d’accusation en matière pénale.
L’autonomie des notions conventionnelles ne permet pas de tout attraire au procès équitable.
Restent finalement en dehors de l’emprise de l’article 6, en zone d’ombre en quelque sorte, les procès qui, soit mettent en cause l’imperium de l’administration soit pour lesquels le caractère patrimonial de la contestation n’est pas considéré comme suffisant :
1) l’imperium de l’administration peut faire échec à la garantie d’un procès équitable :
·      Il en est ainsi, pour le Conseil d’Etat tout au moins, des litiges relatifs à l’acquisition de la nationalité française[245] ou de ceux ayant trait à la reconduite d’un étranger à la frontière[246].
·      En matière fiscale, la Cour[247] ne soumet pas à l’article 6, contrairement à la Commission[248], la phase précontentieuse devant la commission des infractions fiscales, dont l’avis lie le Ministre des finances, puisque, s’il est favorable, il doit engager des poursuites. La Cour ne rejette pas, dans son principe, l’applicabilité de l’article 6 aux procédures suivies devant cette commission, mais elle évite de se prononcer sur le respect du contradictoire durant cette phase, en retenant la conventionnalité de la procédure prise « dans son ensemble » et en concluant à la non-violation de l’article 6.
·      On peut aussi rattacher à ce critère l’exclusion par la Cour des délits d’audience (v. supra).
·      Un doute subsiste encore pour l’applicabilité de l’article 6, volet pénal, aux investigations menées par des organes administratifs dans le domaine du droit économique[249].

            2) L’insuffisance du caractère patrimonial de la contestation constitue le second critère d’exclusion de la garantie
*                    La constitution de partie civile, en principe soumise aux exigences d’un procès équitable (v. supra), y échappe, selon la Cour européenne, dès lors que la victime de l’infraction ne fait pas valoir son droit à l’obtention d’une réparation pécuniaire, se contente de rechercher l’établissement de la culpabilité de l’accusé. L’issue de la procédure n’apparaît pas alors comme déterminante pour un droit de caractère civil[250].
*                    Le contentieux fiscal lui-même n’est pas attrait tout entier dans le champ d’application de la garantie d’un procès équitable. Si les sanctions fiscales peuvent être considérées, sous certaines conditions, comme ressortissant à la matière pénale, à la notion d’accusation, le volet civil échappe, en principe, à la notion de contestation civile au sens de l’article 6, la Commission comme la Cour étant opposées à la soumission du contentieux fiscal de l’imposition à ce texte[251]. Néanmoins, un litige fiscal peut ressortir pour partie à la matière pénale et pour partie à la matière civile, au sens de l’article 6[252].

2°) Le contenu de la garantie a été marqué par quelques décisions récentes, extrêmement importantes.
            Les illustrations du droit à un procès équitable sont très nombreuses au niveau de la Commission ou de la Cour européennes. Il est hors de question de les traiter toutes ici. En revanche, il nous a paru utile de mettre l’accent sur les décisions les plus récentes qui révèlent une attention toute particulière aux règles suivies dans les contentieux devant les cours suprêmes (a), mais applicables aux autres juridictions (b) et sur les méthodes suivies par les organes de la Convention pour apprécier le respect de l’équité dans une procédure ( c ).
a) Curieusement en effet, de nombreuses décisions concernent la procédure suivie devant les Cours suprêmes nationales, comme si les justiciables souhaitaient soumettre au feu de la Cour européenne l’activité de leurs propres gardiennes des droits garantis par la Convention.
            Si l’on essaye de comprendre la jurisprudence européenne et de la synthétiser, on peut la présenter selon les principes que la Commission et la Cour souhaitent protéger.
1) Premier principe, très en mode aujourd’hui pour les Cours suprêmes, celui de l’égalité des armes, à propos du contradictoire :
·      Ainsi, c’est au nom de l’égalité des armes, expression du droit à un procès équitable, que la Cour a décidé, dans deux arrêts du 20 février 1996, que « l’impossibilité pour une partie de prendre connaissance de l’avis du Ministère public et de répondre à ses conclusions avant le prononcé de l’arrêt, a méconnu son droit à une procédure contradictoire »[253]. Il s’agissait de la Cour suprême du Portugal et de la Cour de cassation belge. Par ces mêmes arrêts, la Cour abandonne l’exigence de la double condition pour sanctionner la violation du droit à un procès équitable ; il n’est plus besoin qu’à la fois le Ministère public n’ait pas transmis ses conclusions et ait participé au délibéré, même à titre consultatif ; il suffit qu’il n’ait pas transmis ses observations à la partie pour qu’il y ait violation du principe de l’égalité des armes. En l’occurrence la Cour ne doute pas que le Ministère public belge près la Cour de cassation soit un magistrat indépendant, impartial et objectif mais, dans la mesure où il émet un avis qui est destiné à influencer la Cour, les parties doivent en avoir connaissance. Ce n’est pas son objectivité qui est en cause mais le contradictoire qui doit être respecté entre toutes les parties. La Cour européenne va donc au-delà de la jurisprudence Borgers c/ Belgique en matière pénale, puisqu’il n’est plus nécessaire que le Parquet soit considéré comme l’allié ou l’adversaire de la partie (selon qu’il demande sa relaxe ou sa condamnation) ; jurisprudence confirmée le 25 juin 1997[254]. Mais la réserve introduite par la Cour européenne contient en elle-même la possibilité d’échapper à la critique de ne pas respecter le contradictoire ; il suffira que la partie ait été en mesure de déposer des notes en délibéré pour répondre au Parquet, pour que la France échappe à une éventuelle condamnation de ce chef[255].
·      On rapprochera de ces deux décisions celle rendue deux jours plus tard, le 22 février 1996, qui reprend la même solution en matière pénale[256].
2) Le contradictoire est affirmé par la Cour comme un droit à caractère fondamental : c’est la procédure suivie devant le Tribunal fédéral suisse qui donne la mesure de la force de ce principe en droit processuel européen ; le droit suisse connaît une pratique qui permet à la juridiction dont la décision est attaquée, de présenter ses propres observations. Pour la Cour européenne, il n’y a pas là atteinte à l’égalité des armes car « cette juridiction indépendante ne saurait passer pour l’adversaire de l’une des parties », mais « la notion de procès équitable implique aussi en principe le droit pour les parties à un procès de prendre connaissance de toute pièce ou observation présentée au juge et de la discuter »[257].
3) Le droit à l’assistance à un avocat, droit à caractère constitutionnel, est affirmé au niveau des cours suprêmes, la France ayant été condamnée pour refus du Président de l’ordre des avocats aux conseils de commettre d’office un avocat alors même que la procédure était dispensée de représentation obligatoire[258]. Depuis, la Cour de cassation, en Assemblée plénière, a affirmé le droit à l’assistance d’un défendeur pour faire valoir ses droits dans les conditions d’un procès équitable, mais sans faire référence à la norme européenne; en effet, la Cour de cassation se fonde sur le caractère constitutionnel du droit fondamental de toute personne à l’assistance d’un défenseur[259]. Ce n’est finalement que l’application en cassation d’un principe valable pour toutes les juridictions, puisqu’il déjà été jugé que  « le droit à un procès équitable commande d’accorder au requérant l’assistance gratuite d’un avocat en cause d’appel »[260] 
4) Les organes de la Convention ont aussi sanctionné l’erreur de fait commise par la Cour de cassation dans l’examen d’un moyen soulevé par une partie en considérant qu’elle constituait une violation du procès équitable, dans la mesure où elle avait conduit la Cour de cassation a rejeté le pourvoi ; la Cour européenne a donné acte à la France le 31 janvier 1996 qu’elle avait accepté l’indemnisation de 150 000 F proposée par la Commission (affaire Fouquet). La motivation de l’avis et de l’arrêt est sévère pour la Cour de cassation française : « l’obligation de motivation perd tout son sens si la motivation elle-même démontre que les juges n’ont pas lu les pièces essentielles du dossier[261].
5) Les conditions d’accès à la Cour de cassation ou au Conseil d’Etat ont permis à la Cour européenne ont permis de préciser quatre  aspects:
·      d’abord, que la motivation des décisions de la Commission d’admission des pourvois devant le Conseil d’Etat n’apparaît pas  contraire aux exigences d’un procès équitable pour la Commission européenne, dès lors qu’elle est fondée sur l’un des motifs prévus par le texte applicable à cette procédure[262].
·      Ensuite en matière pénale, La France, cette fois, a été condamnée, le 17 décembre 1996, parce qu’aucun délai n’est imparti, en cette matière pour produire un mémoire ampliatif devant la Cour de cassation et qu’en l’espèce, le requérant, faute d’avoir été avisé de la date de l’audience, n’avait présenté ses observations que huit jours après le rejet du pourvoi. La Cour développe l’idée qu’il faut tenir compte du rôle joué par la Cour de cassation, des particularités de la procédure, pour en tirer une décision de condamnation[263].
·      En matière civile, la Cour européenne a eu l’occasion de dire si l’irrecevabilité du pourvoi en cassation, relevée d’office sur la base de l’article 979 du nouveau Code, pour défaut de production de la décision attaquée, est ou non contraire aux exigences d’un procès équitable. La Cour européenne ne le pense pas, dans sa décision du 23 octobre 1996 en raison d’une part, de la prise en considération des particularités de la procédure sur l’ensemble du procès et le rôle qu’y a joué la Cour de cassation, les conditions de recevabilité d’un pourvoi pouvant être plus rigoureuses que pour un appel (§ 45), et, d’autre part, de la spécificité du rôle joué par la Cour de cassation dont le contrôle est limité au respect du droit, le formalisme pouvant dès lors être plus grand que dans une procédure sans représentation obligatoire (§ 48) ; enfin, la Cour ne manque pas de souligner à nouveau (§ 48 in fine) que la procédure en cassation succédait, en l’occurrence, à l’examen de la cause de la requérante par un tribunal de commerce puis une cour d’appel, tous deux disposant de la pleine juridiction[264]. Il est probable que le fait qu’il s’agissait d’une procédure avec représentation obligatoire a beaucoup joué, car le premier devoir d’un auxiliaire de justice n’est-il pas de connaître les textes et la jurisprudence y afférent ? Or, ici, cette jurisprudence était accessible aisément.
·      Toujours au niveau des Cours suprêmes, on se contentera de signaler que la Commission considère que l’article 1009-1, NCPC, n’est pas contraire aux exigences du procès équitable[265].
b) Les mêmes principes s’appliquent, a fortiori, devant les juridictions inférieures :
La communication aux parties des observations remises à une cour d’appel par le Parquet général, dans le cadre d’une procédure d’indemnisation pour détention provisoire injustifiée s’impose car « le droit à une procédure contradictoire implique, pour une partie, de prendre connaissance des observations ou pièces produites par l’autre, ainsi que de les discuter. Peu importe, à cet égard, que l’affaire relève du contentieux civil, car il ressort de la jurisprudence en la matière que les exigences découlant du droit à une procédure contradictoire sont en principe les mêmes au civil comme au pénal »[266].
égalité des armes encore dans un arrêt du 18 mars 1997, une personne ayant été invitée à comparaître par voie de citation directe devant le tribunal de police, sans avoir pu prendre connaissance du dossier ; en effet, le Procureur refuse de lui donner accès au dossier, au motif que seul un avocat peut avoir accès direct à un dossier pénal, alors que l’intéressé avait décidé de se défendre seul. La Chambre criminelle française rejette le pourvoi et la France est condamnée par la Cour européenne : « il est important pour le requérant d’avoir accès à son dossier et d’obtenir la communication des pièces le composant, éléments d’une bonne défense, afin d’être en mesure de contester la procès-verbal dressé à son encontre et sur lequel repose exclusivement sa condamnation »[267].
Enfin le 23 octobre 1996, la Cour européenne avait rappelé que l’exigence de l’égalité des armes « vaut aussi dans les litiges opposant des intérêts privés ; elle implique alors l’obligation d’offrir à chaque partie une possibilité raisonnable de présenter sa cause, y compris ses preuves dans des conditions qui ne la placent pas dans une situation de net désavantage par rapport à son adversaire. Une différence de traitement dans l’audition de témoins peut donc être de nature à enfreindre ledit principe »[268].
c) Les méthodes d’appréciation des organes de la Convention méritent d’être soulignées[269]
1) Le contrôle européen de la qualification de la loi nationale se réalise par des notions autonomes, indépendantes des qualifications nationales et les organes européens contrôlent non seulement la matérialité des faits, mais aussi la finalité de la mesure prise, l’effectivité de la garantie et la proportionnalité des atteintes légitimes à certaines libertés[270].
2) En deuxième lieu, la Commission et la Cour ne se contentent jamais d’un examen formel du respect de chacune des garanties énumérées à l’article 6. Une décision peut être sanctionnée pour procès non équitable, alors même que toutes les garanties formelles auraient été respectées ; ainsi de l’obligation de motiver les décisions de justice[271].
3) En troisième lieu, c’est l’ensemble de la procédure qui permet d’apprécier et de retenir le caractère équitable du procès au niveau de celles-ci. La Commission et la Cour se livrent en effet, à une approche globale du procès équitable, ne se contentant jamais d’un seul stade de la procédure. Il faut soupeser l’ensemble du procès, rejoignant ainsi l’étymologie du mot équité, aequus signifiant équilibre, un peu comme la pesée des âmes dans la mythologie égyptienne.
4) Enfin, la Cour affirme le principe de l’indivisibilité des garanties du procès équitable en matière pénale : « les exigences générales d’équité consacrées à l’article 6 s’appliquent aux procédures pénales concernant tous les types d’infractions criminelles de la plus simple à la complexe »[272].
            Avec de telles méthodes d’interprétation on est loin du raisonnement juridique traditionnel français, qui ne se satisfait guère de pesées ! Nous sommes dans une autre logique, celle des concepts flous ou « logique de gradation » comme le relevait un auteur[273] il y a bientôt dix ans. Tout n’est pas tranché en droit européen ; on peut appartenir à deux catégories à la fois. C’est une démarche pragmatique, anglo-saxonne certainement, à laquelle nous devons nous habituer. Est-ce cette difficulté à adopter cette logique qui explique les réticences des juridictions françaises à appliquer la garantie d’un procès équitable ?
B - REGARD CRITIQUE (sur la jurisprudence française)
            à côté de quelques avancées spectaculaires quant à la qualification de droits fondamentaux pour certains aspects du droit à un procès équitable, essentiellement le droit d’accès à un tribunal, la Cour de cassation française est plutôt très en retard dans l’application de la jurisprudence européenne, dans la garantie d’un procès équitable. Pour tout dire, elle traîne les pieds et n’avance que contrainte et forcée.
            Les réticences de la jurisprudence française quant au contenu de la garantie d’un procès équitable contrastent singulièrement avec la jurisprudence de la Cour de Strasbourg et placent la France en situation difficile par rapport aux exigences du procès équitable, quel que soit le type de contentieux. Et nous ne partageons pas sur ce point l’opinion et l’optimisme de notre collègue M. le Professeur Gérard Cohen-Jonathan qui voit « de larges convergences entre la Cour de cassation et la jurisprudence européenne sur le droit à un procès équitable »[274]. Certes, de nombreux arrêts sont compatibles avec les exigences du procès équitable au sens de la Convention, sans d’ailleurs qu’il soit nécessaire que l’article 6 §1 figure au visa des arrêts, mais comme le note M. Cohen-Jonathan lui-même, les « convergences avec la Cour européenne pourraient être plus prononcées ». Outre les condamnations de la France déjà signalées, on s’interrogera à titre critique sur les résistances ou les probabilités fortes de condamnation de la France pour violation de l’article 6 § 1 les plus criantes.
a) C’est la jurisprudence de la chambre criminelle qui pose le plus de problèmes,
- d’une part parce qu’en matière pénale les décisions de justice mettent toujours en cause la liberté et l’honneur des justiciables, quel que soit le niveau de juridiction ;
- d’autre part, parce que la motivation est le plus souvent très elliptique, du style « attendu que ...telle règle, telle pratique, n’est pas contraire à l’article 6 de la Convention ». Une telle motivation par pétition de principe tranche singulièrement avec les arrêts, fortement étayés de solides arguments juridiques, de la Cour européenne. La comparaison des deux types de décisions offre un contraste frappant.
            1) L’exemple de résistance le plus fort est celui de la juriprudence de la Chambre criminelle qui refuse de se soumettre à la décision de condamnation de la France par la Cour européenne le 23 novembre 1993. Il s’agit de la jurisprudence Poitrimol en matière pénale lorsque le prévenu est jugé par défaut et qu’il lui est refusé le droit de se faire représenter par un avocat; condamné, au motif que la représentation ne saurait s’appliquer aux prévenus en fuite, son pourvoi est déclaré irrecevable, parce qu’un condamné n’ayant pas obéi à un mandat d’arrêt n’est pas en droit de se faire représenter. Telle est du moins l’opinion de la Cour de cassation, condamnée par la Cour européenne qui y voit une atteinte au procès équitable, la sanction étant disproportionnée. La Chambre criminelle a maintenu sa position par des arrêts des 19 janvier et 15 février 1994, 8 mars et 21 juin 1995. De son côté la Cour européenne a maintenu sa position en condamnant la Hollande[275]. Il est vrai que pour la Chambre criminelle, la situation de la victime doit aussi être envisagée (en l’occurrence la mère privée de son enfant, le père de celui-ci, prévenu de non-représentation d’enfant, étant en fuite. La jurisprudence de la Cour européenne n’est pas acquise à l’unanimité de ses membres, des opinions dissidentes s’étant manifesté.
            2) Pour s’en tenir aux seules années 1996 et 1997 et sans que l’inventaire soit exhaustif, les arrêts suivants, dans l’ordre chronologique retiennent l’attention :
·      l’arrêt du 13 février par lequel la Chambre criminelle[276] affirme que « l’article 63-4, CPP, qui impose à l’officier de police judiciaire d’informer, par tous moyens, le bâtonnier, que la personne gardée à vue demande à s’entretenir avec un avocat désigné d’office, lorsque vingt heures se sont écoulées depuis le début de celle-ci, ne lui fait pas obligation de rendre effectif l’entretien avec cet avocat ». La formule est audacieuse, surtout avec l’allusion au caractère effectif du droit, quand on sait que la Cour européenne s’attache essentiellement au caractère effectif des droits, même s’il est vrai que certains barreaux sont bien négligents sur la présence de quelqu’un derrière le poste téléphonique dont ils donnent le numéro ! Faut-il rappeler ici la célèbre formule de l’arrêt Airey du 7 octobre 1979 : « la Convention protège des droits, non pas théoriques ou illusoires, mais concrets et effectifs » ? Le contrôle d’effectivité constitue « l’inspiration maîtresse de la jurisprudence européenne ». Si l’on compare l’attendu de l’arrêt du 13 février 1996 avec une autre situation, déjà soumise à la CEDH, on peut penser que la Chambre criminelle a été bien imprudente à utiliser cette formule ; voici ce que décidait la Cour européenne dans l’affaire Artico c/ Italie, le 13 mai 1980, à propos de l’impéritie d’un avocat désigné d’office : « deux solutions s’offrent aux autorités compétentes : remplacer (l’avocat d’office) ou l’amener à s’acquitter de sa tâche... Elles en ont choisi une troisième, la passivité, alors que le respect de la Convention appelait de leur part des mesures positives »[277]. La comparaison par citation se passe de commentaires.
·      Un arrêt du 29 avril est encore plus surprenant car l’affaire mettait en cause un membre important du corps judiciaire. Un président de Chambre d’accusation accomplit, ainsi qu’il y est autorisé dans certains cas, certains actes d’instruction ; un recours en annulation est présenté devant la Chambre d’accusation dont il est le président ; il ne soupçonne en lui aucune cause pouvant laisser suspecter son impartialité puisqu’il ne s’abstient pas de présider (ce qui laisse songeur sur sa conception de l’impartialité pour quelqu’un qui occupe une fonction aussi importante pour la protection de la liberté individuelle...) ; il statue donc sur la régularité de ses propres actes ; pourvoi en cassation ; rejeté au motif « qu’aucune règle légale ou conventionnelle ne fait obstacle à ce que la Chambre d’accusation apprécie la régularité d’actes d’instruction effectués par un de ses membres, sa décision, qui ne préjuge pas de la culpabilité des personnes poursuivies, relevant du contrôle de la Cour de cassation... »[278]. C’est un peu court, puisque la Chambre criminelle se contente d’affirmer une évidence - le droit de contrôle de la Chambre d’accusation sur les actes accomplis par l’un de ses membres - en occultant l’essentiel, à savoir, qu’en l’espèce, celui qui avait accompli les actes soumis au contrôle de la Chambre, participait à la formation de la Chambre qui en appréciait la régularité. Quant à la seconde partie de l’attendu elle est sans lien avec la question posée et qu’il n’est dit nulle part que le droit à un tribunal impartial, donc à un procès équitable, est limité aux hypothèses où le tribunal statue sur la culpabilité !
·      Par trois arrêts rendus le 26 juin 1996, la Chambre criminelle décide, qu’en matière de permis à points, l’automobiliste renonce à la garantie du procès équitable en acceptant de payer l’amende forfaitaire[279]. C’est le problème plus général de l’applicabilité de l’article 6 §1 aux mesures de retrait de points du permis de conduire[280]. L’harmonisation entre la position des juridictions nationales et celle de la Cour européenne n’est pas encore réalisée en ce domaine, mais la question n’est pas tranchée définitivement. En réalité le problème se dédouble :
- Il y a d’abord celui du retrait de points, prononcé par le juge pénal, suite à une condamnation principale. Le Conseil d’état[281] et la Cour de cassation[282] convergent pour considérer, d’une manière constante, que ce retrait ne présente pas le caractère d’une sanction pénale accessoire à une condamnation, bref qu’il n’y a pas « matière pénale » au sens de l’article 6 §1. La mesure serait donc purement administrative et la garantie d’un procès équitable n’aurait pas lieu de s’appliquer ici. Mais dans cette hypothèse, la Commission a donné son avis le 29 mai 1997 et a reconnu l’applicabilité de l’article 6 §1 aux mesures de retrait de points du permis de conduire, compte tenu de la nature et du degré de gravité de cette sanction[283]. Il s’agit bien d’une accusation en matière pénale. Pour autant - et malgré l’opinion dissidente de neuf commissaires dont le commissaire français M. J.- Cl. Soyer - la Commission considère que dans une telle hypothèse, le retrait des points étant la conséquence de la décision pénale de condamnation prononcée à l’encontre de l’automobiliste (et non pas du paiement spontané de l’amende, sans passer par un tribunal), « un contrôle suffisant au regard de l’article 6 §1 se trouve incorporé dans [cette] décision, sans qu’il soit besoin de disposer d’un contrôle séparé supplémentaire de pleine juridiction portant sur le retrait de points ; par ailleurs le requérant pourra introduire un recours pour excès de pouvoir devant la juridiction administrative afin de faire contrôler que l’autorité administrative a agi à l’issue d’une procédure régulière et notamment que le titulaire du permis de conduire a été mis à même de saisir le juge pénal. Dans ces conditions, la Commission est d’avis que le requérant a, dès à présent, bénéficié dans l’ordre interne d’un contrôle juridictionnel suffisant concernant la mesure litigieuse au regard de l’article 6 §1 ».
- En outre, second aspect du problème, la Chambre criminelle est même allée jusqu’à affirmer, dans les trois arrêts précités du 26 juin 1996, que lorsque la personne concernée par le retrait des points préfère ne pas demander que son dossier soit examiné par le tribunal de police, elle « renonce à la garantie d’un procès équitable en s’acquittant d’une amende forfaitaire », parce qu’elle se reconnaît une part de responsabilité. La formule est pour le moins contestable, car elle est trop générale, englobant tout le procès, alors que la Cour européenne n’accepte la renonciation du justiciable dans une matière d’ordre public - et c’est le cas de la garantie d’un procès équitable[284] - qu’à certaines conditions tenant à ses caractères et à son objet, conditions qui ne semblent pas réunies ici :
- la renonciation doit être libre, sans contrainte ; l’automobiliste n’est-il pas contraint de choisir la solution du paiement, alors que tout l’incite dans la rédaction du procès-verbal qu’il reçoit à choisir cette solution ? Son attention est attirée sur les peines plus fortes qui sont encourues devant le tribunal s’il a l’audace de s’y présenter ; il devra se déplacer jusqu’au tribunal compétent, qui peut être très éloigné de son domicile habituel, choix d’un avocat pour mieux se défendre, etc..
- Surtout, on ne peut renoncer à n’importe quelle garantie ; l’objet de la renonciation est variable et si pour tel ou tel aspect de la garantie d’un procès équitable, on peut admettre la renonciation, par exemple pour la publicité de l’audience[285], la Cour européenne a en revanche déjà jugé que le droit à un tribunal impartial, le droit à un tribunal établi par la loi ne peut faire l’objet d’une renonciation car « un tel droit offre une importance capitale et son exercice ne peut dépendre des seuls intéressés[286] ». En admettant la renonciation « à la garantie d’un procès équitable » sans aucune restriction, la Chambre criminelle semble bien admettre la renonciation à un tribunal établi par la loi, puisqu’après le paiement de l’amende valant reconnaissance de responsabilité, aucun recours ne sera plus possible.
L’affaire est donc à suivre sur ces deux aspects et notamment celui de la validité de la renonciation à la garantie d’un procès équitable.
·      Il est vrai que si l’article 6 est d’ordre public, selon l’opinion de la Cour européenne[287], les parties au procès ont la faculté, toujours selon la Cour, de renoncer aux garanties du procès équitable, pourvu que ce soit librement[288]. La question est donc de savoir si la renonciation de l’automobiliste français est libre ou non ! N’est-il pas contraint de choisir la solution du paiement, alors que tout l’incite dans la rédaction du procès-verbal qu’il reçoit, à choisir cette solution ; son attention est attirée sur les peines plus fortes qui sont encourues devant le tribunal s’il a l’audace de s’y présenter, etc.. La Commission européenne vient d’émettre un avis contraire à celui du Conseil d’état français[289] et à la Cour de cassation, en considérant que le retrait de points avait le caractère d’une sanction pénale accessoire à une condamnation et non pas celui d’une mesure purement administrative[290].
·      Autre exemple : arrêt du 19 juin 1996, selon lequel l’article 206, CPP, n’impose pas à la Chambre d’accusation saisie de l’entier dossier, d’indiquer expressément, dans sa décision, qu’elle a examiné la régularité de la procédure qui lui est soumise[291]. Mais alors comment savoir, autrement que par une analyse minutieuse de l’arrêt, point par point, qu’elle l’a fait ?
·      Ou encore, l’arrêt du 13 novembre qu’il faut rapprocher d’un arrêt d’Assemblée plénière rendue en matière de référé pour en apprécier la singularité. La Chambre criminelle juge que « les décisions des juridictions d’instruction, portant sur une demande de confrontation, ne relèvent que d’une appréciation des faits qui échappe au contrôle de la Cour de cassation »[292]. Oui... mais, le 28 juin 1996, l’Assemblée plénière juge qu’en matière de référé la Cour de cassation peut apprécier le caractère manifestement illicite ou non du trouble invoqué[293]. On est en droit de se demander si, de contentieux à contentieux, en comparant les deux décisions qui concernent toutes les deux l’appréciation de faits, la décision de la Chambre criminelle conduit à un procès équitable, globalement, au niveau de l’ensemble de la procédure, puisque la décision de la juridiction d’instruction sera souveraine et ne permettra pas à un accusé d’obtenir une confrontation.
·      Avec un arrêt du 18 décembre[294] la Chambre criminelle termine l’année 1996 en confirmant sa jurisprudence sur le refus de communiquer à un requérant devant la Cour de cassation, avant l’audience, les réquisitions écrites du Parquet au motif que :
- d’une part, le Parquet émet un avis objectif et que son rôle n’est pas, au niveau de la Cour de cassation de soutenir l’accusation mais de veiller, en toute indépendance, à l’application de la loi pénale
- et, d’autre part, ce qui semble plus sérieux comme argument, que les avocats aux conseils présents à l’audience, sont invités par le président, à reprendre la parole après l’intervention de l’avocat général.
Il reste que, contrairement à la jurisprudence européenne, qui fait de la communication de toute pièce et observation aux parties un droit fondamental (v. supra arrêt Nideröst-Huber c/Suisse du 18 fév. 1997 et arrêt Werner c/Autriche, 24 nov. 1997), la Cour de cassation française se contente d’une réponse verbale à des observations qui , pour être présentées oralement peuvent être écrites et transmises à la Chambre criminelle . Le 5 novembre dernier, (1997), la Chambre criminelle vient de confirmer cette jurisprudence[295].
·      Pour 1997, un arrêt du 6 février, rendu célèbre par la personnalité de ses protagonistes et sa portée, retient l’attention quant à l’alignement du régime de la prescription du recel d’abus de biens sociaux sur celui de ce délit[296] (sur ce point, v. infra) ; l’attendu qui nous intéresse ici concernait l’hypothèse d’un document ayant été distrait d’un Parquet par un membre du corps judiciaire, document qui aurait permis à une personne de bénéficier d’un privilège de juridiction (privilège d’ordre public à l’époque des faits, article 679, CPP), dès lors qu’elle était susceptible d’être inculpée. Or le bordereau d’enregistrement de ce document portait la mention « mis en cause », suivie de l’énumération des noms de deux personnes physiques. La Chambre criminelle considère que dès lors que ce document, qui mettait en cause cette personne, n’avait pas été versé à l’information déjà ouverte, il ne pouvait y avoir motif d’annulation de la procédure, le juge d’instruction n’en n’ayant pas eu connaissance. La décision est pour le moins surprenante, puisque par hypothèse la dissimulation de ce document avait pour objectif d’interdire au juge d’instruction d’en connaître et donc d’être obligé de se dessaisir. A bien comprendre la Chambre criminelle la situation aurait pu déboucher sur une annulation si le juge d’instruction avait été complice de l’agissement en cause, ce qui est tout de même beaucoup pour un seul tribunal ! De plus, la jurisprudence européenne est très claire à cet égard : l’accusation pénale, permettant de bénéficier du droit à un procès équitable, commence en amont du procès, dès qu’une autorité publique dénonce un suspect comme coupable, avant toute inculpation officielle, (arrêt Allenet de Ribemont du 10 février 1995, précité) et la Commission retient l’idée de « répercussions importantes sur la situation du suspect »[297]. On ne peut s’en tenir, au regard de la jurisprudence européenne, à la notion stricte d’inculpation pour considérer qu’une personne est l’objet d’une accusation ; l’article 679 visait d’ailleurs, une notion plus large et plus floue que celle d’inculpation, bien dans l’esprit européen, à savoir « susceptible d’être inculpée », ce qui, en bon français, n’a jamais voulu dire « être inculpé ». Dès lors qu’une personne est mise en cause dans un bordereau informatique du Parquet et que quelques jours plus tard elle sera mise en examen, n’était-elle pas dès ce jour là « susceptible d’être inculpée », surtout si la pièce qui aurait permis son inculpation immédiate si elle avait été transmise immédiatement au juge d’instruction, ne l’a pas été, non pas pour quelques hésitations du Parquet, mais parce qu’un membre de celui-ci a soustrait la pièce ! Y a-t-il eu procès équitable ? Certainement pas au niveau de la délocalisation de la procédure qui était inhérente à ce genre de situation.
·      Ce même arrêt viole le principe de légalité à propos de la prescription du recel d’abus de biens sociaux : à preuve les visas retenus pour justifier la cassation qui n’ont aucun lien avec le dispositif. En visant les articles 203 du code de procédure pénale et 321-3 à 321-5 du code pénal, la Chambre criminelle les viole allègrement puisque, comme l’ont relevé certains commentateurs « aucun n’autorise à affirmer péremptoirement que le délit de recel de choses ne peut commencer à se prescrire avant que l’infraction dont il procède ne commence elle-même à se prescrire[298] » ou encore « ces textes, qui existent depuis longtemps, sont à l’évidence, insusceptibles de justifier un retard dans la prescription du recel[299] » et « la solution nouvelle nous paraît donc condamnable au nom du principe de la légalité[300] ». Jurisprudence malheureusement confirmée, au visa des mêmes articles, dans l’arrêt Carignon[301].

b) Dans le contentieux civil, les zones de conflits commencent seulement à apparaître, le procès civil ayant échappé à l’action des justiciables à Strasbourg, jusqu’à une époque récente, exception faite des cas déjà signalés dans l’analyse de la jurisprudence européenne.
·      On retiendra tout de même un arrêt de la première chambre qui juge compatible avec le droit à un procès équitable les dispositions des articles 1186 et 1187, alinéa 2, NCPC, dans la mesure où le père des enfants n’allègue pas avoir été mis dans l’impossibilité d’être assisté d’un avocat[302] ; or, ces articles n’organisent la consultation du dossier d’assistance éducative qu’au profit du conseil des personnes concernées (ou de la personne ou service à qui l’enfant a été confié). En l’occurrence, le père qui n’alléguait pas avoir été mis dans l’impossibilité d’être assisté d’un avocat, n’avait pas eu accès au dossier. Est-ce équitable ? Certainement pas et la Cour européenne en avait d’ailleurs jugé ainsi sept mois auparavant, jugeant qu’en matière d’assistance éducative, les pièces du dossier devaient être communiquées aux parents, au titre de l’article 6[303] !
·      Aussi surprenant que cela puisse paraître, la Cour de cassation n’a pas sanctionné la violation de la garantie d’un tribunal impartial dans une hypothèse où, pourtant, on ne peut avoir aucun doute sur les conditions objectives de cette violation. C’est la jurisprudence contestée et contestable des première et deuxième chambres civiles[304] qui admettent que le conseiller de la mise en état puisse participer à la formation collégiale de la chambre saisie du déféré de l’une de ses ordonnances. On soulignera l’absence totale de motivation sérieuse pour justifier cette solution (et pour cause !) avec une rédaction qui laisse perplexe : après avoir rappelé la règle selon laquelle « le déféré d’une des ordonnances du conseiller de la mise en état mentionnées à l’article 914, al.2, NCPC, saisit de l’incident la formation collégiale de la chambre à laquelle l’affaire a été distribuée », la Cour ajoute un « il s’ensuit... », dont on ne voit pas très bien le lien de causalité qu’il semble vouloir introduire entre cette distribution à une chambre et la possibilité pour le conseiller de la mise en état d’y siéger, alors qu’il a rendu l’ordonnance. C’est par une pure pétition de principe que la Cour de cassation conclut que ce conseiller « peut valablement faire partie de cette formation collégiale », en violation de l’article 6 de la Convention européenne des droits de l’homme.

            c) L’assemblée plénière n’échappe pas à la critique. Dans un arrêt du 1er juillet 1994[305], elle juge que « les décisions de la Commission compétente en matière de retrait ou de suspension de l’habilitation des OPJ n’ayant pas, en vertu de la loi, à être motivées sur le fond, n’enfreignent pas les principes généraux du droit, en ce qu’ils touchent notamment aux droits de la défense ». En quelque sorte, c’est parce que la loi ne dit rien que les principes généraux du droit ne sont pas violés ! Curieuse conception de la notion de principes généraux qui sont au contraire faits pour s’appliquer en l’absence de dispositions légales. Et c’est faire fi de l’arrêt de la Cour européenne rendu quelques semaines plus tôt, le 19 avril 1994, qui posait très clairement l’exigence d’une motivation, même si le tribunal n’a pas l’obligation de répondre à tous les arguments d’une manière détaillée[306].
            Avec ce regard critique on est déjà dans une autre perspective, celle qui consiste à analyser les dispositions qui pourraient poser problème au titre du droit à un procès équitable si, un jour le cas était porté à Strasbourg. Simplement, c’est la législation qui est en cause et non pas la jurisprudence.
C - REGARD PROSPECTIF (sur la législation française)

            Certes, les organes de la Convention ne jugent pas les textes de droit interne pour apprécier leur validité au regard de la Convention, mais des situations particulières dans lesquelles des particuliers se trouvent placés en raison de ces textes et de leur application par les tribunaux, pour juger de l’effectivité de leurs droits au regard de la procédure et de son équité. Selon une jurisprudence constante « lorsque le requérant se plaint d’une entrave au droit d’accès à un tribunal, les organes de la Convention doivent se borner à examiner les problèmes soulevés dans le cas concret dont ils sont saisis en se gardant d’apprécier en soi le droit national applicable et les modalités d’exercice des recours qu’il ménage ». Il n’en demeure pas moins que les deux organes sont conduits, en fait, à juger les textes de droit interne, puisque c’est en modifiant certains d’entre eux, qu’un État arrivera le plus souvent à supprimer, pour l’avenir, le caractère inéquitable d’un procès pour lequel il a été condamné en raison de la situation dans laquelle se trouvait une partie par rapport à l’application à son cas de ce texte. Ainsi, suite à l’arrêt Union Alimentaria Sanders, l’Espagne a revu toute l’organisation de son système judiciaire pour respecter l’exigence d’un procès équitable.
            On peut ainsi recenser toute une série de dispositions qui nous semblent poser problème, sans prétendre à l’exhaustivité. Et l’un des meilleurs spécialistes de ces questions a pu écrire que la loi « se trouve donc tenue en lisière par le droit de la Convention européenne, tel que l’interprètent de façon évolutive, impérieuse, envahissante, les juridictions dites organes de Strasbourg »[307].
            a) En matière pénale, les dispositions exposant la France à un risque de condamnation sont nombreuses:
1) Ainsi, de l’impossibilité de faire juger, par la Cour de cassation, les moyens de nullité de la procédure rejetés par la Chambre d’accusation, avant le procès au fond, si le Président de la Chambre criminelle ne déclare pas le pourvoi admissible immédiatement. Deux aspects paraissent contraires au droit à un procès équitable : que la décision d’examen immédiat dépende d’un tiers, qui plus est directement concerné par le procès ; que cette décision soit sans recours. On ajoutera, selon la méthode d’appréciation globale de la Cour européenne, que le procès au fond qui va se dérouler avant que l’incident sur les moyens de nullité ne soit vidé, est inéquitable en ce sens qu’on voit mal la Cour de cassation annuler aisément, sans restrictions mentales fortes, toute une procédure, alors que la personne aura été condamnée en première instance et en appel ; on l’a bien vu dans l’arrêt du 6 février 1997, à propos du moyen de nullité tiré de la soustraction de pièce dans une procédure en cours, pièce qui aurait conduit à une délocalisation de la procédure ; était-il envisageable un seul instant que la Chambre criminelle puisse annuler plusieurs années après, la prescription ayant entre-temps couru, toute la procédure, alors que de lourdes condamnations avaient été prononcées ? Poser la question c’est y répondre et il y a procès inéquitable à être jugé dans ces conditions.
2) On peut aussi se demander si, à la suite de la décision du Conseil constitutionnel du 16 juillet 1996[308], à propos de la loi du 22 juillet sur les perquisitions de nuit en matière de terrorisme, certains actes du juge d’instruction ne seraient pas à l’origine d’un procès inéquitable, celui-ci étant, en quelque sorte, à la fois juge et partie. C’est bien en tout cas le sens de la motivation de la décision du Conseil, décision qui pourrait venir à l’appui d’une requête invoquant le fait qu’un accusé aurait été soumis à une juridiction d’instruction ne présentant pas toutes les garanties d’une bonne justice, que sa liberté n’était pas garantie.
3) De la même façon, le régime procédural de la mise en examen ne correspond pas aux exigences d’un procès équitable : pas de débat contradictoire avant la notification par lettre recommandée, pas de motivation et pas d’appel ! Cela fait beaucoup pour un acte d’une telle importance, une accusation au sens pénal en droit européen.
4) En matière de présence de l’avocat au cours de la garde à vue, l’arrêt John Murray c/ Royaume Uni, du 8 février 1996, nous expose à une condamnation identique à celle de la Grande Bretagne. La Cour a en effet jugé que le fait pour un suspect de terrorisme d’être privé de tout contact avec un avocat pendant les 48 premières heures de sa garde à vue constituait la violation de la garantie d’un procès équitable, tout accusé devant pouvoir bénéficier d’un avocat « dès les premiers stades de l’interrogatoire de police ». Les articles 63-4, dernier alinéa et 706-23, CPP en matière de terrorisme et les articles 63-4, dernier alinéa et 706-29, CPP, en matière de trafic de stupéfiants nous expose à une condamnation, lorsqu’on sait que ces textes ne prévoient la présence de l’avocat qu’à partir de 73ème heure de garde à vue, sans même parler de la garde à vue de droit commun où la présence de l’avocat n’est autorisée qu’à partir de la 21ème heure.
5) Ou encore, la procédure suivie devant la Commission d’indemnisation à raison d’une détention provisoire, commission installée près la Cour de cassation (articles 149 à150, CPP), dans la mesure où l’article 149-2 prévoit dans son alinéa 2 que les débats et le prononcé de la décision ont lieu en chambre du conseil. Or, la Cour européenne vient de rendre deux arrêts contre l’Autriche, considérant que devant ce type de juridiction (et l’article 149-2, alinéa 3 du texte français dispose que cette commission a le caractère d’une juridiction) les débats et le prononcé du jugement doivent être publics. Elle précise même qu’on ne peut reprocher au requérant de n’avoir pas formulé une demande de publicité des débats, dès lors qu’il savait qu’elle n’avait aucune chance d’aboutir, en l’état actuel de la loi et de la jurisprudence en Autriche, sur ce point ; il n’a donc pas renoncé à son droit à une audience publique[309].
            b) En matière civile, la prospective est moins riche.
1) On peut penser à l’inégalité de situation des parties en matière prud’homale par exemple, puisque l’employeur peut récupérer la TVA sur les honoraires d’avocat, pas le particulier, c’est à dire le salarié. Y-a-t-il procès équitable, alors que l’accès au juge est l’un des principes fondateurs de la jurisprudence européenne et que l’un des obstacles les plus combattus par les organes de la Convention, c’est précisément l’obstacle financier (cf. l’arrêt Airey) ?
2) Il faut aussi considérer que l’usage, devant la Cour de cassation française, que le Parquet assiste au délibéré, sans prendre la parole ni voter, est contraire à l’égalité des armes, malgré un vibrant plaidoyer du Procureur général près cette juridiction lors de la séance solennelle de rentrée de janvier 1997[310].
                        La deuxième moitié du XXème siècle aura donc connu une montée en puissance considérable de la notion de droits fondamentaux, avec la création d’un fonds commun procédural d’origine européenne[311], un « jus commune ». Un droit processuel nouveau apparaît, véritable bloc de droits fondamentaux, de garanties fondamentales d’une bonne justice qui ont vocation à s’appliquer dans tous les contentieux, notamment dans les contentieux récents et spécifiques portés devant les autorités administratives indépendantes. Ce fonds commun procédural que la territorialité très marquée de la procédure ainsi que la dualité de nos ordres de juridictions ont longtemps masqué, ressort aujourd’hui par l’inspiration commune de quelques grands principes issus des idéaux du siècle des Lumières et transposés dans nos engagements internationaux ainsi que dans la jurisprudence européenne ou constitutionnelle.
            La garantie formelle que représente aujourd’hui le droit à un procès équitable est acquise, même si elle reste encore largement perfectible en France, notamment en matière pénale. Mais c’est à une autre évolution que l’on assiste, l’apparition du procès équitable comme enjeu substantiel.
II - Aujourd’hui, ENJEU SUBSTANTIEL
            Le procès équitable devient un enjeu substantiel à un triple point de vue :
- d’abord, parce qu’il est devenu le critère d’appréciation du respect, par les États adhérents, des droits substantiels garantis par la Convention (A) ;
- ensuite parce qu’il a permis, par la force de ses exigences, de protéger par les garanties de la Convention, des droits qui n’entrent pas dans le champ d’application de celle-ci (B) ;
- enfin, parce qu’il est lui-même devenu un droit substantiel ( C ).
            Ces trois aspects ont été heureusement et remarquablement mis en valeur par notre collègue J.F. Flauss dans sa contribution au procès équitable lors du colloque organisé le 22 mars 1996, par l’Université Robert Schuman de Strasbourg et la Cour de cassation[312]. Mais il est vrai que tous les auteurs n’en partagent pas toutes les audaces[313]!
A - LE PROCèS éQUITABLE, CRITèRE D’APPRéCIATION DU RESPECT, PAR LES éTATS, DES DROITS SUBSTANTIELS GARANTIS PAR LA CONVENTION
            La notion processuelle de procès équitable est amenée à jouer un rôle encore plus important à l’avenir, dans la mesure où la Cour européenne considère, dans son contrôle de la proportionnalité des ingérences des États dans les droits substantiels des citoyens, que le respect du droit à un procès équitable par l’Etat, est l’un des critères d’appréciation de la proportionnalité des restrictions apportée par ces États à l’exercice des droits substantiels garantis par la Convention.
            a) Par exemple, si le tiers, dont le bien a été saisi par l’administration fiscale, a pu faire contrôler par un tribunal, dans le cadre d’une procédure satisfaisant aux conditions de l’article 6 §1, l’usage qui a été fait des pouvoirs reconnus à cette administration, l’exercice de ce droit de saisie satisfait à l’exigence de proportionnalité[314]. Le droit au procès équitable devient ainsi, par ses interférences avec la protection des droits substantiels, « la pierre angulaire du droit de la Convention »[315].

            b) En matière de respect de la vie privée ou familiale, l’article 8 de la Convention qui protège ce droit ne prévoit aucune condition de procédure. Pour autant, la Cour décide que les mesures d’ingérence dans ce droit doivent non seulement respecter les intérêts protégés par l’article 8, mais aussi être prises après un processus décisionnel qui respecte le droit au procès équitable de l’article 6 §1[316].
            c) D’une manière plus générale, la Cour sanctionne la violation de droits procéduraux, à travers le non-respect de droits substantiels[317]. Et certains juges émettent l’opinion dissidente qu’il faut aller plus loin et reconnaître l’existence de garanties procédurales dans les droits substantiels garantis par la Convention[318].
B - LE PROCèS éQUITABLE, PROTECTEUR DE DROITS SUBSTANTIELS NON GARANTIS PAR LA CONVENTION
            a) C’est encore le droit au procès équitable visé à l’article 6 §1 - et non pas l’article 6 §2 -  qui sert de critère d’appréciation au droit de ne pas s’auto-incriminer, droit non garanti formellement par la Convention, alors que l’article 6 §2 est plus en rapport avec cette question, puisqu’il garantit le respect de la présomption d’innocence. Or, la Commission et la Cour considèrent que ce droit, non formellement garanti par la Convention, constitue une garantie accordée aux accusés au nom du droit à un procès équitable. Elles le rattachent d’ailleurs à deux dispositions de l’article 6 :
- à celle du §2, parce qu’il lui est « intimement lié », en ce qu’il reflète ce que l’on attend d’un État : qu’il prenne en charge l’établissement de la culpabilité d’un accusé, l’accusé étant « en droit de ne pas être amené à fournir la moindre aide sous forme d’aveu lors de cette procédure ».
- Mais, surtout, au §1, au procès équitable : « le fondement d’un procès équitable présuppose qu’il soit offert à l’accusé la possibilité de se défendre contre les charges portées à son encontre. La position de la défense est ébranlée si l’accusé est ou a été contraint de s’accuser lui-même »[319].
            En revanche, la Cour a précisé, le 20 octobre 1997, que si le droit de se taire avait pour but de protéger les accusés contre une coercition abusive des autorités, ce qui présuppose que l’accusation cherche à fonder son argumentation sans recourir à des éléments de preuve obtenus par la contrainte ou les pressions, au mépris de sa volonté, « les condamnations à une amende en raison du refus du requérant de prêter serment et de déposer devant le juge d’instruction qui l’avait convoqué comme témoin, ne s’analyse pas en une violation du droit de l’intéressé de ne pas contribuer à sa propre incrimination ». En l’espèce, le requérant pouvait redouter, selon la Cour, que par le biais de certains de ses propos, il témoigne contre lui-même ; il eût été ainsi admissible qu’il refuse de répondre à celles des questions qui auraient été de nature à le pousser dans cette direction. Mais, il résultait des P.V. d’audition, qu’il refusa d’emblée de prêter serment ; or, le serment est un acte solennel par lequel son prestataire s’engage à dire la vérité, mais que la vérité ; la coercition vise donc à garantir la sincérité des déclarations faites et non à obliger l’intéressé à déposer[320].
            b) De la même façon, et alors que la Convention ne garantit pas un droit à des prestations invalidité, la Commission et la Cour ont admis qu’une requérante pouvait faire valoir l’existence d’une discrimination fondée sur le sexe dans le refus du Tribunal des assurances de lui accorder une telle rente ; le Tribunal en effet avait motivé son refus sur l’idée que les femmes cessaient généralement toute activité professionnelle lorsqu’elles devenaient mères de famille, argument qui ne pouvait être opposé aux hommes ! La Cour y voit une motivation discriminatoire injustifiée en violation du droit à un procès équitable[321].
            c) Enfin, la Commission et la Cour ont consacré, au nom du droit à un procès équitable un droit qui n’est garanti qu’à titre optionnel dans la Convention, au Protocole n° 7, article 4 §1, à savoir le principe non bis in idem[322]. Le rapport de la Commission et l’arrêt sont riches d’enseignements pour la France, car bien que l’affaire concerne l’Autriche, la solution est transposable, les réserves émises par la France et par l’Autriche l’étant en termes identiques. Il s’agissait de savoir si une personne ayant été poursuivie et condamnée par un tribunal pénal autrichien, pouvait ensuite être condamnée par une autorité administrative, mais dans des conditions telles que les sanctions administratives relevaient de la matière pénale au sens de la Convention. Or, l’Autriche, comme d’ailleurs la France, ont ratifié le Protocole avec des réserves d’interprétation et notamment que le principe non bis in idem ne serait applicable que pour des poursuites engagées à propos d’infractions relevant « dans le sens du Code pénal autrichien » ou « en droit français » de la matière pénale. A suivre ces réserves et le sens que leur donnait l’Etat autrichien, les poursuites devant l’autorité administrative ne relevant pas de la matière pénale au sens national autrichien elles pouvaient être engagées pour les mêmes infractions. Ce n’est pas l’avis de la Commission, ni la décision de la Cour qui considère « qu’en excluant toutes les procédures qui ne seraient pas pénales au sens du code pénal autrichien, la déclaration [autrichienne] n’offre pas à un degré suffisant la garantie qu’elle ne va pas au-delà des dispositions explicitement écartées par l’Autriche ». En invalidant les réserves autrichiennes la Cour fait entrer le principe non bis in idem dans la matière pénale au sens de la Convention, dans les procédures pénalisées de l’article 6, celles pour lesquelles le droit à un procès équitable est applicable. Ce dernier consacre ainsi un droit optionnel, en faisant tomber des réserves d’interprétation.
En outre, la Commission avait considéré que le principe non bis in idem jouait pour les mêmes faits à la base des deux poursuites autrichiennes, quand bien même elles ne concernaient pas « formellement » la même infraction ; la Commission insiste sur le fait que le Protocole n° 7, article 4 §1, ne fait pas référence à une « même infraction », mais à des poursuites et à une condamnation portant « à nouveau » sur une même infraction, c’est à dire sur les mêmes faits. Ne peut-on transposer cette opinion dans l’affaire du sang contaminé et considérer, d’ores et déjà, que les poursuites engagées une seconde fois sous une qualification différente violent le principe non bis in idem ? Il est vrai qu’une telle transposition n’a guère de chances d’aboutir aujourd’hui, la Chambre criminelle de la Cour de cassation considérant, en méconnaissance totale de la jurisprudence de la Cour européenne pourtant antérieure de huit mois à son arrêt, que « la règle non bis in idem, consacrée par l’article 4 du protocole n° 7, additionnel à la CEDH, ne trouve à s’appliquer, selon les réserves faites par la France en marge de ce protocole, que, pour les infractions relevant en droit français de la compétence des tribunaux statuant en matière pénale et n’interdit pas la prononcé de sanctions fiscales parallèlement aux sanctions infligées par le juge répressif »[323]. Le Conseil d’état retient la même solution au regard de l’article 14-7 du pacte international relatif aux droits civils et politiques : « cet article, pour lequel la France n’a formulé aucune réserve d’interprétation, ne fait pas obstacle à ce qu’un contribuable condamné ou relaxé des poursuites du chef de fraude fiscale se voie appliquer, s’il y a lieu, par l’administration fiscale, les pénalités pour mauvaise foi ou pour manoeuvres frauduleuses ou les pénalités prévues en cas d’absence de déclaration ou de déclaration tardive »[324]. Même solution pour le Conseil de la concurrence à propos des articles 7 de l’ordonnance du 1er décembre 1986 et 85 du Traité CEE : pas d’applicabilité de ce principe en cas d’application conjointe de ces deux articles (infractions distinctes selon le Conseil, car l’article 85 suppose que le commerce entre les états membres soit concerné)[325]. Ou encore, pour des poursuites pénales pour publicité mensongère (articles L. 121-1, L. 121-5 et 6, code de la consommation), leur existence ne saurant faire échec ni à la compétence du Conseil, ni à son pouvoir de sanction, le principe non bis in idem n’ayant pas lieu de jouer[326]. Pour être complet, signalons que la Cour de justice des Communautés européennes retient la même solution que le Conseil de la concurrence[327], mais ajoute dans son arrêt qu’une « exigence générale d’équité...implique qu’il soit tenu compte de toute décision antérieure pour la détermination d’une éventuelle sanction ». N’est-ce pas le cas lorsqu’il y a application simultanée des deux règles par la même autorité ?
On remarquera que la France a émis les mêmes réserves sur le principe du double degré de juridiction, en matière pénale, principe énoncé à l’article 2 §1, Protocole n° 7 (décret n° 89-37, 24 janvier 1989). La CEDH peut demain écarter cette réserve d’interprétation.
C - LE PROCèS éQUITABLE, DROIT SUBSTANTIEL
            En vingt-deux ans, entre l’arrêt Golder du 21 février 1975 et l’arrêt Hornsby du 19 mars 1997, la Cour européenne a finalement construit un droit au procès équitable extrêmement large, droit qui comprend désormais trois volets :
- le droit d’accès à un tribunal ;
- le droit à une bonne justice dans sa double composante d’organisation du tribunal (indépendance, impartialité) et de droit à garanties dans le déroulement de l’instance (droit à un procès équitable au sens strict, publicité de l’audience et délai raisonnable) ;
- droit à l’exécution des décisions de justice.
            Dans les trois cas, il s’agit bien d’un véritable droit substantiel, à caractère fondamental.
            a) S’agissant tout d’abord du droit à un tribunal, il a été consacré par la Commission dans son rapport dans l’affaire Bellet contre la France. En considérant qu’un hémophile contaminé ayant accepté l’offre de « réparation » du Fonds de garantie créé à cet effet, pouvait néanmoins poursuivre une action en justice en réparation de ce même préjudice, la Commission envisage le droit à un tribunal comme un droit substantiel[328]. Toute interdiction d’agir en réparation au-delà de la limitation légale de responsabilité, contrevient à l’exigence d’un droit d’accès « effectif et concret » à un tribunal. Bref, le droit à un procès équitable crée un droit à réparation, alors même que celui-ci avait été exclu par le législateur national.
            b) Il est inutile de revenir sur le contradictoire et l’égalité des armes, véritables droits substantiels consacrés notamment dans les arrêts Vermeulen et Lobo Machado.
c) Le droit à l’exécution des décisions de justice n’a d’abord été envisagé que comme un aspect du délai raisonnable, ce dernier devant inclure la phase d’exécution du jugement[329]. Puis, la Cour a considéré que l’absence prolongée d’exécution de jugements d’expulsion de locataires engageait la responsabilité de l’Etat, pour violation du droit à un procès équitable[330]. La Commission a ensuite estimé que l’effectivité du droit à un recours juridictionnel supposait un droit à l’exécution des décisions de justice[331] ; son avis a été confirmé par arrêt de la Cour européenne le 19 mars 1997[332].
            Dans cet arrêt  Hornsby c/Grèce qui fera date, la Cour consacre un véritable droit substantiel à l’exécution effective des jugements. La Cour européenne juge en effet que l’exécution d’un jugement ou d’un arrêt, de quelque juridiction que ce soit doit être considérée comme faisant partie intégrante du procès équitable au sens de l’article 6§1 ; on ne comprendrait pas, en effet, que l’article 6§1 décrive en détail les garanties de procédure (équité, publicité et célérité) accordées aux parties et qu’il ne protège pas la mise en œuvre des décisions judiciaires ; cet article ne peut pas passer pour concerner exclusivement l’accès au juge et le déroulement de l’instance. Désormais, le droit à un procès équitable au sens large forme un tout, un triptyque dont le premier volet est le droit d’accès à un tribunal, le deuxième, le droit à une bonne justice dans ses deux aspects d’organisation du tribunal et de procès équitable au sens strict ; le troisième volet, droit à l’exécution, est désormais détaché de l’exigence du respect du délai raisonnable pour devenir un droit autonome.
            Dans ces conditions, quelle sera l’évolution demain ? Quelles seront les nouvelles orientations de la Cour européenne, avec ses méthodes d’interprétation qui lui permettent d’aller très loin ? La réponse à cette question dépend pour une large part de la place des organes de la Convention dans l’organisation des pouvoirs en Europe, par rapport aux États adhérents et par rapport aux autres pouvoirs du Conseil de l’Europe. A ce titre, le procès équitable devient un instrument de pouvoir.
III - DEMAIN, INSTRUMENT DE POUVOIR
            Le procès équitable peut devenir un formidable instrument de pouvoir entre les mains des organes de la Convention pour deux raisons :
- d’une part, il peut faire exploser des situations bien acquises aujourd’hui en droit national et pour lesquelles on ne penserait pas à l’application des prescriptions de la Convention, provoquant la mainmise des organes de la Convention sur la libre détermination de nos règles juridiques ;
- d’autre part, il est le révélateur, par ses extensions sans limites, d’un conflit de pouvoirs entre plusieurs organes juridictionnels, d’une forme de crise de la justice à l’échelle européenne, de la place de la justice européenne dans l’équilibre des pouvoirs.
            Et cette crise peut être aggravée à terme si, comme vient de le souligner Frédéric Sudre dans le premier numéro de la semaine juridique en 1998, on assiste, avec le Traité d’Amsterdam, à un basculement du régime de protection des droits fondamentaux, le Conseil de l’Europe s’affaiblissant en raison de l’adhésion d’états sans grandes traditions démocratiques, la Cour de Luxembourg, au contraire, montant en puissance dans ce domaine. La démonstration vaut, à terme, pour cette Cour.
            Il faut d’ailleurs observer que les juges nationaux peuvent aussi utiliser ces dispositions comme d’un instrument de pouvoir, mais cette perspective est faible, d’une part parce que l’examen critique de la jurisprudence française a montré que les juridictions - et singulièrement la Chambre criminelle de la Cour de cassation - sont plutôt réticentes à appliquer la garantie du procès équitable ; d’autre part, elles n’ont pas la même disponibilité des méthodes d’interprétation de la convention que la Commission et la Cour européennes. Il ne faut cependant pas la négliger, ainsi que le montre, au niveau des juges du fond, la jurisprudence très créatrice, mais aussi protectrice des libertés, de la Cour d’appel de Paris, section économique et financière, dans le contentieux généré par les recours contre certaines décisions du Conseil de la concurrence et de la Commission des opérations de bourse.
A - DES EXPANSIONS SANS LIMITES ? (Un peu de science-fiction)
            En vue d’assurer son contrôle sur l’application de la loi nationale, le juge européen tient compte des circonstances de l’espèce et des dispositions invoquées de la Convention « ce qui rend audacieuse toute systématisation » et permet d’affirmer que « le contrôle de la Cour s’étend jusqu’aux bornes fixées par elle »[333].
            Peut-on rêver ou faire un cauchemar, selon sa sensibilité à l’univers en expansion que constitue la jurisprudence européenne ? Peut-on imaginer demain la consécration de droits procéduraux nouveaux, inspirés de l’effectivité du droit à un recours juridictionnel et du droit à un procès équitable ?
            a) Imagine-t-on, par exemple que demain la Cour, dans le prolongement de sa jurisprudence Allenet de Ribemont sur l’atteinte à la présomption d’innocence par toute autorité publique, étende cette protection aux atteintes à la présomption d’innocence portées dans la presse, aux procès médiatiques, en condamnant l’Etat qui n’aurait pas su, pas pu ou pas voulu s’y opposer et mettre en œuvre les moyens qui s’imposaient ?
La même extension de la présomption d’innocence, envisagée dans l’interprétation qu’en a donnée l’arrêt Allenet de Ribemont, pourrait consacrer le droit de tout justiciable à ce qu’aucune autorité judiciaire ne s’exprime sur une affaire, quand bien même elle ne serait pas encore individualisée et qu’aucun responsable d’une infraction faisant l’objet des dites déclarations ne soit identifié. Et cela au nom du droit à un procès équitable qui suppose qu’il n’y ait ni préjugement exprimé publiquement de la part de ceux qui pourraient un jour connaître de l’affaire, ni pression sur les juridictions inférieures pour qu’elles adoptent une solution souhaitée par le représentant d’une juridiction d’un ordre supérieur. Où serait le procès équitable si l’on devait accepter, sans réagir, que demain ce représentant laisse entendre que sa juridiction ne serait pas insensible à ce que les juges du fond adoptent telle solution plutôt que telle autre et qu’il pourrait bien y avoir un revirement de jurisprudence[334] ? Déjà, d’autres autorités publiques ont été condamnées pour des propos portant atteinte à la présomption d’innocence, en l’occurrence le président de la Commission des opérations de bourse[335].
            On en trouve une première illustration, au demeurant tout à fait conforme à ce que l’on est en doit d’attendre du juge judiciaire en matière de protection des libertés individuelles, dans les décisions de la Cour d’appel de Paris qui ont vu dans les propos tenus par le président de la COB sur une affaire une atteinte à l présomption d’innocence, au motif que « le respect de la présomption d’innocence exige qu’aucun représentant de l’état ou autorité publique ne déclare une personne coupable d’une infraction avant que sa culpabilité ne soit légalement établie »[336].
            b) Imagine-t-on que demain la Cour consacre un droit à l’oubli et juge que l’équité, le procès équitable, c’est aussi la possibilité de pouvoir bénéficier effectivement et concrètement du droit substantiel à la prescription, droit qu’elle dégagerait de la nécessité, pour garantir un procès équitable, d’apaiser les passions et de ménager à tout accusé la possibilité de bénéficier de preuves encore existantes[337] ? la même remarque peut être faite lorsqu’un acte interruptif de la prescription est pris tous les trois ans, uniquement pour refaire partir le délai, sans qu’ensuite, pendant trois ans, aucun acte d’instruction ne soit accompli.
            En réalité, sur ce terrain de la prescription la Cour européenne penche plutôt contre la prescription de toutes les infractions au nom du droit d’accès à un tribunal. Néanmoins, elle accepte les règles de prescription qui d’une part, poursuivent un but légitime, par exemple garantir la sécurité juridique et empêcher les plaintes tardives et, d’autre part, sont proportionnées à ce but[338].
            c) Imagine-t-on que demain la Cour consacre un droit à la sécurité juridique et remette en cause les revirements de jurisprudence, la requalification des faits et condamne les États dont les juges auraient violé des normes juridiques établies ?
            On pourrait continuer longtemps, mais l’intérêt est ailleurs ; il est dans les raisons qui conduisent la Cour européenne à repousser toujours plus loin les frontières du champ d’application du procès équitable. C’est peut-être dans un jeu de pouvoir qu’il faut en trouver l’explication, jeu qui ne fait que traduire la crise de la justice et de la place du juge dans notre société.
B - PROCèS éQUITABLE ET éQUILIBRE DES POUVOIRS
            L’équilibre des pouvoirs est remis en cause tant au niveau du juge national (a), encore qu’il n’en abuse pas, qu’à celui des organes de la Convention (b).
            a) Le juge national et le jugement porté sur certains textes de droit processuel économique au regard de l’exigence d’un procès équitable
            C’est dans les contentieux boursiers et de la concurrence que le juge national, en tout cas la Cour d’appel de Paris, fait preuve du plus d’audace, n’hésitant pas à déclarer des procédures non conformes aux exigences du procès équitable, malgré leur respect des texte les régissant. Ainsi, dans l’arrêt Oury, du 7 mai 1997 (précité), la Cour d’appel de Paris n’a pas hésité à déclarer inéquitable au regard de l’article 6 de la convention européenne la procédure suivie devant la Commission des opérations de bourse, malgré le respect des dispositions du décret du 23 mars 1990 alors applicable, au motif que le même organe de décision cumulait des fonctions de poursuite, d’instruction et de déclaration de culpabilité, que les raisons du maintien des poursuites n’avait pas été communiquées à l’intéressé et que celui-ci n’avait jamais été entendu par le rapporteur, lequel avait pris part au délibéré, qui plus est dans des conditions douteuses (23 décisions rendues sur deux dossiers comportant plus de 3000 cotes, en une seule séance). Ce sont les textes qui sont en cause et la Cour de Paris n’est peut-être pas mécontente de rappeler aux pouvoirs publics que les juges judiciaires, tant décriés pour leur méconnaissance supposée des choses de la vie économique, sont en tout cas soumis à des règles de procédure qui n’encourent pas ces reproches. Ces contentieux confiés aux autorités administratives indépendantes manquent de tradition, de bases juridiques solides et leur mixité (un tiers de civil, un autre de pénal et un dernier d’administratif) altèrent les concepts du droit processuel et portent souvent atteinte aux droits fondamentaux du procès. Il n’est pas dit que la procédure issue du décret du 31 juillet 1997 échappe à toutes les critiques, malgré quelques améliorations notables (notification du rapport et audition par le rapporteur).
            b) Les organes de la Convention portent ombrage aux juridictions nationales, notamment aux Cours suprêmes qui ont perdu, d’une certaine façon, de leur souveraineté. La Convention n’est-elle pas selon leur propre expression « l’instrument constitutionnel d’un ordre public européen »[339] ? La jurisprudence de la Cour européenne est ainsi l’occasion de s’interroger sur la place du juge européen dans notre démocratie, sur son rôle ; en effet, à l’aide d’une notion aussi élastique que le procès équitable, il peut beaucoup s’il veut redessiner la place du droit dans notre démocratie. Et apparemment, c’est ce qu’il fait.
            1) Le juge européen semble ainsi se placer comme gardien des valeurs de liberté et d’égalité, à l’encontre des autres pouvoirs, y compris les législateurs nationaux. Par sa jurisprudence audacieuse, toujours en expansion, sans frontières, le juge européen s’affirme par rapport aux autres pouvoirs comme l’organe qui peut évaluer la fidélité aux valeurs démocratiques de base des finalités concrètes de l’action sociale qui appartiennent, elles, aux pouvoirs législatif et exécutif. L’Etat national n’est plus le maître de son droit.
            2) Ce faisant le juge européen traduit une évolution de notre organisation sociale[340] :
- à la fin du XVIIIème siècle serait apparue une période d’affirmation du pouvoir législatif fondé sur le concept démocratique de volonté générale ;
- à la fin du XIXème siècle se serait affirmée une période de valorisation du pouvoir exécutif en vue d’une meilleure prise en compte des exigences de l’égalité ;
- et nous vivrions une troisième période qu’illustre parfaitement le juge européen ; celle d’un pouvoir judiciaire qui s’affirme par rapport aux deux autres, ce qui suppose une meilleure conception du rapport du juge à la règle, un instrument, en l’occurrence la Convention, avec sa supériorité normative et ses concepts élastiques, dont celui de procès équitable.
Ainsi, se concrétiserait l’opinion d’Adrien Duport, l’un des rédacteurs de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen, et notamment de son article 8, qui affirmait en 1789, que « la justice, l’humanité et la politique ne sont qu’une même chose[341] ».
            3) Une telle évolution n’est pas sans danger, car alors il faut s’interroger sur les limites à l’immixtion du juge européen dans le contrôle du respect des valeurs démocratiques de base aux finalités concrètes de l’action sociale. Le danger d’un véritable gouvernement des juges n’est pas national ; il est européen. Il est dans le maniement inconsidéré de concepts flous, qui constituent des instruments politiques de prise du pouvoir. Et, surtout, dans le fait qu’il n’y a personne pour contrôler les organes de la Convention, alors qu’ils se sont auto-attribués des moyens très puissants pour soumettre le droit national à leur conception des libertés et des droits fondamentaux.
            Cette évolution doit être rapprochée de l’éventuelle création, au niveau de l’Union européenne, d’un Ministère public européen, sorte de F.B.I. du Parquet, qui protégerait les intérêts financiers de l’Union[342].
            A ce titre, le procès équitable, recherche d’un équilibre au profit d’une plus grande sécurité juridique est lui-même facteur d’insécurité, nous l’avons vu par les exemples de science-fiction que nous venons de donner.
            Le paradoxe c’est que la recherche à tout prix d’une extension des frontières du procès équitable soit elle-même source d’insécurité, de tentation totalitaire et, finalement, d’inéquité. Trop d’équité dans le procès peut tuer l’équitable et n’est-ce pas, peut-être, demain, trop d’atteintes à des cultures nationales enracinées dans des siècles d’histoire ? N’y a-t-il pas le risque de provoquer chez les citoyens européens le sentiment que leur sort est entre les mains d’un gouvernement de juges qui seraient perçus comme des technocrates et non pas comme des sages, sans aucun contrôle démocratique sur leur action ?


[1] C. Picheral et F. Sudre, La diffusion du modèle européen de procès équitable, Doc. Fr. 2003.
[2]. J.-Cl. Bonichot, le 3 mai 1999, en réponse à l'intervention de Serge Guinchard sur le rôle et les pouvoirs du juge judiciaire dans l'application de la Conv. EDH.
[3]. CEDH, 23 mars 1995, Loizidou, série A, no 310, § 75.
[4]. B. Oppetit, Philosophie du droit, Dalloz, 1999, no 109, p. 124.
[5]. J. M. Sauvé, « Propos introductifs » au colloque sur L’influence de la Convention EDH sur l’organisation et le fonctionnement des cours suprêmes, Journée d’étude Soc. lég. comp. Paris 7 mars 2008, Annonces de la Seine, 31 mars 2008. « Le juge administratif et la protection des libertés et droits fondamentaux », Mélanges S. Guinchard, Dalloz 2010, 545.
[6]. G. Timsit, « Le concept de procès équitable », in Le procès équitable en droit processuel comparé, Séminaire 2000-2001 de l'École doctorale de droit comparé de Paris 1, Variations autour d’un droit commun, Travaux de Paris 1, Soc. Lég. comp. éd., déc. 2002, p. 25.
[7]. J. Rawls, Théorie de la justice, Le Seuil, coll. Points, 1997.
[8]. D. Salas, « État et droit pénal, le droit pénal entre Themis et dike », Droits, no 15, p. 77 s., spéc. p. 86.
[9]. S. Guinchard, « Vers une démocratie procédurale », Justices, nouvelle série, 1999/1, p. 91 s. V. aussi les écrits de Habermas.
[10] Sur cette garantie : M. Douchy-Oudot, « Le procès équitable », in Préparation au grand oral – Protection des libertés et des droits fondamentaux, [dir. S. Guinchard], Lextenso éd., 9e éd. 2014. N. Fricero et Ph. Pedrot, « Les droits spécifiques au procès civil », in Libertés et droits fondamentaux, Dalloz, 2013, 19e éd.
[11]. Louis Boyer, « La notion d'équité et son rôle dans la jurisprudence des Parlements », Mélanges Maury, 1960, t. 2, p. 257. V. Bolard, L’équité dans la réalisation méthodique du droit privé – Principes pour un exercice rationnel et légitime du pouvoir de juger, thèse (dacty.) Paris 1, dir. P. Mayer, mars 2006.
[12]. Édition Le Robert, sous la direction d'Alain Rey, v. équité.
[13]. Rép. Dr. civil, v. équité, no 1.
[14] B. Garnot et B. Lemesle [dir.], La Justice entre droit et conscience du XIIIème au XVIIIème siècel, Éditions universitaires de Dijon, collec. Histoires, 2014, compte-rendu par L. Cazaux, in Criminocorpus, Rev. d’histoire de la justice, des crimes et des peines, 2015, p. 477.
[15]. Vo équité, PUF, 1994, sous la direction de G. Cornu.
[16]. Il relaxa une prévenue de vol d’un pain dans un boulangerie, le 4 mars 1898, au motif que « la faim est susceptible d’enlever à à tout être humain son libre arbitre et d’amoindrir en lui, dans une grande mesure, la notion de bien et du mal ». Sur ce juge, V. Y. Ozanam, « Le bon juge Magnaud : l’équité face à la loi », Culture Droit, mai-juin 2006, p. 64.
[17]. Civ. 2e, 19 janv. 1983 : Gaz. Pal. 198, Pan., 177, obs. S. Guinchard ; il ne peut pas non plus se fonder sur l'équité, Soc. 21 févr. 1980 : JCP 1980, IV, 176. – 11 mai 1994 : D. 1995. 626, note C. Puigelier. – Civ. 3e, 22 mars 1995 : Gaz. Pal. 16 mai 1996, somm. ann., Vo Preuve, obs. Croze et Moussa). Justices, 1998/9, L'équité du juge.
[18]. V. Dictionnaire, Collins, English langage dictionnary, 1992, v. Equity.
[19]. S. Guinchard, « Le procès équitable, droit fondamental ? » AJDA, no spécial, juill.-août 1998, p. 191. – « Le procès équitable, garantie formelle ou droit substantiel ? » Mélanges Farjat, 1999. – Opinion dissidente du juge Lopes Rocha, ss CEDH 20 févr. 1996, Lobo Machado c/ Portugal : Rec. 1996-I, vol. 3, p. 210.
[20] P. Spinosi, « Quel regard sur la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur le procès équitable ? », Nouv. Cah. Cons. const., 2014/44, p. 23.
[21]. Déc. no 89-260 DC, 28 juill. 1989, COB : RFDA 1989. 671, note B. Genevois.
[22]. Déc. no 95-360 DC, 2 févr. 1995, Injonction pénale : D. 1995, chron. 171, J. Pradel et 201, Volff ; RFD const. 1995-22, 405, note Th. Renoux ; D. 1997, somm. 130, obs. Th. Renoux.
[23]. Déc. no 86-215 DC, 3 sept. 1986, Lutte contre la criminalité (consid. 18) : RSC 1987. 567, chron. Loloum et Nguyen Huu ; RD publ. 1989, 399, note L. Favoreu.
[24]. RD publ. 2009/1, 248, obs. D. Rousseau et P.Y. Gahdoun.
[25]. RTD civ. 1928. 371.
[26] M. H. Evans, « Les vertus criminologiques de l’équité processuelle : le modèle LJ-PJ-TJ », AJPénal 2016, 129 [LJ = légitimité de la Justice ; PJ = procedural justice ; TJ = therapeutic justice].
[27]. B. Oppetit, Philosophie du droit, op. cit., no 109, p. 124.
[28]. Psaume 84-II. V. aussi dans la Bible, Ezéchiel, 18, 5 et 8-9 : « si un homme est juste, s’il agit selon l’équité et la justice ; [...] s’il détourne sa main de l’iniquité et s’il rend un jugement équitable entre deux hommes qui plaident ensemble : celui-là est juste ».
[29]. Par ex., décision du 23 oct. 1993, Arvo Karttunen c/ Finlande, no 387/1989, rapport du comité, A/48/40, partie I, p. 201 et partie II, p. 134.
[30] CEDH, gr. ch., 13 sept. 2016, n° 50541/08, 50571/08, 40351/09, Ibrahim et alii c/ Roy-Uni, JCP 2016, 1010, L. Milano.
[31] Présentation reprise par S. Amrani-Mekki, in « La fondamentalisation du droit du procès, Rev. dr. Assas, 2015/11, p. 72.
[32] Cette question n’a jamais été traitée sous cet angle pour l’ensemble des trois contentieux, tout au moins à notre connaissance. Néanmoins, on peut consulter, sur certains aspects ou certains contentieux les études suivantes :
- pour le contentieux administratif, R. Abraham, Les incidences de la CEDH sur le contentieux administratif français, RFDA, 1990, 1053. - F. Moderne, Le juge administratif français et les règles du procès équitable, RUDH, 1991, 352. - L. Sermet, CEDH et contentieux administratif français, économica, 1996.
- pour la procédure civile, Vincent et Guinchard, Procédure civile, 24 éd., 1996, Dalloz éd., n° 22 et les renvois de l’index, V° Droit processuel européen ; G. Rouhette, La procédure civile et la CEDH, colloque de la Cour de cassation, Le nouveau code de procédure civile : vingt ans après, 18 et 19 déc. 1997, à paraître, Doc. fr.
- pour la procédure pénale, Les nouveaux développements du procès équitable au sens de la CEDH, colloque organisé par la Cour de cassation et l’Université de Strasbourg, 22 mars 1996, Bruylant éd. 1996, spéc. rapport introductif par R. Koering-Joulin. - F. Boulan, La conformité de la procédure pénale française avec la CEDH, Mélanges Larguier, PUF, 1993, p. 21. - V. aussi les Mélanges Levasseur, Gaz. Pal. et Litec, 1992 (notamment articles R. Koering-Joulin, p. 205 ; D. Mayer, p. 239 ; Pettiti, p. 249).
[33] Et sur lesquelles, v. notamment Bruno Genevoix, La jurisprudence du Conseil constitutionnel, STH éd. 1988. - Marie-Luce Pavia, éléments de réflexion sur la notion de droit fondamental, Les Petites affiches, 6 mai 1994, p. 6. - V. Champeil-Desplats, La notion de « droit fondamental » et le droit constitutionnel français, D. 1995, chron. 323.
[34] L. Favoreu, Droit de la Constitution et constitution du droit, RFDC, 1990, p. 71 et s., spéc. p. 81-82 ; Universalité des droits fondamentaux et diversité culturelle, in L’effectivité des droits fondamentaux dans les pays de la communauté francophone, colloque international de l’Île Maurice, 29 sept. - 1er oct. 1993, AUPELF/UREF éd., 1994, p. 48. - V. aussi, J.J. Israël, Droit des libertés fondamentales, LGDJ, 1998, p. 35.
[35] CEDH, 8 février 1996.
[36] Et sur lesquelles v. Serge Guinchard, Le procès équitable, garantie formelle ou droit substantiel ? à paraître Mélanges Farjat.
[37] Régis de Gouttes, L’enchevêtrement des normes internationales relatives au procès équitable : comment les concilier ? Rapport au colloque organisé par l’Université de Strasbourg et la Cour de cassation, Les nouveaux développements du procès équitable au sens de la CEDH, 22 mars 1996, Bruylant éd. 1996, p. 139.
[38] Chronique tenue par Jean Dhommeaux. - V. aussi pour une synthèse des 331 décisions rendues en matière de communications individuelles à la date de juillet 1993, P. Tavernier, Le droit à un procès équitable dans la jurisprudence du Comité des droits de l’homme des Nations Unies - Les communications individuelles, Rev. trim. dr. hom., 1996, n° 25, p. 3.
[39] Décision du 8 novembre 1996, affaire R. Faurisson c/France, Rev. jur. Ouest, 1997/3, 251, chron. J. Dhommeaux (Liberté d’expression et négationnisme. La loi Gayssot et le pacte international...).
[40] En mars 1996 et sur les cinq dernières années, M.Régis de Gouttes, op. et loc. cit., relevait seulement deux arrêts de la Chambre criminelle de la Cour de cassation intéressant le procès équitable et visant l’article 14 du Pacte international, 7 mars 1990 et 4 février 1991, l’un et l’autre sur l’application de la règle non bis in idem. Les juridictions du fond ne sont guère prolixes, un jugement du tribunal administratif de Strasbourg du 8 décembre 1994 (RUDH 1995, n° 4-6), un arrêt de la Cour de Douai et un jugement du tribunal d’instance de Caen, sans aucune référence à la jurisprudence du Comité des droits de l’homme.
[41] Fr. Sudre, JCP 98, I, 100, p.10.
[42] J.Cl. Soyer et M. de Salvia, in La convention européenne des droits de l’homme, commentaire article par article, sous la direction de L.E. Pettiti, E. Decaux et P.H. Imbert, économica, 1995, p. 251.
[43] J.Cl. Soyer, La loi nationale et la Convention européenne des droits de l’homme, in Mélanges Foyer, PUF, 1997, p. 137.
[44] CEDH, 8 juin 1976, arrêt Engel c/ Pays-Bas, série A, n° 22, § 81 ; V. Berger, Jurisprudence de la Cour européenne des droits de l’homme, 5ème, éd. 1996, n° 73, § 572 et s.
[45] CEDH, 27 fév. 1980, arrêt Deweer c/ Belgique, série A, n° 35 ; V. Berger, op. cit., n° 43, § 352 et s. - 27 fév. 1992, arrêt Stenuit c/ France, série A, n° 232-A.
[46] CEDH, 21 fév. 1984, arrêt Öztürk c/ Allemagne, série A, n° 73 ; Clunet, 1986, 1051, obs. P. Tavernier ; V. Berger, op. cit., n° 99, § 736 et s.
[47] CEDH, 28 juin 1984, arrêt Campbell et Fell c/ Royaume Uni, série A, n° 80 ; V. Berger, op. cit., n° 59, § 454 et s.
[48] CEDH, 22 mai 1990, arrêt Weber c/ Suisse, série A, n° 177.
[49] CEDH, 27 août 1991, arrêt Demicoli c/ Malte, série A, n° 210 ; V. Berger, op. cit., n° 60, § 466 et s.
[50] Rapport de la Commission, 8 oct. 1987, rapport 31, affaire Von Sydow c/ Suède.
[51] V. le colloque organisé par l’Institut de Droit européen des Droits de l’homme, Montpellier, 13 et 14 mars 1998.
[52] CEDH, 8 juin 1976, arrêt Engel c/ Pays-Bas, série A, n° 22 ; V. Berger op. cit., n° 73, spéc. §577, p. 216.
[53] CE, 14 fév. 1996, AJDA, 1996, 403, note Stahl et Chauvaux ; JCP 1996, II, 22669, note Lascombe et Vion, RFDA, 1996, 399 et concl. Sanson, p. 1186.
[54] CE, 27 oct. 1978, arrêt Debout, Rec., p. 395, concl. Labetoulle.
[55] CE, 5 mai 1982, arrêt Bidalou, D. 1984, 103, note F. Hamon.
[56] CE, 26 mai 1995, arrêt Helle.
[57] CE, 7 juill. 1995, arrêt Mbaye, Rev. crit. dr. inter. pr. 1996, 83, note (crit.) Lagarde ; RFDA 1995, 1072.
[58] CE, Prés. Sect. Cont., 22 mars 1991, arrêt Sti, Rec., p. 100, D. 1991, IR, 113, RFDA, 1991, 530. - 25 mars 1996, Clunet, 1996, 937, note F. Julien-Laferrière.
[59] CE, 20 juill. 1990, arrêt Mbuta, Les Petites affiches, 19 sept. 1990. - 7 nov. 1990, arrêt Mme Serwaah, AJDA, 1990, 867, chron. E. Honorat et R. Schwartz ; RFDA, 1990, 1099.
[60] CE, 22 nov. 1985, arrêt Bonamour, D. 1986, IR, 147, obs. Llorens, JCP 1986, II, 20664, concl. Latournerie, Rev. dr. san. soc., 1986, 330, note Lévy.
[61] CE, 21 déc. 1979, arrêt Vimare, D. 1980, 225, note Madiot.
[62] CE, 19 déc. 1980, arrêt Roques, Rev. adm. 1981, 146, concl. B. Genevois (problème de la compatibilité avec la Convention de la non-publicité des audiences. - 19 juin 1991, Ville d’Annecy, qui rejette le moyen tiré de la non-publicité des audiences devant la Cour, AJDA, 1992, 150, concl. R. Abraham ; RFDA, 1991, 700. - CE, 6 janv. 1995, arrêt Nucci, AJDA, 1995, 161, JCP 1996, II, 22592, note Degoffe : les arrêts condamnant les ordonnateurs pour gestion de fait ne sont rendus, ni en matière pénale, ni en matière civile.
Cour des comptes, 11 mars 1993, arrêt Carignon et autres, D. 1993, 534, note J. Magnet. - 4 nov. 1993, arrêt Commune de la Ciotat, JCP 1994, I, 3736, n° 1, obs. Picard.
[63] CEDH, 18 mars 1997, arrêt Mantovanelli c/ France, D. 1997, Somm. com. 361, obs. S. Perez ; AJDA, 1997, 987, obs. Flauss ; RTDCiv. 1997, 1007, obs. Marguenaud et Raynard ; JCP 1998, I, 107, n° 24, obs. Sudre.
[64] Crim. 26 oct. 1993, Bull. n° 312.
[65] CEDH, 24 nov. 1993, arrêt Imbrioscia c/ Suisse, série A, n° 27, § 36.
[66] CEDH, 27 fév. 1980, arrêt Deweer, série A, n° 35 ; V. Berger, op. cit., n° 43, § 352 et s.
[67] Commission, affaire Huber c/ Autriche, Annuaire de la Convention, vol. 18, § 67. Affaire Hätti c/ RFA, Annuaire de la Convention, vol. 19, § 50.
[68] CEDH, 30 mars 1989, arrêt Lamy, série A, n° 151 ; V. Berger, op. cit., n° 34, § 285 et s.
[69] Arrêt Mouillot, Noir, Patrick Poivre d’Arvor et autres, D. 1997, 334, note Renucci ; JCP 1997, II, 22823, note Pralus, Dr. pénal, 1997, comm. 63, obs. J.-H. Robert ; Dr. affaires, 1997, 780, note H. Matsopoulou ; Rev. sociétés, 1997, 156, obs ? Bouloc ; RTDCom. 1997, 693, obs. Bouloc ; Justices, 1997-7, 193, obs. D. Rebut..
[70] Commission, affaire Huber, c/ Autriche, Annuaire de la Convention, vol. 18, §67.- Affaire Hätti c/ RFA, Annuaire de la Convention, vol. 19, § 50.
[71] Commission, 19 mai 1994 et CEDH, 23 octobre 1995, affaire Gradinger c/ Autriche, Justices, 1996-3, p. 249, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; V. Berger, op. cit., n° 103, § 762 et s.
[72] Crim. 20 juin 1996, D. 1997, 249, note Tixier et Lamulle.
[73] CE, Avis, 4 avril 1997, affaire Jammet, Req. n° 183658 : Courrier juridique des finances, mai 1997, p. 6 ; D. 1997, IR, 125.
[74] Conseil de la concurrence, décision n° 95-D-76, 29 novembre 1995, BOCC, 15 mai 1996, 174.
[75] Décision déc. 97, D.21, Appareils de détection des métaux, BOCCRF, n° 12, 8 juill. 1997 ; Justices, 1997-8, 159, obs. L. Idot.
[76] CJCE, 13 février 1969, arrêt Walt Wilhem, aff. 14/68 : Rec. p. 1.
[77] Sur ce problème, v. R. Abraham, Les incidences de la CEDH sur le contentieux administratif français, RFDA, 1990, 1061. - J.- M. Woerling Le juge administratif et les dispositions de la CEDH relatives aux accusations en matière pénale, RFDA, 1994, 41 - Ravanas, note au D. 1994, 387.
[78] CE, 8 déc. 1995, arrêt Mouvement de défense des automobilistes, JCP 1996, IV, p. 44 ; RFDA, 1996, 166.
[79] Crim. 26 juin 1996, Bull. n° 277.
[80] Commission, 29 mai 1997, affaire J. Malige c/ France, Gaz. Pal. 29 juill. 1997, note G. Rio et Th. Berthelot ; ibid. 24 janv. 1998, note XXX ; AJDA, 1997, 981, obs. Flauss.
[81] CEDH, 27 fév. 1980, arrêt Deweer c/ Belgique, série A, n° 35, § 49 : « en un domaine qui relève de l’ordre public des états membres du Conseil de l’Europe, une mesure ou une solution dénoncées comme contraire à l’article 6 appellent un contrôle particulièrement attentif » ; V. Berger, op. cit., n°43, §352 et s.
[82] CEDH, 10 fév. 1983, arrêt Albert et Le Compte, série A, n° 58,§35 ; V. Berger, op. cit. n° 48, p. 155.
[83] CEDH, 25 fév. 1992, arrêt Pfeifer et Plankl, série A, n° 227, §38.
[84] CEDH, 21 février 1975, arrêt Golder, série A, n° 18, §36 ; V. Berger, op. cit., n° 38, § 315 et s.
[85] CE 7 janv. 1972, Rec. p. 26, concl. Théry.
[86] Décision n° 93-325 DC, 13 août 1993, Rev. fr. dr. adm. 1993, 871, note Genevoix ; Rev. fr. dr. const. 1993-15, 587, note Favoreu ; RDP 1994, 1, note Luchaire ; Dr. social, 1994, 69, note Dupeyroux et Prétot.
[87] Décision 93-335 DC, 21 janv. 1994, JCP 94, I, 3761, n° 9 et 35, obs. Picard ; Rev. fr. dr. const. 1994, 364, obs. Mélin-Soucramanien ; D. 1995, Som. com. 302, obs. Gaïa ; Justices, 1995-1, 204, obs. Molfessis ; Rev. fr. dr. adm. 1995, 7, obs. Hocreitère ; RDP 1995, 91, obs. Rousseau.
[88] Décision 96-373 DC, 9 avril 1996, AJDA 1996, 371, obs. Schrameck ; RDP 1996, 953, note Luchaire et 1997, 18, obs. D. Rousseau ; Rev. fr. dr. adm. 1996, 584, obs. Renoux ; Justices, 1997-5, 247, obs. G. Drago et N. Molfessis ;Rev. fr. dr. const. 1996-27, 596, obs. Th. Renoux.
[89] CE, Prés. Sect. cont., 29 juin 1992, arrêt Madame Ghunsun, Rec. p. 981.
[90] CE 8 déc. 1995, arrêt Mouvement de défense des automobilistes, RFDA 1996, 166 ; JCP 96, IV, 44.
[91] CEDH, 27 avril 1988, arrêt Boyle et Rice c/ Royaume Uni, Clunet, 1989, 801, obs. Rolland et Tavernier ; V. Berger, op. cit., n° 102, § 754 et s., p. 279.
[92] V. par ex. CEDH ; 23 octobre 1997, arrêt National et Provincial Building Society et alii c/ Royaume Uni, JCP 1998, I, 107, n° 25, obs. (crit.) Sudre, qui admet qu’un état, partie prenante à un procès pendant devant les juridictions, puisse valider rétroactivement des dispositions fiscales objet de cette procédure.
[93] CE 17 janvier 1995, arrêts Marie (détenus) et Hardouin (militaires) Les Petites affiches, 28 avril 1995.
[94] CE 11 juill. 1947, arrêt Dewawrin, Rec. 307. - 13 juill. 1963, arrêt Chenal, Rec. 446. - 4 mai 1979, arrêt Comité d’action des prisonniers, Rec. 182.
[95] Civ. 2ème, 27 juin 1984, JCP 1984, IV, 288 ; RTDCiv. 1984, 775, obs. Perrot. - Versailles, 26 oct. 1989, Gaz. Pal. 1990, Som. 193. - Paris, 13 déc. 1996, Gaz. Pal. 27 fév. 1997, Som., concl. B. Ghizardin. - V. Bolard, L’appel-nullité, D. 1988, chron. 177 ; Justices, 1996-4, 119, Les recours-nullité en procédure civile. - O. Barret, L’appel-nullité dans le droit commun de la procédure civile, RTDCiv. 1990, 199. - Honorat et Mas, Les perspectives de l’appel-nullité, rapport au colloque sur les procédures collectives, Nice, 28 mars 1987, Les Petites affiches, 1er, juill. 1987.
[96] V. les références citées in Vincent et Guinchard, Procédure civile, Dalloz, 24ème éd., 1996, n° 1388, p. 846, en note.
[97] En matière commerciale, Com. 25 janv. 1994, D. 1994, 325, rapport Pasturel et 379, note Derrida. - 26 avr. 1994, 542, note Derrida et chron. Vasseur, 317. - 11 oct. 194, D. 1994, 297, rapport Réméry. - En matière civile, pour un recours contre un changement de régime matrimonial, Aix, 15 nov. 1993, Justices, 1995-1, 250, note G. Wiederkehr.
[98] Civ. 2ème, 17 juin 1987, D. 1987, Som. 359, obs. Julien. - Civ. 1ère, 9 oct. 1990, D. 1991, 571, note M. Santa-Croce ; RTDCiv. 1991, 603, obs. Perrot ; Rev. arb. 1991, 305, note Noboyet-Hoegy ; 6 nov. 1991, 73 et chron. Delbecque, p. 19 ; Gaz. Pal. 1991, Somm. 348, obs. Croze et Morel.
[99] Serge Guinchard, Le second degré de juridiction, rapport de synthèse, colloque pour le XXème anniversaire de la Cour d’appel de Versailles, 22 mai 1996, Gaz. Pal. 10 sept. 1996.
[100] G. Bolard, loc. cit. Justices, 1996-4.
[101] N. Fricéro, L’excès de pouvoir, à paraître, Rev. générale des procédures, Dalloz, 1998-1, spéc. n° 4 et 20 et s.
[102] Crim. 26 fév. 1997, Bull. n° 78 ; D. 1997, 297, note Pradel ; JCP, 1997, II, 22865, note Haritimi Matsopoulou.
[103] Contra, Pradel, note préc., p. 301, col. Gauche, pour qui « la solution n’est pas douteuse ».
[104] V. notre conférence sur Le procès équitable, garantie formelle ou droit substantiel ? Entretiens de Nanterre, 8 mars 1997 et l’article qui en est issu aux Mélanges Farjat, à paraître.
[105] Cass. 12 mai 1812, Juris. Gén., V° Cassation, n° 94.
[106] TGI Paris, 1ère chambre 5 novembre 1997, Gaz. Pal. 8 nov. 1997 ; D. 1998, 8, note M.A. Frison-Roche.
[107] CEDH, 24 oct. 1989, arrêt H. c/ France, RFDA, 1990, 203.
[108] TGI Paris, 1ère chambre, 6 juill. 1994, Gaz. Pal. 1994, 37, obs. Petit ; JCP 1994, I, 3805, n° 2, obs. Cadiet ; Dr. et Patrimoine, 1995, p. 9, obs. F. de la Vaissière.
[109] Annotation du Code de l’organisation judiciaire, sous l’article L. 781-1, in Code de procédure civile, Litec éd. 1997-1998, note 15, p. 915.
[110] Phrase extraite de la thèse de Louis Favoreu, Du déni de justice en droit public français, LGDJ 1964, p. 534.
[111] Sur lesquels, v. Serge Guinchard, Mélanges G. Cornu, PUF, 1994.
[112] CEDH, 30 oct. 1991, arrêt Borgers c/ Belgique, série A, n° 214-A ; V. Berger, op. cit., n°70, §553 et s.
[113] CE 18 nov. 1964, arrêt Rainaut, AJDA, 1965, 408, note Paulin.
[114] CE 13 déc. 1968, arrêt Association syndicale des propriétaires de Champigny-sur-Marne, RDP 1969, 512, note Walin.
[115] CE 31 oct. 1980, arrêt FNUJA et FEN, D. 1991, 111, obs. Delvolvé ; JCP 1983, II, 20003, note Auby.
[116] Crim. 6 juill. 1993, D. 1993, 430.
[117] Décisions 76-70 DC, 2 déc. 1976, RDP 1978, 817, note Favoreu ; RSC 1978, 274, obs. Reinhard. - 81-127 DC, 19-20 janv. 1981 ,JCP 1981, II, 19701, note Franck, Grandes décisions Favoreu et Philip, 9ème éd. 1997, n°31. - 325 DC, 12-13 août 1993 : Rec. p. 224 ; Justices, 1995-1, 201, note Molfessis ; Grandes décisions par Favoreu et Philip, 9ème éd. 1997, n° 47, p. 829 ; RFDC 1993-15, p. 587, note Favoreu ; RFDA, 1993, p. 871, note Genevoix ; RDP, 1994, 5, note Luchaire ; Dr. social, 1994, 69, note Dupeyroux et X. Pretot.
[118] Décision 86-224 DC, 23 janv. 1987, considérant 19, Rec. p. 8 ; D. 1988, 117, note Luchaire ; JCP 1987, II, 20854, note Sestier.
[119] Décision 93-326 DC, 11 août 1993, JO, 15 août ; D. 1993, 299, note Pradel ; JCP 1993, I, 3720, F. Le Gunehec ; RFDC 1993-16, 849, note Renoux ; Les Petites affiches, 5 janv. 1994, note B. Mathieu et M. Verpeaux.
[120] Cass. Ass. Plénière, 30 juin 1995, D. 1995, 513, concl. Jéol, note R. Drago ; JCP 1995, II, 22748, note Perdriau et Bull. inf. Cass. 1er août 1995, rapport Ancel.
[121] CEDH, 25 sept. 1992, arrêt Pham Hoang c/ France, n° 243.
[122] Crim. 5 déc. 1978, D. 1979, 50, note R. Koering-Joulin.
[123] Pau (Premier président), 27n juill. 1992, Clunet, 1993, 913, obs. Fr. Julien-Laferrière.
[124] Civ. 2ème, 5 fév. 1992, D. 1992, 442, note Burgelin et D. 1993, 53, note Waschmann ; Gaz. Pal. 1992, Doct. 242, Bertin et concl. Dubois de Prisque, p. 216.
[125] Com. 3 janv 1996, JCP 1996, II, 22658, note Gibirila ; RTDCom. 1996, 485, obs. Champaud et Danet.
[126] Decheix, Droits de la défense et défense des droits, Petites affiches, 3 avril 1996.
[127] CEDH, 24 fév. 1995, arrêt Mc Michel c/ Royaume-Uni, série A, n° 308, D. 1995, 449, note Huyette.
[128] Civ. 1ère, 24 oct. 1995, D. 1996, 513, note Massip.
[129] Ibid..
[130] CEDH, 24 fév. 1995, Mc Michel c/ Royaume Uni, série A, n° 308, D. 1995, 449, note M. Huyette.
[131] RSC 1996, 878, note Dintilhac.
[132] D. 1997, Som. com. 149, obs. Pradel.
[133] CEDH, 18 mars 1997, arrêt Fourcher c/ France, D. 1997, Som. com. 360, obs. Renucci.
[134] Crim. 19 sept. 1895, Bull. 243. - 9 mars 1976, JCP 19780, II, 19437, note A. Mayer-Jack. - 10 déc. 1986, D. 1987, 165, note D. Mayer. - 19 janv. 1994, Dr. pénal, 1994, comm. 97, concl. Perfetti et chron. 94, rapport Verdun.
[135] Crim. 5 juin 1989, Bull. n° 232.
[136] Crim. 13 mai 1985, Bull. 180.
[137] Crim. 14 avril 1992, Bull. n° 161.
[138] CEDH, 22 sept. 1994, arrêts Lala et Pelladoah c/ Pays-Bas, série A, n° 297, A et B.
[139] Versailles, 24 sept. 1996, Dr. pénal, janv. 1998, n° 11, obs. Maron.
[140] Crim. 12 fév. 1996, D. 1996, Som. com. 260, obs. Pradel.
[141] CEDH, 13 mai 1980, arrêt Artico c/ Italie, série A, n° 37, § 36 ; V. Berger, op. cit. n° 91, § 681 et s.
[142] CEDH, 20 fév. 1996, arrêt Lobo Machado c/ Portugal, § 31 et arrêt Vermeulen c/ Belgique, § 33, AJDA, 1996, 1013, note Flauss, JCP 1997, I, 4000, n° 19, obs. Sudre, Petites Affiches, 2 oct. 1996, note W. Sabete ; Recueil 1996-I, vol. 3, p. 195 et 224 ;RTDCiv. 1996, 1028, obs. Marguenaud ; 1997, 992, obs. Perrot et 1006, obs. Marguenaud et Raynard ; RTDEurop. 1997, 373, note Fl. Benoît-Rohmer, D. 1997, Som. com., 208, obs. Fricéro. Sur les rapports de la Commission dans les mêmes affaires, Justices, 1996-3, 233, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. Et déjà, Commission, 28 juin 1995, avis Alkin c/ Autriche, AJDA, 1996, 384. Ces deux arrêts ont été analysés sous l’angle de la pratique française par M. le Procureur général BURGELIN dans son allocution de rentrée de la Cour de cassation le 10 janvier 1997 : Rapport de la Cour de cassation 1996, Doc. fr. 1997, 47.
[143] CEDH, 25 juin 1997, arrêt Van Orshoven c/ Belgique, D. 1997, Som. com. 358, obs. Fricéro ; AJDA, 1997, 988, obs. Flauss. V. aussi les avis rendus par la Commission contre la Belgique et qui vont dans le même sens : 4 sept., 16 oct. 1996 ; 15 janv. et 21 mai 1997, cité par Flauss, AJDA, 1997, 988.
[144] Commission, 10 oct. 1994, affaire Lassauzet et Guillot c/ France, AJDA, 1996, 384, obs. Flauss.
[145] CEDH, 22 février 1996, arrêt Bullut c/ Autriche, AJDA, 1996, 1013, note Flauss, JCP, 1997,I, 4000, n° 10, obs. Sudre ; Recueil, 1996-II, Vol. 5, p. 346.
[146] Crim. 18 déc. 1996, Dr. pénal, juin 1997, n° 86, obs. Maron. - 5 nov. 1997, D. 1998, IR, 27.
[147] CEDH, 18 fév. 1997, Nideröst-Huber c/ Suisse, § 23, Rec. 1997-1, Vol. 29, p. 101 ; AJDA, 1997, 987, obs. Flauss.
[148] CEDH, 24 nov. 1997, Werner cAutriche, n° 682, Bulletin du greffier, 24-28 nov. 1997 ; JCP 1998, I, 107, n° 7, obs. Sudre.
[149] CEDH, 24 nov. 1997, arrêt Werner c/Autriche, n° 682, Bull. du greffier, 24-28 nov. 1997 ; JCP 1998, I, 107, n° 7, obs. Sudre.
[150] Civ. 1ère, 3 mars 1986, Bull., I, n° 149. - 6 mars 1996, Justices, 1996-4, 329, obs. H. Muir Watt (Contre une géométrie variable des droits fondamentaux de la procédure).
[151] H. Muir Watt, op. et loc. cit.
[152] Civ. 1ère, 3 mars 1992, Bull. I, n° 73 ; JCP 1993, II, 21997, note (crit.) E. du Rusquec ; RTDCiv. 1993, 199, obs. (crit.) Perrot et 881, obs. (crit.) Normand. - Civ. 2ème, 13 mars 1996, D. 1996, Som. com. 356, obs. (crit.) Julien. - E t déjà, Viatte sous Civ. 2ème, 7 mai 1980, Gaz. Pal. 1980, 669. - Rives, RTDCiv. 664, n° 46. - Vincent et Guinchard, op. cit. n° 527, c), 3, in fine, p. 399.
[153] Civ. 2ème, 5 fév. 1997, D. 1997, IR, 63.
[154] CEDH, 26 août 1987, arrêt de Haan c/ Pays-Bas, AJDA, 1997, 987, obs. Flauss ; JCP 1998, I, 107, n° 26, obs. Sudre.
[155] Civ. 2ème, 5 fév. 1997, D. 1997, IR, 63 ; Procédures, avr. 1997, obs. Perrot ; RTDCiv. 1997, 513, obs. Perrot.
[156] Civ. 2ème, 3 nov. 1993, D. 1994, IR, 32.
[157] Crim. 29 avril 1996, Bull. n° 170 ; JCP 1996, II, 22700, note (réservée) P. Chambon.
[158] Crim., 29 fév. 1996, Bull. n° 99.
[159] Crim. 8 oct. 1996, Bull. inf. Cass., 1er mars 1997, n° 181.
[160] Jurisprudence constante depuis Crim., 9 fév. 1961, JCP 1961, II, 12004, rapport Combaldieu.
[161] CE, 14 fév. 1996, D. 1996, IR, 69.
[162] CEDH, 17 janv. 1970, arrêt Delcourt c/ Belgique, série A, n° 11.
[163] CEDH, 28 sept. 1995, arrêt Procola c/ Luxembourg, D. 1996, 301, note F. Benoit-Rohmer ; JCP 1996, I, 3910, n° 23, obs. Sudre ; RFDA, 1996, 777, Annexe à la chronique Autin et Sudre.
[164] CE, 25 janv. 1980, arrêt Gadiaga, Rec. p. 44, concl. Rougevin-Baville ; D. 1980, 270, note Peiser ; AJDA, 1980, 283, note Robineau et Feffer.
[165] CE, 5 avr. 1996, arrêt Syndicat des avocats de France, RFDA 1996, 1195, concl. Bonichot ; JCP 1996, IV, 1672, obs. M.-Ch. Rouault.
[166] CEDH, 24 nov. 1997, arrêt Werner c/ Autriche, § 45, JCP 1998, I, 107, n° 27, obs. Sudre.
[167] CEDH, 10 fév. 1983, arrêt Albert et Le Compte c/ Belgique, série A, n° 58, § 29 ; V. Berger, op. cit. n° 48, § 391-401.
[168] Cass. Ass. Plénière, 8 fév. 1993, D. 1993, Som., 190, obs. Julien.
[169] Civ. 1ère, 10 janv. 1984, JCP 1984, II, concl. Gulphe ; Gaz. Pal. 1984, 702, note A.D. ; RTDCiv. 1984, 771, obs. Perrot ; D. 1985, IR, 105, obs. Brunois. - 22 janv. 1985, Gaz. Pal. 1985, Pan. 179, obs. Guinchard et Moussa (avocats). - 10 déc. 1985, JCP 1987, II, 20749, note Pillebout (médecins).
[170] Civ. 1ère, 5 nov. 1991, D. 1992, IR, 37.
[171] Civ. 2ème, 20 nov. 1991, D. 1992, IR, 11.
[172] CEDH, 19 avr. 1994, arrêt Van de Hurk, AJDA, 1995, 138, obs. Flauss. - 9 déc. 1994, arrêt Ruiz Torija c/ Espagne, JCP 1995, I, 3825, n° 19, obs. Sudre ; Justices, 1996-3, 235, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[173] CEDH, 9 déc. 1994, arrêts Ruiz Torija et Hiro Balani c/ Espagne, D. 1996, Som. com. 202, obs. N. Fricéro ; Justices, 1996-3, 235, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[174] CEDH, 31 janv. 1996, arrêt Fouquet c/ France, (jugement de donné acte), Justices, 1997-5, 200, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; sur l’avis de la Commission, 12 oct. 1994, Rec. 1996-I, Vol. 1, p. 27.
[175] Civ. 2ème, 31 janv. 1985, Gaz. Pal. 1985, Pan. 124, obs. Guinchard. - 14 fév. 1990, Gaz. Pal. 1990, Som. 490, obs. Guinchard et Moussa.
[176] Bull. Assemblée plénière, juillet 1994, p. 9.
[177] Sur cette pratique et ses conséquences déplorables en matière fiscale, J. Lamarque, Le procès du procès, Mélanges J.-M. Auby, Dalloz, 1992, p. 149 et s., spéc. note 8 bis, p. 153.
[178] Crim. 13 nov. 1996, D. 1997, IR, 13.
[179] Cass. Ass. Plénière, 28 juin 1996, JCP 1996, I, 3972, obs. Périnet-Marquet ; ibid., II, 22 712, note Mémeteau ; D. 1996, 497, concl. Weber et note J.M. Coulon.
[180] Crim. 19 juin 1996, Bull. n° 263.
[181] CEDH, 25 oct. 1988,arrêt Martins Moreira, série A, n° 143, § 44 ; 24 mars 1994, arrêt Silva Pontès, série A, n° 286-A, § 33 ; Justices 1995-1, p. 170, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. 26 sept. 1996, arrêts Zappia et Di Pedde c/ Italie, JCP 97, I, 4000, n° 28, obs. Sudre ; D. 1997, Som. com. 209, obs. Fricéro.
[182] CEDH, 28 sept. 1995, arrêt Scollo c/ Italie, série A, n° 315-C, § 44 ; Justices, 1996-3, p. 238, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; RTDCiv. 1996, 1021, obs. Marguenaud.
[183] Commission, affaire D. et AAH (Hornsby) c/ Grèce, rapport du 23 octobre 1995, AJDA, 1996, 381, obs. Flauss.
[184] CEDH, 19 mars 1997, arrêt Hornsby c/ Grèce, série A, n° 147, Dr. adm. mai 1997, n° 185 ; AJDA, 1997, 986, obs. Flauss ; JCP 97, II, 22949, note Dugrip et Sudre ; RTDCiv. 1997, 1009, obs. Marguenaud et Raynard.
[185] Dugrip et Sudre, note préc., intitulé du B en seconde partie.
[186] Ibid., n° 24.
[187] CEDH, 28 sept. 1995, arrêt Scollo c/ Italie, série A, n° 315-C ; Justices, 1996-3, p. 238, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; RTDCiv. 1996, 1021, obs. Marguenaud.
[188] Dugrip et Sudre, note préc., n° 21.
[189] Boyer, La notion d’équité et son rôle dans la jurisprudence des Parlements, Mélanges Maury, 1960, t. 2, p. 257.
[190] édition Le Robert, sous la direction d’Alain Rey, V° équité.
[191] English language dictionnary, V° équity.
[192] « The principe used in law which allows a fair judgement to be made in a case where the existing laws do not provide a reasonnable answer to the problem ».
[193] Jestaz, Rép. Droit civil, V° Équité, n° 1.
[194] V° équité, PUF, 1994, sous la direction de G. CORNU.
[195] Civ. 2ème 19 janv. 1983, Gaz. Pal. 1983, Pan. 177, obs. Guinchard.
[196] Soc. 21 fév. 1980, JCP, 1980, IV, 176. 11 mai 1994, D. 1995, 626, note C. Puigelier. Civ. 3ème, 22 mars 1995, Gaz. Pal. 16 mai 1996, somm. ann., V° Preuve, obs. Croze et Moussa.
[197] Rev. trim. dr. civ. 1928, 371.
[198] Psaume 84-II.
[199] Régis de Gouttes, L’enchevêtrement des normes internationales relatives au procès équitable : comment les concilier ? Rapport au colloque organisé par l’Université de Strasbourg et la Cour de cassation, Les nouveaux développements du procès équitable au sens de la CEDH, 22 mars 1996, Bruylant éd. 1996, p. 139.
[200] Chronique tenue par Jean Dhommeaux. - V. aussi pour une synthèse des 331 décisions rendues en matière de communications individuelles à la date de juillet 1993, P. Tavernier, Le droit à un procès équitable dans la jurisprudence du Comité des droits de l’homme des Nations Unies - Les communications individuelles, Rev. trim. dr. hom., 1996, n° 25, p. 3.
[201] Décision du 8 novembre 1996, affaire R. Faurisson c/France, Rev. jur. Ouest, 1997/3, 251, chron. J. Dhommeaux (Liberté d’expression et négationnisme. La loi Gayssot et le pacte international...).
[202] Fr. Sudre, JCP 98, I, 100, p.10.
[203] Et sur laquelle v. M. Delmas-Marty, D. 1988, chron. 221.
[204] Notamment, sans que la liste soit exhaustive et pour s’en tenir aux rapporteurs du colloque précité du 22 mars 1996 à la Cour de cassation, G. Cohen-Jonathan (rapport de synthèse), J. Fr. Flauss et Jean Barthélémy, tous les trois auteurs de remarquables rapports sur les nouvelles frontières du procès équitable.
[205] J. VELU et R. ERGEC, La CEDH, Bruylant éd. Bruxelles, 1990, 435.
[206] CEDH, 9 octobre 1979, arrêt Airey, § 24.
[207] R. Koering-Joulin, Introduction générale au colloque précité sur les nouveaux développements du procès équitable, 22 mars 1996, p. 10.
[208] AJDA, 1997, 980, obs. Flauss.
[209] Gaz. Pal. 1981, 2, 775, note Delamarre (avocats). 26 sept. 1995, JCP 1996, I, 3910, n° 25, obs. Sudre.
[210] JCP 1984, II, 20210, concl. Gulphe.
[211] AJDA, 1996, 403, note Stahl et Chauvaux ; JCP 1996, II, 22669, note Lascombe et Vion.
[212] CEDH, 19 avril 1993, AJDA, 1993, 490, obs. Flauss. 23 juin 1993, arrêt Ruiz Matéos, AJDA, 1994, 19, obs. Flauss ; RFD cons. 1994, 175, obs. Cohen-Jonathan ; Clunet, 1994, 799, obs. P. Tavernier ; Justices, 1995-1, 152, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; Gaz. Pal. 19 juill. 1994, note Clément.
[213] Commission, 30 juin 1995, req. n° 24194/93, Justices 1996-3, 265, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[214] CEDH, 21 oct. 1997, Bull. p. 11, AJDA, 1997, 982, obs. Flauss ; JCP 98, I, 107, n° 18 (volet civil) et n° 19 (volet pénal), obs. Sudre.
[215] Obs. Sudre, JCP, 1998, I, 107, n° 19.
[216] CEDH, 16 sept. 1996, arrêt Süssman c/ Allemagne, JCP 1997, I, 4000, n° 15, obs. Sudre ; Rev. fr. dr. const. 1997, 383, obs. Flauss, AJDA, 1997, 985, obs. Flauss : « son rôle de gardien de la Constitution rend particulièrement nécessaire pour une cour constitutionnelle de prendre parfois en compte d’autres éléments que le simple ordre d’inscription au rôle d’une affaire, telle le nature de celle-ci et son importance sur le plan politique et social ».
[217] CEDH, 26 nov. 1992, deux arrêts : Francesco Lombardo c/ Italie, série A, n° 249, B§ 17 (gendarme réclamant un complément de pension) ; Giancardo Lombardo c/ Italie, série A, n° 249-C, § 16 (magistrat) ; AJDA, 1992, 109 et 1993, 20, obs. Flauss.
[218] Commission 1er octobre 1994 et 17 oct. 1995, affaire F.N. c/ France, AJDA, 1996, 378, Flauss ; Justices, 1996-3, 252, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[219] CEDH, 17 mars 1997, arrêt Neigel c/ France, AJDA, 19977 984, obs. Flauss ; JCP 1998, I, 107, n° 16, obs. Sudre.
[220] Par ex., refus de réintégration d’un fonctionnaire annulé par le juge administratif, rapport du 20 mai 1997, affaire Peltier c/ France, AJDA, 1997, 984, obs. Flauss.
[221] CEDH, 26 mars 1992, éd. Périscope c/ France.
[222] CEDH, 28 sept. 1995, Procola c/ Luxembourg (recours contre un règlement en matière économique qui avait trait au droit de transformer ou de vendre du lait sans un prélèvement complémentaire). 20 nov. 1995, British American Tobacco c/ Royaume Uni.
1 CEDH, 29 mai 1986, Clunet, 1987, 778, obs. P.T. ; 26 février 1993 (aides sociales) ; 9 déc. 1994 (cotisations), Clunet, 1995, 800, obs. P. T. ; Justices, 1996-3, 237, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. RTDH, 1996-25, 79, note Ch. Pettiti.
[224] CEDH, 23 oct. 1997, arrêt National et Provincial Building Society et alii c/ Royaume Uni, JCP 1998, I, 107, n° 17, obs. Sudre.
[225] CEDH, 27 août 1992, arrêt Tomasi, JCP 1993, I, 3654, n° 11, obs. Sudre.
[226] CEDH, 18 mars 1997, arrêt Mantovanelli c/ France, D. 1997, Som. com. 361, obs. S. Perez ; AJDA, 1997, 987, obs. Flauss ; RTDCiv. 1997, 1007, obs. Marguenaud et Raynard ; JCP 1998, I, 107, n° 24, obs. Sudre.
[227] Pour une amnde fiscale suisse en raison de son montant non négligeable et de son caractère « essentiellement punitif et dissusasif » (§ 46), CEDH, 29 août 1997, arrêt E.L., R.L., J ;O ;.-L., c/ Suisse, JCP 1998, I, 107, n° 21, obs. Sudre. Et aussi, CEDH, 24 sept. 1997, arrêt Garryffalou Aebe c/ Grèce, ibid.
[228] CEDH, 24 février 1994, arrêt Bendenoun, AJDA 1994, 512-515, obs. Flauss ; Justices, 1995-1, 154, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; JCP 1995, I, 3823, n° 16, obs. Sudre.
[229] Com. 29 avril 1997, arrêt Ferreira c/ Directeur général des impôts, Gaz. Pal. 15 mai 1997, Flash ; JCP 97, II, 22935, note Sudre.
[230] Arrêts Bendenoun et Garryfallou Aebe, préc.
[231] Pour la contrainte par corps en matière douanière, CEDH 8 juin 1995, arrêt Jamil c/ France, série A, n° 320, AJDA, 1995, 727, obs. Flauss. Pour une amende douanière , CEDH, 24 sept. 1997, arrêt Carafyllou AEBE c/ Grèce, AJDA, 1997, 982, obs. Flauss.
[232] V. supra, a).
[233] Commission, 29 nov. 1994, affaire Benham c/ Royaume Uni, Justices 1996-3, 242, obs. Cohen -Jonathan et Flauss.
[234] Commission, 11 oct. 1994, affaire Putz c/ Autriche, Justices 1996-3, 246, obs. Cohen-Jonathan et Flauss, qui assouplit la position de CEDH, 23 mars 1993, Ransvsborg c/Suède.
[235] CEDH, 22 février 1996, arrêt Putz c/ Autriche, Recueil 1996-I, Vol. 4, p. 312 ; RSC 1997, 469, obs. R. Koering-Joulin ; RTDH 1997, 493, note Fl. Massias ; Justices, 1997-5, 191, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. Et déjà, 23 mars 1994, affaire Ravnsborg c/ Suède, RTDH, 1994, 515, note Flauss.
[236] Crim. 26 oct. 1993, Bull. n° 312.
[237] CEDH, 24 nov. 1993, arrêt Imbrioscia c/ Suisse, série A, n° 27, § 36.
[238] CEDH, 27 fév. 1980, arrêt De Weer, série A, n° 35.
[239] Commission, affaire Huber c/ Autriche, Annuaire de la Convention, vol. 18, § 67. Affaire Hätti c/ RFA, Annuaire de la Convention, vol. 19, § 50.
[240] CEDH, 30 mars 1989, arrêt Lamy, série A, n° 151.
[241] CEDH, 10 fév. 1995, arrêt de Ribemont, Justices, 1996-3, 248, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[242] Sur lesquels, v. Serge Guinchard, Les procès hors les murs, Mélanges Cornu, PUF, 1994.
[243] CEDH, 20 oct. 1997, arrêt Serves c/ France, (§42), JCP 1998, I, 107, n° 20, obs. Sudre.
[244] CEDH, 27 fév. 1997, arrêt Dewers, série A, n° 35, §42.
[245] C. État, 7 juill. 1995, Rev. crit. dr. inter. pr. 1996, 83, note (crit.) P. Lagarde.
[246] C État, 25 mars 1996, Clunet, 1996, 937, note F. JULIEN-LAFERRIERE.
[247] CEDH, 26 sept. 1996, arrêt Miailhe c/ France, Justices, 1997-5, 193, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; AJDA 1997, 989, obs. Flauss. Dans l’attente de cet arrêt, v. les espérances, déçues, de J.P. Le Gall, à quel moment le contradictoire ? in Les nouveaux développements du procès équital, colloque préc. 22 mars 1996, p. 55.
[248] Commission, 6 avr. 1994, Justices, 1996-3, 236, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[249] CEDH, 17 déc. 1996, arrêt Saunders c/ Roy. Uni, AJDA, 1997, 988, obs. Flauss.
[250] CEDH, 7 août 1996, arrêt Hamer c/ France, Recueil, 996-III, Vol. 13, p. 1029JCP 1997, I, 4000, n° 16, obs. Sudre ; RSC 1997, 468, obs. R. Koering-Joulin ; D. 1997, Som. com. 205, obs. Renucci.
[251] Commission, 15 avril 1996, AJDA, 1996, 1010, note Flauss ; Justices, 1997-5, 191, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. CEDH, 9 déc. 1994, AJDA, 1995, 133, obs. Flauss. CEDH, 26 sept. 1996, Bull. d’inf. C. Cass. 15 janv. 1997, n° 1.
[252] Commission, 10 avril 1996, E.L., R.L. et J.O.L c/ Suisse, 18 avril 1996, A.P., M.P. et T.P. c/ Suisse, AJDA, 1996, 1010, obs. Flauss.
[253] CEDH, 20 fév. 1996, arrêt Lobo Machado c/ Portugal, § 31 et arrêt Vermeulen c/ Belgique, § 33, AJDA, 1996, 1013, note Flauss, JCP 1997, I, 4000, n° 19, obs. Sudre, Petites Affiches, 2 oct. 1996, note W. Sabete ; Recueil 1996-I, vol. 3, p. 195 et 224 ;RTDCiv. 1996, 1028, obs. Marguenaud ; 1997, 992, obs. Perrot et 1006, obs. Marguenaud et Raynard ; RTDEurop. 1997, 373, note Fl. Benoît-Rohmer, D. 1997, Som. com., 208, obs. Fricéro. Sur les rapports de la Commission dans les mêmes affaires, Justices, 1996-3, 233, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. Et déjà, Commission, 28 juin 1995, avis Alkin c/ Autriche, AJDA, 1996, 384. Ces deux arrêts ont été analysés sous l’angle de la pratique française par M. le Procureur général BURGELIN dans son allocution de rentrée de la Cour de cassation le 10 janvier 1997 : Rapport de la Cour de cassation 1996, Doc. fr. 1997, 47.
[254] CEDH, 25 juin 1997, arrêt Van Orshoven c/ Belgique, D. 1997, Som. com. 358, obs. Fricéro ; AJDA, 1997, 988, obs. Flauss. V. aussi les avis rendus par la Commission contre la Belgique et qui vont dans le même sens : 4 sept., 16 oct. 1996 ; 15 janv. Et 21 mai 1997, cité par Flauss, AJDA, 1997, 988.
[255] Commission, 10 oct. 1994, affaire Lassauzet et Guillot c/ France, AJDA, 1996, 384, obs. Flauss.
[256] CEDH, 22 février 1996, arrêt Bullut c/ Autriche, AJDA, 1996, 1013, note Flauss, JCP, 1997,I, 4000, n° 10, obs. Sudre ; Recueil, 1996-II, Vol. 5, p. 346.
[257] CEDH, 18 fév. 1997, arrêt Nideröst-Huber c/ Suisse, §23, Rec. 1997-1, Vol. 29, p. 101 ; AJDA, 1997, 987, obs. Flauss.
[258] CEDH, 25 septembre 1992, arrêt Pham Hoang c/ France, cité par Micel Jéol, Bull. inf. Cass. 1 août 1995, P. 8.
[259] Cass. Ass. plénière, 30 juin 1995.
[260] CEDH, 28 mars 1990, Clunet, 1991, 782, note P. T.
[261] CEDH 31 janv. 1996, Justices, 1997-5, 200, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; JCP 97, I, 4000, n° 5, obs. Sudre. Avis de la Commission, 12 oct. 1994, Rec. 1996-I, p. 25.
[262] Commission, 8 janv. 1993 et 2 mars 1994, Justices, 1996-3, 265, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[263] CEDH, 17 déc. 1996, série A, n° 722, arrêt Vacher c/ France ; Commission, 5 avril 1995, Justices 1996-3, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[264] CEDH, 23 oct. 1996, Levages prestations services c/ France, série A, n° 580, JCP 1997, I, 4000, n° 23, obs. Sudre ; Justices, 1997-5, 197, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. Contra, Commission, 5 avril 1996, même affaire, Justices, 1996-3, 241, obs. Cohen-Jonathan et Flauss ; Clunet, 1997, 251, obs. P.B.
[265] Commission, 9 janvier 1995, M. M. c/ France, Justices, 1996-3, 240, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. M. Santa-Croce, Le droit, l’honnête homme et l’article 1009-1, D. 1997, chron. 239.
[266] CEDH, 24 nov. 1997, arrêt Werner c/Autriche, n° 682, Bull. du greffier, 24-28 nov. 1997.
[267] CEDH, 18 mars 1997, arrêt Foucher c/ France, D. 1997, Som. com. 360, obs. Renucci ; RSC, 1997, 891, obs. Pettiti.
[268] CEDH, 23 oct. 1996, arrêt Ankerl c/ Suisse, Rec. 1996-V, Vol. 19, p. 1553.
[269] V. L’interprétation de la CEDH, colloque organisé par l’Institut de Droit européen des Droits de l’homme, Montpellier, 13-14 mars 1998.
[270] J. Cl. Soyer, La loi nationale et la CEDH, Mélanges Foyer, PUF, 1997, 125 et s.
[271] CEDH, 9 déc. 1994, arrêt Ruiz, série A, n° 303-A, § 29 et arrêt Hilani, série A, n° 303-B, § 27, c/ Espagne, Justices, 1996-3, p. 236, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[272] CEDH, 17 déc. 1996, arrêt Saunders c/ Roy. Uni, § 74, AJDA, 1997, 988, obs. Flauss.
[273] M. Delmas-Marty, Vers une autre logique juridique : à propos de la jurisprudence de la CEDH, D. 1988, chron. 221.
[274] Rapport précité, colloque du 22 mars, p. 180.
[275] CEDH, 22 sept. 1994, arrêts Lala et Pelladoah, série A, n° 297, A et B.
[276] Crim. 12 fév. 1996, D. 1996, Som. com. 260, obs. Pradel.
[277] CEDH, 13 mai 1980, arrêt Artico c/ Italie, série A, n° 37, § 36.
[278] Crim. 29 avril 1996, JCP 1996, II, 22 700, note (réservée) P. Chambon.
[279] Crim. 3 juin 1996, Bull. n° 277.
[280] Sur ce problème, v. R. Abraham, Les incidences de la CEDH sur le contentieux administratif français, RFDA, 1990, 1061. - J.- M. Woerling Le juge administratif et les dispositions de la CEDH relatives aux accusations en matière pénale, RFDA, 1994, 41 - Ravanas, note au D. 1994, 387.
[281] CE, 8 déc. 1995, arrêt Mouvement de défense des automobilistes, JCP 1996, IV, p. 44 ; RFDA, 1996, 166.
[282] Crim. 26 juin 1996, Bull. n° 277.
[283] Commission, 29 mai 1997, affaire J. Malige c/ France, Gaz. Pal. 29 juill. 1997, note G. Rio et Th. Berthelot ; ibid. 24 janv. 1998, note XXX ; AJDA, 1997, 981, obs. Flauss.
[284] CEDH, 27 fév. 1980, arrêt Deweer c/ Belgique, série A, n° 35, § 49 : « en un domaine qui relève de l’ordre public des états membres du Conseil de l’Europe, une mesure ou une solution dénoncées comme contraire à l’article 6 appellent un contrôle particulièrement attentif »
[285] CEDH, 10 fév. 1983, arrêt Albert et Le Compte, série A, n° 58,§35 ; V. Berger, op. cit. n° 48, p. 155.
[286] CEDH, 25 fév. 1992, arrêt Pfeifer et Plankl, série A, n° 227, §38.
[287] CEDH, 27 fév. 1980, série A, n° 35, §49.
[288] CEDH, 12 fév. 1985, arrêt Colozza c/ Italie, série A, n° 89, § 27. Commission, rapport du 5 mai 1983, série B, n° 72.
[289] CE 8 déc. 1995, Mouvement de défense des automobilistes, JCP 1996, IV, 44 ; RFDA, 1996, 166.
[290] Commission, rapport du 29 mai 1997, affaire Maligue c/ France, Gaz. Pal. 29 juill. 1997, Doctr. G. Rio et Th. Berthelot ; AJDA, 1997, 981, obs. Flauss.
[291] Crim. 19 juin 1996, Bull. n° 263.
[292] Crim. 13 nov. 1996, D. 1997, IR, 13.
[293] Cass. Ass. Plénière, 28 juin 1996, JCP 1996, I, 3972, obs. Périnet-Marquet ; ibid., II, 22 712, note Mémeteau ; D. 1996, 497, concl. Weber et note J.M. Coulon.
[294] Crim. 18 déc. 1996, Dr. pénal ; juin 1997, n° 86, obs. Maron.
[295] Flash Dalloz, 1998, 1er cahier.
[296] Arrêt Mouillot, Noir, Patrick Poivre d’Arvor et autres, D. 1997, 334, note Renucci ; JCP 1997, II, 22823, note Pralus ; Justices-1997-3, 193, obs. D. Rebut ; Dr. pénal, 1997, comm. 63, obs. J.-H. Robert ; Rev. sociétés, 1997, 693, obs. Bouloc ; RTDCom. 1997, 693, obs. Bouloc ; Dr. affaires, 1997, 780, note H. Matsopoulou.
[297] Commission, affaire Huber, c/ Autriche, Annuaire de la Convention, vol. 18, §67.- Affaire Hätti c/ RFA, Annuaire de la Convention, vol. 19, § 50.
[298] Didier Rebut, obs. préc. p. 193.
[299] B. Bouloc, obs. préc. p. 156.
[300] Ibid.
[301] Crim. 27 oct. 1997, Les Petites affiches, 1997, n° 134, note C. Ducouloux-Favard ; JCP 1998, II, 10017, note Pralus.
[302] Civ. 1ère, 24 oct. 1995, D. 1996, 513, note Massip.
[303] CEDH, 24 fév. 1995, X. c/ Royaume Uni, série A, n° 308, D. 1995, 449, note M. Huyette.
[304] Civ. 1ère, 3 mars 1994, Bull. I, n° 73 ; JCP 1993, II, 21997, note (crit.) E. du Rusquec ; RTDCiv. 1993, 199, obs. (crit.) Perrot et 881, obs. (crit.) Normand. - Civ. 2ème, 13 mars 1996, D. 1996, Som. com. 356, obs. (crit.) Julien. - Vincent et Guinchard, op. cit. n° 527, c), 3, in fine, p. 399.
[305] Bull. Assemblée plénière, juillet 1994, p. 9.
[306] CEDH, 19 avr. 1994, AJDA, 1995, 138, obs. Flauss ; 9 déc. 1994, JCP 1995, I, 3823, n° 19, obs. Sudre.
[307] J. Cl. Soyer, La loi nationale et la CEDH, Mélanges Foyer, PUF, 1997, 127.
[308] Décision DC 96-377, 16 juill. 1996, J.O. 23 juillet 1996, p. 11 110.
[309] CEDH, 24 nov. 1997, arrêts Szücs c/Autriche et Werner c/Autriche, n° 681 et 682, Bull. du greffier, 24-28 nov. 1997.
[310] J.Fr. Burgelin, in Rapport de la Cour de cassation pour 1996, Doc. fr. 1997, p. 47.
[311] Vincent et Guinchard, Procédure civile, 24ème éd. 1996, n° 11.
[312] Bruylant éd. 1996, p. 81.
[313] Cohen-Jonathan, Rapport au colloque du 22 mars 1996 préc., p. 170.
[314] CEDH, 23 fév. 1995, série A, n° 306-B, AJDA, 1995, 721, obs. Flauss.
[315] Ibid., p. 722.
[316] CEDH, 24 fév. 1995, arrêt Mc Michaël c/ Royaume Uni, série A, n° 307-B, § 87.
[317] CEDH, 7 août 1996, arrêt Zubani c/ Italie, AJDA, 1996, 1007, obs. Flauss.
[318] Opinion des juges Martens et Matscher sous CEDH, 25 avril 1996, arrêt Gustafsson c/ Suède, AJDA, 1996, 1007, obs. Flauss.
[319] Commission, 10 mai 1994, affaire Saunders c/ Royaume Uni, Justices, 1996-3, p. 244, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. CEDH, 17 déc. 196, même affaire, Rec. 1996-VI, Vol. 24, p. 2024.
[320] CEDH, 20 oct. 1997, arrêt Serves c/ France, Bull. du greffier de la Cour, p. 6.
[321] CEDH, 24 juin 1993, série A, n° 253, arrêt Schuler-Zgraggen.
[322] Commission, 19 mai 1994 et CEDH, 23 octobre 1995, affaire Gradinger c/ Autriche, Justices, 1996-3, p. 249, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[323] Crim. 20 juin 1996, D. 1997, 249, note Tixier et Lamulle.
[324] CE, Avis, 4 avril 1997, Jammet, Req. n° 183658 : Courrier juridique des finances, mai 1997, p. 6 ; D. 1997, IR, 125.
[325] Conseil de la concurrence, décision n° 95-D-76, 29 novembre 1995, BOCC, 15 mai 1996, 174.
[326] Décision déc. 97, D.21, Appareils de détection des métaux, BOCCRF, n° 12, 8 juill. 1997 ; Justices, 1997-8, 159, obs. L. Idot.jj
[327] CJCE, 13 février 1969, arrêt Walt Wilhem, aff. 14/68 : Rec. p. 1.
[328] Rapport du 19 janv. 1995, AJDA, 1995, p. 140, obs. Flauss ; Justices, 1996-3, p. 230, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[329] CEDH, 25 oct. 1988,arrêt Martins Moreira, série A, n° 143, § 44 ; 24 mars 1994, arrêt Silva Pontès, série A, n° 286-A, § 33 ; Justices 1995-1, p. 170, obs. Cohen-Jonathan et Flauss. 26 sept. 1996, arrêts Zappia et Di Pedde c/ Italie, JCP 97, I, 4000, n° 28, obs. Sudre ; D. 1997, Som. com. 209, obs. Fricéro.
[330] CEDH, 28 sept. 1995, arrêt Scollo c/ Italie, série A, n° 315-C, § 44 ; Justices, 1996-3, p. 238, obs. Cohen-Jonathan et Flauss.
[331] Commission, affaire D. et AAH (Hornsby) c/ Grèce, rapport du 23 octobre 1995, AJDA, 1996, 381, obs. Flauss.
[332] CEDH, 19 mars 1997, série A, n° 147, Dr. adm. mai 1997, n° 185 ; AJDA, 1997, 986, obs. Flauss ; JCP 97, II, 22949, note Dugrip et Sudre ; RTDCiv. 1997, 1009, obs. Marguenaud et Raynard.
[333] J. Cl. Soyer, loc. cit., p. 137.
[334] Voy. À propos des déclarations du président de la Chambre criminelle dans l’affaire du sang contaminé : « nous ne sommes pas capable de dire s’il y a empoisonnement. Le problème reste entier. La tromperie et l’empoisonnement sont deux faits juridiques distincts » (déclaration du 22 juin 1994). Un mois après un médecin déjà poursuivi pour tromperie était mis en examen pour empoisonnement...Sur l’ensemble de cette question, v. Maurice Peyrot, Le Monde, 17 janvier 1997.
[335] Com. 18 juin 1996 : Rev. Sc. Crim. 1997, 137, note J. Riffault-Tréca (qui casse Paris, 6 avril 1994, sur le fondement de l’article 6).- Paris, 15 janvier 1993 et 7 mai 1997 : Gaz. Pal. 29 mai 1997, Flash.- Contra, Paris, 10 sept. 1996 : Petites affiches, 23 octobre 1996, note Ducouloux-Favard ; Rev. Sc. Crim. 1997, 137, note J. Riffault-Tréca (les faits reprochés ne permettaient pas de les identifier aux manquements reprochés et la décision de poursuivre et celle de sanctionner le dirigeant de société ont été prises par un collège autrement composé).
[336] Paris, 7 mai 1997, affaire Oury, RD bancaire 1997, mai/juin, n° 61 ; Justices, 1997-8, 161, obs. L. Idot. Et déjà, Paris, 15 janv. 1993, arrêt Derveloy, RD bancaire, 1993, 93.
[337] V. pour et contre la prescription des crimes contre l’humanité, J. Boré, Le Fiagaro, 6 octobre 1997 et, en réponse, A. Lyon-Caen, Le Figaro, 20 oct. 1997.
[338] CEDH, 22 oct. 1996, arrêt Stubbings et autres c/ Royaume Uni, Rec. 1996-IV, Vol. 18, p. 1487.
[339] CEDH, 23 mars 1995, arrêt Loizidou, série A, n° 310, § 75.
[340] V. Lenoble, in La crise du juge, LGDJ et Story scientia éd.1990.
[341] Cité par Pierrette Poncela, Adrien Duport, fondateur du droit pénal moderne, Droits, 1993, n° 17.
[342] Corpus juris, sous la direction de Mireille Delmas-Marty, économica, 1997. Antoinette Perrodet, Étude comparée des Ministères publics anglais, gallois, écossais, français et italien, Vers un Ministère public de type européen, thèse (dacty.) Paris 1, 1997, spéc. la conclusion.

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