mardi 30 mai 2017

BELLES PAGES 23: LA JUSTICE PÉNALE CHEZ LES INUITS

Justice pénale et grand nord canadien


La justice canadienne chez les Inuits du Nouveau-Québec. Les territoires du grand nord canadien sont l’occasion pour cette grande démocratie de mettre en pratique des types de procès pénaux inspirés des coutumes des autochtones mais entourés des garanties du procès équitable. On peut en juger en relisant le texte (inédit) de la conférence donnée le 10 octobre 2000 à l’ENM par l’honorable juge J.-L. Dutil (Juger les autochtones). Pour l’essentiel, on notera que la justice y est foraine, avec des juges professionnels itinérants détachés de la Cour du Québec, qui viennent en avion (mode exclusif de transport) dans les territoires du grand nord, l’éloignement de Montréal pouvant atteindre 4 000 km. Deux Cours itinérantes ont été formées avec un déplacement groupé du juge, du procureur, du greffier, des avocats de la défense, du travailleur parajudiciaire, de l’agent de probation et, parfois, de l’organisateur du voyage ; les prévenus et les détenus sont transportés dans le même avion que la première Cour avec les officiers de police ; ceux qui relèvent de la seconde Cour sont maintenant transportés par un avion distinct. Toutes ces personnes sont logées à l’arrivée dans un hôtel coopérative, sans restaurant, ce qui suppose qu’elles cuisinent elles-mêmes leurs plats, en commun ! Le rôle étant très chargé, la Cour connaît, comme en France, des audiences nocturnes ; la durée des audiences est d’autant plus longue que la présence d’un interprète est obligatoire, y compris dans la préparation de la défense de l’accusé par son avocat lorsqu’il veut s’entretenir avec lui. Même pesanteur dans l’interrogatoire des témoins. Tout doit être traduit. On notera que l’interprète de la Cour n’est pas le même que celui qui traduit pour les avocats, pour la raison que, dans le travail préparatoire de l’avocat avec son client, l’interprète a pu entendre des révélations (confidentielles) qui le mettraient mal à l’aise devant la Cour au cours des débats s’il devait intervenir. Antérieurement à l’arrivée des Blancs, la justice pénale était rendue par la communauté inuit, donc par les pairs du délinquant ; pour mieux faire accepter la justice de l’État canadien, il est fréquent que le juge consulte la communauté inuit avant de prononcer sa sentence, une fois que l’accusé a reconnu être coupable ou a été déclaré tel (c’est la distinction de la décision sur la culpabilité et de la décision sur le quantum de la peine) ; parfois, ces mêmes communautés ne souhaitent pas être consultées pour l’imposition des sentences ; il s’agit des cas « lourds ». V. aussi le film canadien de Zacharias Kunuk, Atanarjuat, 2000. – L. Lebel, Structures fondamentales et conduite du procès pénal en droit canadien : Bull. inf. C. cass. 15 mars 2003. Adresse de la Cour suprême canadienne : reception@csc.gc.ca

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